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samedi 27 septembre 2025

6.70 - MON AVIS SUR LE FILM MILLI VANILLI DE LAGLOIRE AU CAUCHEMAR DE SIMON VERHOEVEN (2023)

 


Vu le film Milli Vanilli de la Gloire au Cauchemard de Simon Verhoeven (2023) avec Elan Ben Ali Tijan Njie Matthias Schweighofer Graham Rogers Bella Dayne Stevonte Hart Ashley Dowds Michael Martens Natasha Long 

Dans les années 1980, le célèbre producteur de musique allemand Frank Farian rencontre deux inconnus officiant comme mannequins, l'Allemand Rob Pilatus et le Français Fabrice Morvan. Ils fondent le groupe musical Milli Vanilli qui va connaitre le succès à la fin des années 1980 avec notamment la chanson Girl You Know It's True. Au sommet de sa gloire, Milli Vanilli remporte un Grammy Award en 1990. Cependant, peu de temps après, il est révélé que les deux chanteurs ne sont pas les vrais interprètes des morceaux et qu'ils sont toujours en playback. Cela créé alors la controverse et sera l'un des plus grands scandales de l'histoire de la musique au monde 

Y a-t-il des biopics indispensables quand les artistes eux-mêmes ne le sont pas vraiment ? La question se pose avec Milli Vanilli : de la gloire au cauchemar. Simon Verhoeven s’attaque à l’histoire du duo le plus controversé de la pop des années 80, Rob Pilatus et Fab Morvan. Deux beaux garçons, danseurs talentueux, silhouettes parfaites pour les clips, mais incapables de chanter. Ils sont choisis, façonnés, emballés comme un produit de luxe. Et ce mensonge deviendra l’un des scandales les plus retentissants de la musique moderne. 

Le film se concentre sur les deux « héros » : Rob (Tijan Njie) et Fab (Elan Ben Ali). De jeunes gars à la beauté magnétique, qui dansent divinement et font chavirer les foules, mais qui n’ont aucune voix. Leurs chansons ne sont que des playbacks, enregistrés par d’autres chanteurs. Dès lors, leur ascension est une mascarade, construite sur du vide, sur des voix volées. Ils sont manipulés, certes, mais consentants, trop heureux d’avoir droit aux projecteurs et aux paillettes. Leur transparence devient leur malédiction : beaux à regarder, muets à entendre. 

Et pourtant, c’est là que le film aurait pu trouver sa force : s’intéresser à l’escroquerie d’envergure, à la machine infernale de l’industrie qui fabrique des stars artificielles. Mais Verhoeven reste trop du côté des victimes, donnant la parole à Rob et Fab, alors que l’un d’eux n’est plus là pour se défendre. La vraie histoire se joue ailleurs : chez Frank Farian (Matthias Schweighöfer), le producteur, architecte cynique qui avait déjà fait fortune avec Boney M, autre machine à tubes, autre cash machine. Ce regard-là, sur l’industrie, sur les producteurs, sur les médias qui se sont aveuglés, sur le public qui a crié au scandale une fois la supercherie découverte, aurait donné une analyse plus puissante. 

À l’écran, pourtant, l’histoire est efficace : on suit l’ascension fulgurante des deux garçons, les concerts mondiaux où le public hurle, les clips kitsch où ils resplendissent, et puis la chute brutale. Le moment où les bandes sautent, où le mensonge éclate en direct, est restitué avec intensité. On ressent l’effondrement d’un rêve. Mais ce rêve était-il seulement le leur ? Ou celui d’une industrie qui n’avait besoin que d’images parfaites pour vendre des millions de disques ? 

Le casting fait le travail : Tijan Njie et Elan Ben Ali sont crédibles, beaux, charismatiques, mais prisonniers d’un rôle qui ne leur laisse pas beaucoup d’épaisseur psychologique. Ils sont, comme leurs modèles, réduits à l’apparence. Schweighöfer, en Farian, campe un producteur habile, mais le film ne lui donne pas toute la place qu’il mériterait. On aurait aimé que le récit plonge davantage dans ses choix, dans son cynisme, dans la mécanique d’un homme qui transforme des voix anonymes et des corps glamour en or massif. 

Car au fond, ce qui est intéressant dans l’histoire de Milli Vanilli, ce n’est pas seulement la trajectoire tragique de Rob, ni la résilience de Fab. C’est ce que ce scandale dit de notre époque : la soif d’icônes parfaites, l’acceptation tacite du mensonge tant qu’il fait danser, puis la violence du rejet quand le rideau tombe. Le public a adoré les illusions, puis il a brûlé ceux qui les incarnaient. C’est la vraie cruauté : nous avons applaudi la mascarade avant de la condamner. 

Le film, lui, choisit l’angle mélodramatique : l’amitié, la chute, le destin brisé. C’est respectable, mais réducteur. On ressort avec le sentiment d’avoir vu une triste histoire racontée par de tristes gens, sans que l’essentiel ait été interrogé : comment les médias ont couvert ce scandale, comment l’industrie a fabriqué et détruit deux jeunes hommes, comment Farian a continué à prospérer. 

Milli Vanilli : de la gloire au cauchemar reste un biopic correct, parfois émouvant, mais pas indispensable. Il n’atteint pas la force d’un grand film sur la musique, parce qu’il s’attache trop aux apparences, exactement comme ses personnages. Le vrai sujet, celui des producteurs, du marché, de la responsabilité collective, reste en arrière-plan. On a voulu donner une voix à ceux qui n’en avaient pas. Mais ce qui résonne, au final, ce n’est pas leur chant – c’est le silence assourdissant d’une imposture. 

NOTE : 6.70

FICHE TECHNIQUE

  • Réalisation et scénario : Simon Verhoeven
  • Musique : Segun Akinola
  • Décors : Heike Lange
  • Costumes : Ingken Benesch
  • Photographie : Jo Heim
  • Montage : Alexander Berner, Felix Schmerbeck et Elena Schmidt
  • Production : Quirin Berg, Max Wiedemann et Kirstin Winkler
  • Sociétés de production : Leonine Productions, Wiedemann & Berg Film, Sentana Film, SevenPictures, Mediawan et Voltage Pictures
  • Société de distribution : Voltage Pictures

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