Vu le film l’Assassin est dans l’Annuaire de Léo Joannon (1962) avec Fernandel Marie Déa Edith Scob Georges Chamarat Maurice Teynac Robert Dalban Henri Crémieux Noel Roquevert Léo Joannon
Albert Rimoldi, modeste et timide employé de banque au Crédit Central de Rouen, mène une vie discrète, rythmée par la routine et les moqueries de ses collègues. Un jour, ces derniers lui jouent un mauvais tour en lui adressant une fausse lettre d’amour signée « Jenny », une mystérieuse admiratrice. Rimoldi, naïvement séduit par cette attention, se rend au rendez-vous… pour découvrir qu’il a été la cible d’une farce cruelle.
L’Assassin est dans l’annuaire de Léon Joannon est un objet filmique curieux, qui déroute autant qu’il déconcerte. Adapté d’un roman de Charles Exbrayat, dont le titre promettait une plongée sombre dans le polar, le film vire davantage vers une comédie maladroite, où l’humour et l’intrigue criminelle se parasitent mutuellement sans jamais vraiment s’épouser. L’effet de déception vient surtout du décalage entre ce que l’on attendait – une enquête noire et tendue – et ce qui nous est servi : une fable étrange, bancale, parfois absurde, où l’on rit peu et où l’on frémit encore moins.
Fernandel, placé au centre du récit, incarne un employé de banque naïf, tendre et un peu gauche, malmené par ses collègues. Le personnage, habituellement cantonné aux comédies populaires ou aux drames pagnolesques, se retrouve ici dans une situation insolite : humilié au travail, victime d’une blague cruelle sous forme de fausse lettre d’amour, il glisse peu à peu dans une spirale de doute et de colère. Fernandel est impeccable : il joue avec sobriété, sans cabotinage, offrant un visage inhabituel de douceur blessée. Mais si son interprétation intrigue, elle ne suffit pas à donner corps à un scénario qui hésite en permanence entre satire sociale, comédie policière et drame psychologique.
Les seconds rôles – collègues de bureau, personnages de la banque, figures périphériques – servent surtout de repoussoirs à la naïveté du héros. Mais la mécanique tourne court : on ne sait jamais si l’on doit prendre cette histoire au sérieux, si la menace est réelle ou si tout n’est qu’un mauvais canular. Cette confusion narrative, au lieu de nourrir l’ambiguïté, désamorce le suspense et finit par lasser.
La mise en scène de Léon Joannon reste fonctionnelle, trop sage, presque télévisuelle. Elle se contente de poser les personnages dans des décors neutres sans jamais les sublimer ni les plonger dans une atmosphère véritablement inquiétante. Quant à la musique de Marc Lanjean, déjà entendu sur Razzia sur la chnouf, elle s’avère ici catastrophique : décalée, lourde, parfois grotesque, elle écrase les scènes au lieu de les souligner.
On retiendra malgré tout quelques éclats : la scène où Fernandel, las d’être humilié, rend les coups à ses collègues ; ou encore ces moments où, derrière son regard doux, perce une inquiétante étrangeté. Mais cela reste des fragments isolés dans un ensemble confus.
L’Assassin est dans l’annuaire est un film bizarre, ni tout à fait comédie, ni franchement polar, ni même satire aboutie. Fernandel, irréprochable et presque émouvant, s’y promène en décalage complet, prisonnier d’un scénario mal ficelé et d’une mise en scène trop simple. Un rendez-vous manqué, qui aurait mérité plus d’audace et plus de noirceur pour honorer son matériau de départ.
NOTE : 11.30
FICHE TECHNIQUE
- Réalisation : Léo Joannon
- Scénario : Jacques Robert, Léo Joannon, Jean Halain, d'après Charles Exbrayat
- Dialogues : Jean Halain
- Assistants réalisateurs : Roger Dallier, Michel Wichard, Robert Maurice
- Opérateur : Noël Martin, assisté de Guy Marta
- Montage : Raymond Lamy, assisté de Jeannine Verneau
- Décors : Paul-Louis Boutié, assisté d'Henri Sonois et Olivier Girard
- Son : Jean Bertrand
- Script-girl : Cécilia Malbois
- Ensemblier : Robert Turlure
- Maquillage : Boris Karabanoff
- Régie générale : Mireille de Tissot
- Édith Scob est coiffée par Alexandre de Paris
- Photographie : Pierre Petit
- Musique : Marc Lanjean
- Production : Marianne Productions, Gaumont
- Directeur de production : Roger de Broin
- Producteur délégués : Alain Poiré, Robert Sussfeld
- Distribution : Gaumont
- Transparence, effets spéciaux : Franstudio
- Fernandel : Albert Rimoldi
- Marie Déa : Édith Levasseur
- Édith Scob : Jenny
- Georges Chamarat : Henri Leclerc
- Maurice Teynac : M. Levasseur
- Robert Dalban : Le commissaire
- Henri Crémieux : Le juge d’instruction
- Noël Roquevert : Le militaire retraité
- Léo Joannon : Dr Jousseaume
Distribution complémentaire
- Bernard Lavalette : M. Martel, un collègue d'Albert
- Jacques Harden : Bertrand, le convoyeur
- Colette Régis : la logeuse
- Paul Faivre : le patron du café
- Dominique Zardi : un joueur de billard
- Céline Léger : la monitrice
- Alice Leitner : la vendeuse de billets de loterie
- Gisèle Grimm : Annette
- Charles Lemontier : un employé du jardin public
- Claire Olivier : Mme Levasseur
- Henri Attal : un consommateur au café
- Georges Bever : le secrétaire du juge d'instruction
- Charles Bouillaud : M. Mercier, un locataire
- Christian Brocard : un employé du jardin public
- Bibi Morat : Robert, le fils de la logeuse
- Marc Arian : un homme comptant les sacs du fourgon
- Viviane Méry : la dame du parc
- Robert Rondo : Renaud, un inspecteur de police
- Sabine André : Cécile
Rôles crédités sans rôle précisé :

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