Pages

mardi 20 mai 2025

11.90 - MON AVIS SUR LE FILM LE CASSE DE HENRI VERNEUIL (1971)


 Vu le film Le Casse de Henri Verneuil (1971) avec Jean Paul Belmondo Omar Sharif Robert Hossein Dyan Cannon Steve Eckhardt Nicole Calfan José Luis de Villalonga Raoul Delfosse 

Alors que quatre truands organisent un cambriolage dans la maison d'un notable d'Athènes, ces derniers sont surpris sur le fait par Abel Zacharia, un officier de police. A la surprise de tous, le policier laisse repartir les malfrats sans les arrêter, loin de se douter que le représentant de l'ordre souhaite en réalité récupérer le butin pour son propre compte. 

Le Casse, c’est du Verneuil pur jus, dans sa veine « internationale » du début des années 70, quand le réalisateur, après Le Clan des Siciliens, cherche à conjuguer le cinéma de genre à la française avec des codes hollywoodiens. Le film s’ouvre sur une séquence remarquable : le cambriolage dans une villa, presque muet, minutieux, tendu, avec ce souci du détail qui évoque Melville. Azad et ses complices, en silence, pénètrent les lieux, désactivent, fouillent, trouvent. C’est propre, méthodique, presque trop parfait. 

Mais voilà, une fois le butin entre les mains, le film bascule dans tout autre chose. À peine Azad sorti de la villa, surgit Abel Zacharia, flic en civil, figure énigmatique campée par un Omar Sharif glacé, classe, impénétrable. Le face-à-face s’annonce excitant, dans cette Athènes de carte postale, avec ses ruelles, ses toits, ses marchés ensoleillés. Pourtant, malgré un début plein de promesses, le film s’épuise assez vite à courir après le style plutôt qu'après la tension dramatique. 

Le paradoxe de Le Casse, c’est que Belmondo y est presque en roue libre. Non pas mauvais – jamais vraiment chez Verneuil –, mais comme s’il jouait une partition qu’il avait déjà trop jouée. Il cavale, saute d’un toit à l’autre, chute d’un immeuble, se fait renverser, frôle la mort avec son sourire de frimeur et ce regard malicieux qu’on connaît par cœur. On le retrouve d’ailleurs dans cette fameuse scène de poursuite automobile sur les hauteurs d’Athènes, que le film vend comme spectaculaire, mais qui tourne rapidement au remplissage de pellicule (et de tôles froissées). 

C’est en fait Omar Sharif qui emporte l’adhésion. Rarement un rôle de flic aura été aussi ambigu, voire antipathique, chez Verneuil. Zacharia n’est ni héros ni méchant, mais une figure trouble, presque fatiguée de devoir faire respecter la loi dans un monde où tout le monde triche. On sent dans ses silences une lassitude existentielle que Belmondo, tout en énergie, ne peut pas égaler. Et c’est lui qui impose son rythme au film, qui ralentit, s’épaissit, se détourne de la ligne droite du polar pour quelque chose d’un peu plus insaisissable. 

Le final dans le silo à blé est d’ailleurs emblématique : Zacharia y meurt, englouti par les grains, image saisissante, presque biblique, qui reste l’un des grands moments du film. C’est aussi là que Verneuil retrouve une forme d’inspiration visuelle, d’épure tragique, qui tranche avec le reste du récit. Et cette réplique, involontairement drôle, sur les "poulets au diamant" destinés à finir "au vinaigre", résume bien l’ironie de ce polar un peu brinquebalant. 

Car Le Casse, au fond, oscille entre deux écoles : celle du film de truands à la française, où tout se joue dans l’élégance, la psychologie, les faux-semblants ; et celle du film d’action à la Belmondo, bondissant, spectaculaire, mais parfois vain. Ce grand écart donne au film un charme certain, presque vintage aujourd’hui, mais aussi un sentiment de vacuité. Tout est en place, les acteurs, la musique de Morricone (étrangement passe-partout ici), la lumière grecque, mais la magie ne prend pas toujours. 

Il reste une curiosité, un film de genre haut de gamme, mais inégal. On sent que Verneuil cherche à jouer sur tous les tableaux : le thriller, le buddy movie, l’exotisme touristique, le duel moral… et c’est peut-être trop. Pas un mauvais film, mais un film schizophrène, à la fois divertissant et un peu creux, qui ne sait pas trop s’il veut être Rififi ou L'Homme de Rio. 

Et ce n’est pas souvent, dans la carrière de Bebel, que quelqu’un d’autre lui vole la vedette. Rien que pour ça, Le Casse mérite d’être vu. 

NOTE : 11.90

FICHE TECHNIQUE


DISTRIBUTION

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire