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mardi 17 juin 2025

12.80 - MON AVIS SUR LE FILM DU SANG DANS LE DESERT DE ANTHONY MAN (1958)


 Vu le film Du Sang dans le Désert de Anthony Mann (1958) avec Henry Fonda Anthony Perkins Betsy Palmer Michel Ray Lee Van Cleef Russel Simpson James Bell Russel Simpson 

Morgan Hickman, autrefois shérif, est devenu un chasseur de primes cynique et sans illusion. Il arrive dans une petite ville dont le shérif, Ben Owens, est un jeune homme totalement inexpérimenté. Owens remplace l'ancien shérif, qui vient d'être assassiné, et sa position n'est que temporaire. En arrivant en ville, Hickman lui sauve la vie. Le jeune shérif propose alors à Hickman de devenir son adjoint, afin qu'il puisse l'aider à apprendre les ficelles du métier. 

Dans la constellation brillante des westerns des années 50, Du Sang dans le Désert s’impose avec une sobriété exemplaire et un charme classique. Dirigé par Anthony Mann, maître du genre, ce western est moins connu que ses collaborations avec James Stewart, mais il n’en reste pas moins remarquable. Dès les premières images, on comprend que l’histoire, tout en respectant les codes du genre, va surtout jouer sur l'opposition et la transmission entre deux hommes : le jeune shérif Ben Owens (Anthony Perkins), maladroit et en quête d’assurance, et le chasseur de primes Morg Hickman (Henry Fonda), un vétéran désabusé au passé trouble. 

Le récit se déroule dans une petite ville à la moralité tremblotante, secouée par l’arrivée de bandits qui mettent à l’épreuve l’ordre établi. L’intrigue suit une ligne limpide : un jeune homme veut devenir un bon shérif, mais il n’en a ni les moyens, ni les nerfs. Heureusement, le destin – ou le hasard – place sur sa route un mentor improbable. Morg Hickman, vêtu de noir, une étoile de shérif d’un autre temps au fond de sa poche, arrive avec un cadavre enroulé dans une bâche et une récompense à la clef. D’emblée, Fonda impose une prestance sereine, intimidante et juste. Son regard bleu perçant semble contenir toute l’expérience du Far West, toute la lassitude d’un homme qui a vu la violence et n’en veut plus. 

Anthony Perkins, dans l’un de ses premiers grands rôles, incarne un personnage de western inhabituel : nerveux, jeune, doux, presque frêle – il est l’anti-John Wayne. Mais c’est justement cette fragilité qui rend son parcours émouvant. Il ne s’agit pas d’un héros né, mais d’un homme qui va le devenir, par l’apprentissage, l’humilité et le courage. On aurait pu craindre une confrontation de générations ou de styles, mais Mann préfère tisser une relation d’estime mutuelle, fondée sur l’exemple et la confiance. Hickman devient un modèle discret, presque paternel. 

L’histoire, classique en apparence, est servie avec soin : la ville est divisée, les citoyens sont lâches ou ambivalents, un notable tyrannique veut faire la loi à sa place, et le jeune shérif doit s’imposer face à cette adversité morale autant que physique. Le thème du rite de passage, si cher aux westerns, est au cœur du récit. Ben Owens n’est pas un pistolero, mais il va devoir prendre des décisions lourdes et s’affirmer, notamment face à ceux qui doutent de lui ou cherchent à le manipuler. 

La mise en scène d’Anthony Mann est discrète, jamais démonstrative, mais précise et tendue. Il filme les visages plus que les fusillades, les hésitations plus que les exploits. On sent une volonté de rendre ce monde crédible, humain, faillible. Le duel final, sobre et tendu, n’est pas une apothéose sanglante mais une épreuve de vérité. Le western, ici, est une affaire de morale avant d’être une affaire de poudre. 

On retrouve bien sûr les figures habituelles du genre : la jolie institutrice (jouée par Betsy Palmer) qui incarne l’espoir d’un monde civilisé ; l’enfant orphelin qui accompagne Morg et réveille chez lui une tendresse enfouie ; le corrompu qui incarne la menace intérieure ; et la foule, versatile et peureuse, qui ne soutient jamais les justes avant la dernière minute. 

Mais c’est justement dans cette structure éprouvée que le film trouve sa force. Il ne cherche pas à déconstruire le western, il l’accomplit avec rigueur. Il s’inscrit dans une époque où les cowboys n’étaient pas encore révisionnistes, mais où l’héroïsme passait déjà par le doute, la solitude, et la transmission. 

Henry Fonda, massif, impassible, mais profondément humain, porte le film avec une élégance toute en retenue. Perkins, dans sa jeunesse maladroite, est d’une sincérité désarmante. Leur duo fonctionne à merveille, et c’est sans doute cela qui reste le plus fort dans Du Sang dans le Désert : cette idée que le courage s’apprend, que le devoir se transmet, et que la force peut se passer d’éclats. 

Un western peut-être mineur dans la carrière d’Anthony Mann, mais un grand moment de classicisme maîtrisé. Pour qui aime les grands espaces, les dilemmes moraux, les personnages à taille humaine et les regards qui en disent long, voilà une soirée de cinéma solide et fidèle à l’âge d’or du genre. 

NOTE : 12.80

FICHE TECHNIQUE


DISTRIBUTION

Cascades

Jack N. Young

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