Vu le Télefilm Filip de Laurent Tuel (2025) avec Mikael Mittelstadt Sara Mortensen Adrien Truong Mael Cordier Ophélia Kolb Samuel Labarthe Marcello Mazzarella Miglen Mirtchev Patrick Puydebat Thalia Joly Mia Fry
Filip Nikolic, icône de la génération boys-band des années 90, est devenu une véritable star grâce aux 2Be3. Au sommet de sa gloire, il rencontre l’amour de sa vie, Valérie, qui deviendra le témoin impuissant de son déclin. Entre passion amoureuse, soif de reconnaissance et blessures du passé, c’est le destin brisé d’un homme qui a marqué toute une époque…
Il est des biopics qui éclairent une vie, qui en révèlent la force, la fragilité et la singularité. Et il est des biopics qui, au contraire, éteignent la lumière de leur sujet. Malheureusement, Filip de Laurent Tuel, diffusé sur TF1, appartient à la seconde catégorie. Le projet annoncé comme un hommage au chanteur des To Be 3, comédien et figure solaire des années 90, se révèle vite n’être qu’un trompe-l’œil.
On nous avait promis un portrait fidèle, humain, tendre, retraçant un destin fulgurant et brisé. Ce qu’on découvre, c’est un récit qui se concentre essentiellement sur Valérie Bourdin, son ex-compagne et autrice du livre Un peu d’argent fait du bien, qui sert de base au scénario. Le titre du téléfilm est Filip, mais le vrai sujet semble être Valérie elle-même, comme si elle s’écrivait au cœur de l’histoire, reléguant Filip à un rôle secondaire dans sa propre vie.
Où est passé l’éclat du groupe To Be 3, véritable phénomène populaire des années 90, qui a rempli les Zéniths et marqué une génération entière d’adolescents ? Où sont Adel et Frank, ses frères de scène, ses complices ? Ils n’apparaissent qu’à peine, comme de simples figurants, quand ils furent une part essentielle de cette aventure. C’est une trahison pour les fans, une mémoire amputée.
Et que dire de son parcours d’acteur ? Filip a incarné un personnage marquant dans Navarro, le lieutenant Yann Boldec. Cette carrière télévisuelle l’a inscrit durablement dans le paysage audiovisuel français. Mais là encore, le téléfilm ne fait qu’effleurer cette période, comme si elle n’avait jamais existé. On réduit une trajectoire riche et complexe à une poignée de clichés mélodramatiques.
Plus troublant encore : l’absence quasi totale d’Arnaud, l’homme qui a partagé l’essentiel de sa vie. Pourquoi TF1 a-t-il choisi de gommer cette relation durable et authentique ? Ce silence en dit long. On préfère laisser croire à une histoire d’amour unique et centrale avec Valérie, alors qu’elle ne fut qu’une parenthèse dans son existence. C’est une trahison intime, une négation de ce qu’il était.
Filip Nikolic n’était pas un homme sombre, terne ou passif, comme l’impose le scénario. Il était solaire, généreux, drôle, toujours en mouvement. Une énergie pétillante qui se sentait aussi bien sur scène qu’en coulisses. Le film, au contraire, le réduit à une silhouette triste, subissant les événements sans jamais rayonner. C’est là que la mise en scène de Laurent Tuel échoue radicalement : plate, sans souffle, sans invention. Comme si la caméra avait honte d’aimer son sujet.
Quant aux acteurs, difficile de sauver leurs performances. Aucun ne parvient à saisir la vérité de Filip, sa chaleur, son charisme naturel. On ne sent ni le chanteur idolâtré, ni le comédien reconnu, ni même l’homme attachant. Tout paraît faux, joué sans conviction, avec une distance gênante.
En somme, ce téléfilm trahit son sujet. Ce n’est pas un biopic, c’est un récit réécrit au profit d’une mémoire individuelle. Il occulte l’essentiel : la carrière fulgurante, la vie de groupe, la complicité avec Adel et Frank, le travail dans Navarro, l’amour partagé avec Arnaud. Il gomme l’authenticité d’un homme pour n’en livrer qu’une image rétrécie et partielle.
Ce que le public attendait, c’était un hommage. Ce qu’il reçoit, c’est une caricature. L’histoire de Filip méritait mieux, bien mieux. Netflix prépare paraît-il un biopic sur le groupe To Be 3. Espérons qu’il sera plus inventif, plus respectueux, plus vrai. Qu’il montre enfin Filip comme il était : un garçon lumineux, parfois fragile mais toujours rayonnant, porté par l’amitié, la musique et une authenticité rare.
TF1 a choisi l’ombre. Il reste à espérer que d’autres choisiront la lumière.
NOTE : 5.20
FICHE TECHNIQUE
- Réalisation : Laurent Tuel ]
- Scénario : Christelle Parlanti, Frédéric Royer et Laurent Tuel[ ]
- Musique : Philippe Deshaies
- Décors : Antoine Maron
- Costumes : Tamara Faniot
- Photographie : Christophe Legal[]
- Son : Hugo Thouin
- Montage : Patrick Zouzout
- Production : Pauline Chapatte et Stéphane Drouet[]
- Sociétés de production : 3e œil productions, MakingProd, TF1, Be-FILMS et la RTBF (télévision belge)
- Mikaël Mittelstadt : Filip Nikolic
- Sara Mortensen : Valérie Bourdin
- Adrien Truong : Adel Kachermi
- Maël Cordier : Frank Delay
- Ophélia Kolb : Barbara
- Samuel Labarthe : Marc Gasnier
- Marcello Mazzarella : Ettore Munari, le psy
- Miglen Mirtchev : Kode, le père de Filip
- Joëlle Haddad : Sladinka, la mère de Filip
- Lou Pers : Tanelle, 5 ans
- Jamel El-Gharbi : Harry, le garde du corps
- Patrick Puydebat : Alain, PDG d'EMI
- Ludovic Locoche : Momo, régisseur de Bercy
- Véronique Bessières : Comtesse Rosenburg
- Stéphane Boissier : Jacques Vareuil, le galériste
- Avant Strangel : Terence Simonns
- Mia Frye : la chorégraphe
- Mathieu Buscatto : Tom Mercier, directeur général de Barclay
- Thalia Joly : Sasha, de 4 à 6 ans

Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire