Vu le film Minecraft de Jared Hess (2025) avec Jack Black Jason Momoa Emma Myers Jennifer Coolidge Sebastian Eugene Hansen Danielle Brooks Matt Berry Allan Henry
Quatre outsiders, Garrett, Henry, Natalie et Dawn, sont soudainement projetés à travers un mystérieux portail menant à la Surface, un incroyable monde cubique qui prospère grâce à l'imagination. Pour rentrer chez eux, il leur faudra maîtriser ce monde, et le protéger de créatures maléfiques comme les Piglins et les Zombies, tout en s'engageant dans une quête fantastique aux côtés de Steve, expert fabricateur. Cette aventure les poussera à être audacieux et à développer leur créativité.
Il y a des films qui divisent, et Minecraft en fait partie. D’un côté, un public adolescent enthousiaste, dopé au rythme des jeux vidéo et aux visuels criards ; de l’autre, les amateurs de cinéma un tant soit peu exigeant, médusés devant une avalanche d’effets numériques bas de gamme, un scénario anémique, et une performance de Jack Black qui ferait passer Jim Carrey pour un modèle de sobriété.
Le film de Jared Hess, adapté librement — très librement — de l’univers cubique et infini du jeu Minecraft, s’impose comme un objet aussi bruyant que creux. Certes, c’est un succès commercial incontestable, mais est-ce là une preuve de qualité ou simplement le symptôme d’un cinéma qui se plie aux algorithmes et aux logiques de franchise ?
Le scénario tient sur un pixel : Ruby, une ado courageuse, vit dans un monde généré à la façon d’un serveur Minecraft, avec des biomes, des zombies, des creepers, des portails du Nether, etc. Lorsqu’un déséquilibre cosmique menace de désintégrer l’univers bloc par bloc, elle part en quête d’un artefact légendaire, accompagnée d’une galerie de personnages caricaturaux, dont Steve (Jack Black en roue libre), un "guide" au passé mystérieux et aux monologues incessants.
Mais au-delà de cette trame ultra-classique de "quête" qui veut sauver le monde, tout s’effondre rapidement. La mise en scène de Jared Hess (à qui l'on doit Napoléon Dynamite) ne semble plus du tout maîtrisée : ni le rythme, ni l’humour, ni l’univers visuel n’arrivent à construire un vrai monde cohérent. Le film se contente d’enchaîner des séquences spectaculaires — ou plutôt spectaculairement hideuses — dans des décors numériques sans âme.
La direction artistique semble avoir été pensée pour un public de TikTokeurs sous caféine : explosions fluo, monstres cubiques mal intégrés, transitions visuelles hystériques… L’image donne parfois l’impression de sortir tout droit d’un mod amateur plutôt que d’une production à 150 millions de dollars. On est loin, très loin du soin graphique de films comme The Lego Movie, auquel Minecraft tente maladroitement de ressembler.
Même la 3D, supposée immerger le spectateur, se révèle inutile et fatigante. Les textures sont pauvres, les éclairages criards, et les créatures n’ont aucune substance dramatique. Le film ressemble davantage à un let’s play géant qu’à une véritable œuvre cinématographique.
Jack Black, pourtant capable de nuances (School of Rock, Bernie), cabotine ici jusqu’à l’épuisement. Son personnage parle tout le temps, crie, chante, chute, grimace, improvise… Rien n’est retenu. Et la voix off, omniprésente, devient vite une torture pour les oreilles. On dirait que chaque ligne de dialogue a été conçue pour une punchline TikTok. C’est dire.
Autour de lui, les autres personnages n’existent pas : Ruby est une héroïne stéréotypée (courageuse, empathique, brillante, forcément orpheline), les sidekicks sont interchangeables, et même les ennemis n’ont aucune vraie personnalité. Le film semble redouter toute forme de silence, de tension dramatique ou d’émotion sincère.
Ce qui est peut-être le plus inquiétant dans Minecraft, c’est ce qu’il annonce du cinéma de demain. Un film bâti comme une succession de niveaux à franchir, conçu pour capter l’attention à court terme, où l’émotion est simulée à coups de musiques grandiloquentes et de ralentis outranciers. Un pur produit de marketing algorithmique, sans vision, sans âme, sans véritable ambition artistique.
Alors oui, Minecraft est un "film d’aventure", mais un film d’aventure sans mystère, sans grandeur, sans mémoire. Le souffle épique est remplacé par des cris, des clins d’œil forcés aux gamers, des références recyclées jusqu’à l’usure. Et pourtant, tout cela fonctionne sur une cible bien précise, habituée aux flux d’images, à la narration découpée, à la surdose sensorielle.
Minecraft est une machine à divertissement pour écran d’ado, un produit calibré et survolté qui sacrifie tout ce qui fait le sel du cinéma : personnages, mise en scène, émotion, beauté. Il ne raconte rien. Il gesticule. Il fait du bruit. Et il gagne de l’argent.
Est-ce le futur du cinéma ? On ose espérer que non. Mais il faudra être vigilants. Car pendant que certains pleurent la disparition de la subtilité, d'autres applaudissent des films qui transforment le spectateur en simple joueur passif.
Un moment sans talent, oui. Sans vision, surtout. Et c’est peut-être ça, le plus triste.
NOTE : 7.10
FICHE TECHNIQUE
- Réalisation : Jared Hess
- Scénario : Chris Bowman et Hubbel Palmer, d'après le jeu vidéo Minecraft créé par Markus Persson
- Musique : Mark Mothersbaugh
- Décors : Grant Major
- Costumes : Lucy McLay et Amanda Neale
- Photographie : Enrique Chediak
- Montage : James Thomas
- Production : Jon Berg, Vu Bui, Roy Lee, Jill Sobel Messick, Jason Momoa, Mary Parent et Torfi Frans Ólafsson
- Production déléguée : Cale Boyter, Todd Hallowell, Brian Mendoza, Jon Spaihts, Kayleen Walters et Lydia Winters
- Sociétés de production : Legendary Pictures, Mojang Studios, Vertigo Entertainment, Domain Entertainment et On the Roam
- Société de distribution : Warner Bros. Pictures (États-Unis, France)
- Budget : 150 000 000 $
- Jack Black (VF : Christophe Lemoine ; VQ : François L’Écuyer) : Steve
- Jason Momoa (VF : Xavier Fagnon ; VQ : Louis-Philippe Dandenault) : Garett Garrison
- Danielle Brooks (VF : Corinne Wellong (dialogues) ; Beehan (chant) ; VQ : Florence Blain Mbaye) : Dawn
- Sebastian Hansen (VF : Tom Trouffier ; VQ : Noé Rouillard) : Henry
- Emma Myers (VF : Lisa Caruso ; VQ : Estelle Fournier) : Natalie
- Jennifer Coolidge (VF : Martine Irzenski ; VQ : Viviane Pacal) : Marlene, la principale adjointe
- Jemaine Clement (VF : Serge Biavan ; VQ : Patrick Chouinard) : Daryl
- Jens Bergensten : un serveur (caméo)
Voix
- Rachel House (VF : Laura Felpin ; VQ : Chantal Baril) : Malgosha[4]
- Jared Hess (VF : Gauthier Battoue ; VQ : Nicholas Savard-L'Herbier) : le général Chungus
- Jemaine Clement : Bruce
- Kate McKinnon : Alex
- Matt Berry (VQ : Martin Watier) : le villageois en tenue verte

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