Vu le film Les 4 Fils de Katie Elder de Henry Hattaway (1965) avec John Wayne Dean Martin Martha Hyer Michael Anderson Jr Eral Holliman Jeremy Slate James Greggory Paul Fix George Kennedy Dennis Hooper John Littel John Doucette
En 1898 à Clearwater , au Texas, les quatre fils de Katie Elder se retrouvent pour les funérailles de leur mère. Ils découvrent que celle-ci vivait dans la pauvreté et que leur père, assassiné, avait perdu aux cartes le ranch familial, au profit de Morgan Hastings. Les trois plus âgés des Elder ont la gâchette facile, surtout le cadet Tom, recherché par la loi. Le benjamin, Bud, voudrait suivre leur « exemple », alors que sa mère aurait souhaité qu'il fasse des études. Les circonstances de la cession du ranch familial restant obscures et Hastings ayant embauché un homme de main, Curley, pour éliminer John, l'affrontement devient inévitable.
Les Quatre Fils de Katie Elder (Henry Hathaway, 1965) est un western qui se glisse un peu dans l’ombre des grandes fresques fordiennes, mais qui mérite qu’on s’y arrête, justement parce qu’il condense une autre vision de l’Ouest américain : plus rude, plus âpre, moins poétique, mais terriblement efficace. Henry Hathaway, réalisateur chevronné, ne se perd pas dans l’épopée lyrique. Il préfère un récit direct, solide, centré sur la confrontation entre la justice et la loi du plus fort, avec au centre une famille brisée par le deuil et la rancune.
Le film s’ouvre sur l’enterrement de Katie Elder, figure maternelle respectée, femme pieuse et courageuse, qui a tenu son foyer seule après la mort trouble de son mari. Ses quatre fils, qui ne lui ont pas rendu la visite attendue de son vivant, se retrouvent autour de sa tombe. Il y a John Elder, l’aîné, incarné par John Wayne, cowboy au port droit, marqué par l’expérience, la droiture, mais aussi l’ombre d’une culpabilité filiale. Viennent ensuite Tom Elder, joueur professionnel à l’humour bravache, campé par Dean Martin, qui retrouve Wayne après Rio Bravo. Le troisième frère, Matt (Earl Holliman), est plus discret, un brin effacé, tandis que le benjamin Bud (Michael Anderson Jr.), encore adolescent, découvre l’Ouest brutal en compagnie de ses aînés.
L’histoire prend vite une tournure dramatique : on apprend que le père Elder a été assassiné, une balle dans le dos, et qu’étrangement son ranch est passé aux mains d’un notable véreux, Morgan Hastings (James Gregory). La famille se retrouve donc non seulement à devoir faire face à la perte de ses parents, mais aussi à une injustice flagrante : comment leur mère a-t-elle pu être laissée sans ressources ? Pourquoi personne ne s’est élevé contre la spoliation de leurs terres ?
John Wayne endosse ici un rôle double : celui de frère protecteur, imposant son autorité naturelle sur ses cadets, et celui de justicier, décidé à rétablir la vérité coûte que coûte. Hathaway montre bien le contraste entre les tempéraments : Tom a la gâchette facile, Bud est encore naïf et impulsif, John incarne la patience et la sagesse, mais aussi une colère sourde. Cette dynamique familiale donne au film un souffle dramatique particulier : on est autant dans le récit de vengeance que dans une quête de réconciliation fraternelle.
Le casting apporte une vraie densité. Dean Martin, toujours élégant, trouve dans Tom un rôle ironique, un joueur qui préfère le charme à la brutalité, mais qui finit par se ranger derrière son frère. Earl Holliman campe un personnage un peu plus discret mais solide, tandis que Michael Anderson Jr. incarne la jeunesse en quête d’identité. Face à eux, George Kennedy, imposant et brutal, fait office de colosse menaçant, véritable obstacle physique à la quête des Elder. Le duel latent entre Wayne et Kennedy est l’un des moments de tension les plus marquants du film.
La mise en scène d’Hathaway, sans être flamboyante, a le mérite de l’efficacité. Les chevauchées, les fusillades, les bagarres sont filmées avec un sens de la clarté et du rythme qui empêche tout ennui. On est dans un western de facture classique, mais où la force vient moins des paysages que de la tension morale et familiale. L’absence des envolées lyriques d’un John Ford ne joue pas contre le film : elle l’ancre dans une gravité plus dure, presque crépusculaire.
Au fond, Les Quatre Fils de Katie Elder est un western sur la résilience et la justice. Ces frères, qui n’ont pas toujours été présents, choisissent enfin de défendre l’honneur de leur mère et de leur nom. Le film devient alors un plaidoyer contre la cupidité, contre le jugement hâtif, contre ceux qui exploitent la faiblesse des autres pour asseoir leur pouvoir. Le spectateur suit avec une sympathie croissante cette fratrie qui, derrière ses querelles et ses maladresses, retrouve une unité autour d’un idéal simple : laver l’injustice, protéger la mémoire familiale, rendre à leur mère défunte la dignité qu’on lui avait volée.
John Wayne, éternel cowboy en quête de justice, trouve ici un rôle où sa stature physique et morale s’impose naturellement. Il est moins le héros solitaire qu’un chef de clan, un frère qui doit guider les autres. Sa confrontation avec George Kennedy cristallise cette idée : deux forces brutes s’affrontent, mais derrière Wayne, il y a l’amour d’une mère, la mémoire d’une famille, une cause juste qui transcende la violence.
En définitive, ce film est bien plus intéressant qu’on ne pourrait le croire. Hathaway livre un western familial où se mêlent vengeance et fidélité, où la fraternité sert de moteur narratif. Certes, le panache et l’humour de Rio Bravo ne sont pas là, et l’élégance poétique de Ford non plus. Mais il y a autre chose : une sincérité, une dureté sans fard, et surtout une belle réflexion sur la mémoire, le deuil et la justice.
Un western solide, moins connu, mais à revisiter absolument pour ce qu’il dit de John Wayne : non plus seulement l’icône solitaire, mais le frère, le fils, le patriarche protecteur.
NOTE : 13.80
FICHE TECHNIQUE
- Réalisation : Henry Hathaway
- Scénario : William H. Wright, Allan Weiss et Harry Essex, d'après une histoire de Talbot Jennings
- Photographie : Lucien Ballard
- Direction artistique : Hal Pereira et Walter Tyler
- Décors : Sam Comer et Ray Moyer
- Costumes : Edith Head
- Musique : Elmer Bernstein
- Montage : Warren Low
- Production : Hal B. Wallis
- Société de production : Hal Wallis Productions
- Société de distribution : Paramount Pictures
- Tournage : du au mois de
- John Wayne (VF : Jean Martinelli) : John Elder
- Dean Martin (VF : Michel Gudin) : Tom Elder
- Martha Hyer (VF : Anne Carrère) : Mary Gordon
- Michael Anderson Jr. (VF : Pierre Pernet) : Bud Elder
- Earl Holliman (VF : Jacques Degor) : Matt Elder
- Jeremy Slate (VF : Pierre Marteville) : Ben Latta
- James Gregory (VF : Claude Bertrand) : Morgan Hastings
- Paul Fix (VF : Serge Nadaud) : Le shérif Billy Wilson
- George Kennedy (VF : Pierre Collet) : Curley
- Dennis Hopper (VF : Claude D'Yd) : Dave Hastings
- Sheldon Allman (VF : Marcel Bozzuffi) : Harry Evers
- John Litel : Le pasteur
- John Doucette (VF : Jacques Marin) : Hyselman
- James Westerfield (VF : Marcel Lestan) : Mr. Vennar
- Rhys Williams (VF : Alexandre Rignault) : Charlie Striker
- John Qualen (VF : Henri Crémieux) : Charlie Biller
- Strother Martin (VF : Raymond Rognoni) : Jeb Ross
- Percy Helton (VF : René Hiéronimus) : Mr. Peevy
- Karl Swenson (VF : Jean-François Laley) : Doc Isdell
- Rodolfo Acosta (VF : Georges Hubert) : Bondie Adams

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