Vu le film L’Espion qui m’aimait de Lewis Gilbert (1977) avec Roger Moore Barbara Bach Richard Kiel Curd Jurgens Caroline Munro Desmond Llewyn Bernard Lee Lois Maxwell Vernon Dobtchef Walter Gobel
Pour retrouver deux sous-marins nucléaires qui ont mystérieusement disparu, James Bond fait équipe avec l'agent soviétique Anya Amasova. Leur mission les conduit à affronter un ennemi redoutable, Requin, un géant de près de deux mètres vingt quasiment indestructible et armé d'une mâchoire en acier coupante telle un rasoir. 007 devra également affronter Karl Stromberg, l'employeur de Requin, qui désire se servir des sous-marins nucléaires volés pour détruire le monde.
Voici sans doute l’un des meilleurs opus de l’ère Roger Moore, un film-somme du Bond spectaculaire, débordant d’action, d’humour, de glamour et de gadgets farfelus, le tout avec une élégance presque décontractée. L’Espion qui m’aimait ne prétend pas à une grande vraisemblance — et c’est précisément là sa force. Il assume son statut de fantasme d’espionnage, d’aventure cartoonesque à grand spectacle, en puisant dans toutes les obsessions de la série.
L’histoire est simple, linéaire mais efficace : des sous-marins nucléaires de l’URSS et du Royaume-Uni disparaissent mystérieusement. Les services secrets des deux puissances — pourtant ennemies dans la réalité de la guerre froide — sont contraints de collaborer. C’est ainsi que James Bond (Roger Moore), agent du MI6, fait équipe avec la Major Anya Amasova (Barbara Bach), espionne du KGB, pour traquer un certain Stromberg (Curd Jürgens), mégalomane reclus dans sa base sous-marine, qui rêve de détruire le monde terrestre pour le remplacer par une civilisation aquatique. Rien que ça.
Le film commence fort, très fort, avec une séquence d’ouverture d’anthologie dans les Alpes autrichiennes, culminant avec un saut en ski agrémenté d’un parachute frappé de l’Union Jack : voilà tout Moore résumé en un plan — cool, invincible, so british. Cette introduction explosive donne le ton : on ne va pas s’ennuyer.
Le réalisateur Lewis Gilbert (déjà derrière On ne vit que deux fois) reprend la recette du « Bond à la japonaise » et la transpose sous la mer. Il magnifie l’exotisme (Égypte, Sardaigne, océan) et soigne la mise en scène de l’action. Le rythme est soutenu, les cascades spectaculaires (la Lotus Esprit amphibie, la poursuite en moto avec side-car lance-missiles, les décors titanesques de Ken Adam), la musique signée Marvin Hamlisch plutôt funky pour l’époque, et même la chanson de Carly Simon (« Nobody Does It Better ») est devenue un classique.
Roger Moore, dans son troisième Bond, est au sommet de son art. Plus désinvolte que Sean Connery, plus charmeur que brutal, il incarne une version plus légère et ironique du personnage. Son duo avec Barbara Bach fonctionne bien : elle n’est pas qu’un faire-valoir, mais une vraie partenaire (même si la dimension féministe reste sommaire). Mention spéciale à Richard Kiel en « Requin » (Jaws), l’un des méchants les plus emblématiques de la saga : un colosse muet aux dents d’acier, invincible et... étonnamment drôle.
Quant au méchant Stromberg, il reste un cran en-dessous d’un Blofeld ou d’un Goldfinger, mais sa démesure (et son repaire aquatique) compense largement un certain manque de charisme. Son plan, totalement absurde, est typique de l’époque : dominer le monde depuis les abysses. Le fantasme technologique est omniprésent, tout comme la paranoïa post-nucléaire.
On pourrait reprocher au film quelques longueurs (le passage dans le désert) et une naïveté presque enfantine dans sa vision du monde. Mais ce serait passer à côté de sa vraie nature : L’Espion qui m’aimait n’est pas un thriller réaliste mais un opéra pop d’espionnage, un spectacle total, un pur produit des années 70 entre psychédélisme en déclin, géopolitique simplifiée et goût du grandiose.
Il s’inscrit comme un modèle du genre pour ceux qui aiment le Bond baroque, plus proche d’un film de super-héros que d’un roman d’espionnage à la John le Carré. Il annonce aussi l’évolution de la franchise vers le grand n’importe quoi (Moonraker, c’est l’année suivante), mais ici, l’équilibre entre fun, style, et action reste miraculeusement tenu.
L’Espion qui m’aimait, c’est James Bond dans tout ce qu’il a de plus jubilatoire, clinquant et généreux. Un pur plaisir de spectateur, pour peu qu’on accepte les règles du jeu : du grand divertissement, porté par une mise en scène énergique, un héros impavide, des gadgets irrésistibles, une méchante mégalo, une James Bond girl compétente, et ce sentiment que, non, décidément, Nobody Does It Better.
NOTE : 14.80
FICHE TECHNIQUE
- Réalisation : Lewis Gilbert, assisté d'Ernest Day et John Glen
- Scénario : Christopher Wood et Richard Maibaum, d'après le roman L'Espion qui m'aimait de Ian Fleming
- Musique : Marvin Hamlisch
- Photographie : Claude Renoir[]
- Décors : Ken Adam
- Direction artistique : Peter Lamont
- Générique : Maurice Binder
- Production : Albert R. Broccoli
- Sociétés de production : EON Productions et Danjaq
- Société de distribution : United Artists
- Budget : 14 000 000 USD (estimation)[]
- Pays de production :
Royaume-Uni,
États-Unis
- Roger Moore (VF : Claude Bertrand) : James Bond alias 007
- Barbara Bach (VF : Francine Lainé) : le major Anya Amasova alias l’agent Triple-X
- Curd Jürgens (VF : Lui-même) : Karl Stromberg
- Richard Kiel : Requin (Jaws en VO)
- Caroline Munro (VO : Barbara Jefford, VF : Monique Morisi) : Naomi
- Geoffrey Keen (VF : Antoine Marin) : Sir Frederick Gray, ministre de la Défense
- Walter Gotell (VF : Yves Barsacq) : le colonel général Anatol Alexis Gogol, directeur du KGB
- Edward de Souza (VF : Michel Bardinet) : le cheikh Hosein
- Vernon Dobtcheff (VF : Jacques Ebner) : Max Kalba
- George Baker : le capitaine Benson
- Desmond Llewelyn (VF : Louis Arbessier) : « Q »
- Lois Maxwell (VF : Anne Kerylen) : Miss Moneypenny
- Michael Billington : Sergei Barsov (pré-générique)
- Olga Bisera (VF : Béatrice Delfe) : Felicca
- Bernard Lee (VF : Jean Brunel) : « M »
- Shane Rimmer (VF : Dominique Paturel) : le commandant Carter (USS Wayne)
- Sydney Tafler : le capitaine du pétrolier Liparus
- Bryan Marshall : le commandant Talbot (HMS Ranger)
- Valerie Leon (VF : Annie Balestra) : la réceptionniste de l'hôtel en Sardaigne
- Sue Vanner : Martine Blanchaud, la fille au chalet (pré-générique)
- Nadim Sawalha (en) : Aziz Fekkesh
- Eva Rueber-Staier : Rubelvitch
- Robert Brown : l’amiral Hargreaves, commandant de la force nucléaire sous-marine (futur « M »)
- Marilyn Galsworthy : Kate Chapman, assistante de Stromberg
- Milton Reid (en) (VF : Roger Rudel) : Sandor
- Cyril Shaps : Dr Bechmann, co-inventeur du système de traçage de sous-marin
- Milo Sperber (en) : Pr Markowitz, co-inventeur du système de traçage de sous-marin
- Albert Moses : le barman du Mojaba Club
- Nicholas Campbell : un membre de l'équipage (USS Wayne)
- Garrick Hagon : un membre de l'équipage (USS Wayne)
- Anthony Forrest : Palmer (USS Wayne)
- Christopher Muncke : Carrol (USS Wayne)
- Dean Warwick : Turgeon (USS Wayne)
- Kim Fortune : lieutenant de navigation (HMS Ranger)
- Jeremy Bulloch : Andrews (HMS Ranger)
- Sean Bury : Eddie G. Fraiser (HMS Ranger)
- David Auker (en) : Peters (HMS Ranger)
- John Salthouse : James Hunt (HMS Ranger)
- Dawn Rodrigues : une concubine du cheikh Hosein
- Felicity York : une concubine du cheikh Hosein
- Anika Pavel : une concubine du cheikh Hosein
- Jill Goodall : une concubine du cheikh Hosein
- Jeremy Wilkin (en) : le capitaine Forsyth (non crédité)
- Bob Simmons : Ivan, le voyou du KGB (non crédité)
- Chris Webb : Boris, le voyou du KGB (non crédité)
- Victor Tourjanski : le touriste étonné sur la plage (non crédité)
- Michael G. Wilson : un homme au théâtre des pyramides (caméo, non crédité)
- Caroline Cheshire : une danseuse à l'intro titres du film
- Anna Noble : une danseuse à l'intro titres du film

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