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lundi 5 mai 2025

8.10 - MON AVIS SUR LE FILM ALERTE A LA BOMBE DE JOHN GUILLERMIN (1972)


 Vu le film Alerte à la Bombe de John Guillermin (1972) avec Charlton Heston Jeanne Crain Yvette Mimieux Claude Akins Susan Dey Walter Pidgeon Nicholas Hammond Mariette Hartley Ross Elliott 

Dans un vol reliant Los Angeles à Minneapolis, plusieurs messages sont découverts, exigeant que l'avion fasse route pour Anchorage. Si l'équipage ne s'exécute pas, l'appareil et tous ses occupants seront pulvérisés. Le commandant décide d'obéir au mystérieux pirate de l'air et déroute l'avion. Quand le pirate se dévoile, il exige que le pilote, une fois le plein effectué à Anchorage, redécolle pour Moscou. 

 Film souvent oublié dans la longue liste des « avions en détresse » du cinéma américain, Alerte à la bombe apparaît aujourd’hui comme un curieux jalon dans la carrière de John Guillermin, réalisateur spécialiste du film catastrophe (La Tour infernale, Le Pont de Remagen, King Kong 1976), et comme un avant-goût sérieux de ce que les ZAZ tourneront en dérision moins de dix ans plus tard dans Y a-t-il un pilote dans l’avion ?. On y suit un ancien militaire perturbé, joué par James Brolin, qui détourne un avion de ligne vers l’Union soviétique, menaçant de faire exploser une bombe à bord. En face, Charlton Heston incarne le capitaine Hank O’Hara, archétype du commandant de bord solide et carré, modèle de sang-froid dans la tempête. 

La structure du film est simple : huis clos aérien, tension progressive, révélations par indices, manipulations mentales, scènes de panique. La mise en scène de Guillermin, sans génie mais rigoureuse, entretient un suspense presque clinique. Le spectateur est pris dans ce huis clos avec un casting typique des années 70 : Yvette Mimieux, Claude Akins, Walter Pidgeon, Roosevelt Grier. Tous interprètent les figures classiques de la galerie aérienne : la femme enceinte, l’hôtesse dévouée, le sénateur, le prêtre, le militaire retraité… chacun a une réplique pour camper son archétype. 

Ce qui frappe rétrospectivement, ce n’est pas tant l’efficacité du film que son sérieux imperturbable, ce ton grave qui donne à chaque ligne de dialogue un poids tragique, même lorsqu’il s’agit de vérifier les sandwiches ou de demander l’heure d’arrivée. Et c’est précisément cela qui rend la comparaison avec la parodie des ZAZ hilarante : Y a-t-il un pilote dans l’avion ? semble avoir pioché dans Alerte à la bombe quasiment scène par scène. Le pilote rigide et héroïque (Heston = Robert Hays au second degré), le détournement absurde, les passagers caricaturaux, l’hôtesse qui chante ou rassure un enfant… tout y est, mais inversé, détourné, amplifié. 

Il y a donc une étrange ironie à revoir Alerte à la bombe aujourd’hui. Ce n’est pas un grand film, ni même un très bon film catastrophe – il manque de souffle, de variété visuelle, de progression dramatique véritable. Mais il devient, presque malgré lui, un document comique par effet miroir. Son sérieux est devenu comique malgré lui. La tension qu’il tente d’installer est désamorcée par la mémoire du spectateur, désormais nourrie des gags absurdes que la parodie a surimposés à l’original. Quand Heston ordonne de fouiller l’appareil, on entend presque la voix off ironique de Y a-t-il un pilote… ? 

Guillermin, cinéaste rigide mais souvent efficace, n’apporte pas ici son meilleur savoir-faire. On sent qu’il applique un cahier des charges. Le décor (l’avion) est filmé sans grande inventivité, les enjeux dramatiques sont balisés, et le dénouement – bien que tendu – est presque attendu. Ce qui pouvait, à sa sortie, captiver un public fasciné par la tension froide de la Guerre froide, paraît aujourd’hui daté et parfois mécanique. Reste un film curieux, pas déshonorant, mais figé dans une époque et ses codes. 

Alerte à la bombe est un film catastrophe modeste, convenu, parfois tendu, mais surtout devenu passionnant à revoir aujourd’hui comme le double sérieux d’un chef-d’œuvre parodique. Ce qui en faisait autrefois un film « de genre » en fait désormais une œuvre involontairement drôle par contraste. Ce n’est pas un grand moment de cinéma, mais une page à relire avec un clin d’œil. 

NOTE : 8.10

FICHE TECHNIQUE


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