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vendredi 26 septembre 2025

14.40 - MON AVIS SUR LE FILM L'HEURE DE LA SORTIE DE SEBASTIEN MARNIER (2018)


 Vu le film L’Heure de la Sortie de Sébastien Marnier (2018) avec Laurent Laffite Emmanuelle Bercot Thomas Scimeco Pascal Grégorry Luana Bajrami Félix Lefebvre Victor Bonnel Grégory Montel Léopold Buschbaum Matteo Perez Thomas Guy Iwen Casteret 

Pierre Hoffman, jeune professeur vacataire, remplace, au sein du collège Saint-Joseph, un collègue qui a tenté de se suicider. Il hérite d'une classe-pilote de 3e, composée de lycéens intellectuellement précoces. Rapidement, Pierre note chez eux des comportements étranges telles qu'une hostilité diffuse et une violence sourde. Ils lui semblent particulièrement préoccupés par la fin du monde. De la curiosité à l'obsession, Pierre va tenter d'en savoir davantage. 

L’Heure de la sortie de Sébastien Marnier, c’est la preuve que le cinéma français peut encore surprendre dans le film de genre, sans une goutte de sang. Là où Grave de Julia Ducournau baignait dans l’hémoglobine, ici la peur vient du silence, des regards, et surtout de ce qu’ils annoncent : notre avenir. 

Dès la première scène, on est cueilli à froid. Une salle de classe, douze élèves sages, plongés dans leur devoir. Le professeur se lève, déplace sa chaise près de la fenêtre, ouvre et… saute. Devant eux. Choc immédiat : malaise personnel ou influence des gamins ? Le doute s’installe et ne nous quittera plus. 

L’école refuse le vide et confie la classe à Pierre Hoffman (Laurent Lafitte, impeccable), prof de français quadragénaire, célibataire paumé, parachuté dans ce nid de surdoués. Très vite, il comprend que six de ces ados ne sont pas comme les autres : Clara (Adèle Castillon), David (Léopold Buschbaum), Sylvain (Mattéo Perez), Bric (Thomas Guy), Johanna (Thelma Dorval) et Dimitri (Victor Bonnel). Un groupe soudé, effrayant de maturité, qui le reprend, le défie, le pousse dans ses retranchements. Pas besoin de cris ni de violence : ces gosses piquent là où ça fait mal, sur l’écologie, les injustices, l’avenir condamné. De vrais Village des damnés modernes, mais version « No Future ». 

Ces six-là jouent à des challenges extrêmes, risquent leur peau comme si la mort n’était déjà plus un problème. Dans une carrière, Pierre découvre leur repaire et des vidéos insoutenables : catastrophes, abattoirs, effondrements. Leur credo est clair : le monde va s’écrouler, alors plus d’obéissance, plus de règles. Et lui, le prof, spectateur impuissant, voyeur fasciné, incapable de reprendre la main. On a parfois envie de lui hurler de réagir, de coller des claques à ces sales gosses, mais non : il les suit, comme hypnotisé. 

Marnier filme cette tension sans effets inutiles. Pas de surcadrage, pas de tape-à-l’œil. Juste une atmosphère, une peur qui s’infiltre. Et il nous balade : on croit à une fin rassurante, une issue de secours… mais la dernière séquence nous coupe les jambes. Les indices étaient là, mais on s’est fait avoir comme des bleus. No future, on vous avait prévenus. 

Ce qui marche, c’est la confrontation : Laurent Lafitte, solide, contre ces six ados flippants. Adèle Castillon, déjà vue dans Sous le même toit, impose une présence glaciale. Thomas Guy (aperçu dans Cigarettes et chocolat chaud), Léopold Buschbaum (Keeper), Mattéo Perez (Les Enfants de la chance) font exister leur personnage. Mais celui qui m’a le plus marqué reste Victor Bonnel : première apparition au cinéma, et déjà glaçant. On peut aussi noter, dans un tout petit rôle, un futur grand : Félix Lefebvre. 

Bien sûr, il reste des zones d’ombre : une relation ambiguë avec le voisin, un collègue qui harcèle sans raison claire… Mais c’est secondaire. Ce qui compte, c’est l’expérience : un film qui serre le ventre, qui nous fait sortir de la salle avec l’envie de regarder ces ados autrement. Pas ceux de Sheila, qu’on attendait joyeux à la sortie de l’école, mais des gamins qu’on n’a surtout pas envie de croiser. 

La fin mérite un mot : Marnier nous tend d’abord la carotte d’une résolution presque apaisante, comme si tout allait se refermer logiquement. Mais il garde une carte en réserve. La dernière séquence, brutale et limpide à la fois, vient balayer nos illusions et laisser une image qui reste longtemps dans la tête. Pas de happy end, pas de porte de sortie : juste l’évidence que ces gosses avaient raison, et que l’avenir qu’ils pressentaient est peut-être déjà là. 

NOTE ; 14.40

FICHE TECHNIQUE


DISTRIBUTION

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