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mercredi 22 octobre 2025

15.20 - MON AVIS SUR LE FILM DRACULA DE TODD BROWNING (1931°


 Vu le Film Dracula de Todd Browning (1931) avec Bela Lugosi Helen Chandler David Manners Dwight Frye Edward Van Sloan Herbert Bunston Frances Dade Joan Standing Charles K.Gerrard 

 Le film suit Renfield, chargé de conclure une transaction immobilière avec le comte Dracula, qui se rend dans son château des Carpates, où l'aristocrate, qui s'avère être un vampire, va l'hypnotiser pour le mettre sous ses ordres. Débarqué avec Renfield en Angleterre, Dracula ne tarde pas à créer de nouveaux semblables dans la société locale en commençant par la jeune Lucy. Mais la présence du docteur Van Helsing va contrarier ses plans. 

Je l’ai enfin vu. Le vrai. Le Dracula originel de Tod Browning, l’un des maîtres du bizarre, celui de Freaks, celui qui savait filmer l’anormal comme un miroir tendu à la normalité. Pendant des années, j’ai vu des ersatz, des parodies, des recyclages et des re-re-sorties dans les cinémas de quartier — notamment au Brady — sans jamais croiser le Dracula fondateur. Et là, révélation : moins lyrique que Coppola, moins halluciné que l’Eggers, mais quelle claque. On comprend instantanément pourquoi la créature de Browning hante encore l’histoire du cinéma. 

L’histoire, tout le monde la connaît, mais ici elle prend une forme de pur opéra gothique. Le comte Dracula accueille le jeune Renfield dans son château délabré, avant de quitter la Transylvanie pour Londres afin d’étendre son pouvoir et se nourrir de nouvelles proies. Une fois en Angleterre, il s’intéresse à la délicate Mina, tandis que le docteur Van Helsing tente de percer l’infernal secret du comte. Le récit est simple, parfois théâtral, mais l’atmosphère suffit à tout emporter. 

Il faut dire que dès que Bela Lugosi entre en scène — ou plutôt glisse dans le champ — le film bascule dans un autre monde. Son regard fixe, ses gestes mesurés, ce sourire qui n’en est pas un… on a beau savoir que tout cela a presque un siècle, les poils se dressent immédiatement. Lugosi ne joue pas Dracula : il est Dracula. C’est l’autorité froide, l’élégance prédatrice, la menace qui n’a même pas besoin de parler. Son accent, son phrasé, son port de tête : inoubliable. Les autres acteurs existent dans son ombre, même si Helen Chandler (Mina) apporte une fragilité très juste, et Dwight Frye fait un Renfield halluciné qui, par moments, vole le cadre. 

Browning, lui, dirige encore comme un homme sorti du muet, et ça se sent. Certains mouvements sont raides, quelques scènes paraissent figées, presque burlesques malgré elles. Mais il faut remettre les choses en place : Hollywood sort à peine du silence, le langage sonore s’invente. Et malgré ces raideurs, Dracula offre un univers monumental. Les décors du château sont immenses, presque démesurés, comme si l’espace lui-même rendait hommage à la soif de puissance du comte. La photographie noir et blanc, avec ses ombres épaisses, ses lumières expressionnistes, achève de sculpter un cauchemar aristocratique. 

On peut sourire de certains effets, on peut trouver Edward Van Sloan un peu fade en Van Helsing, mais rien n’éteint l’impact du film. On est pris, hypnotisés, et si le rythme paraît lent, c’est pour mieux laisser la peur se déposer, comme la brume dans un cimetière. 

Ce Dracula n’est pas seulement “le premier de tous les Dracula” : il est la matrice, le modèle, l’ombre portée qui plane sur toutes les versions à venir — de Christopher Lee à Gary Oldman. En sortant de cette vision, j’ai senti la même excitation que devant une pierre fondatrice : un classique qui n’a rien de poussiéreux, parce qu’il impose encore son atmosphère, son mystère et ce visage — celui de Lugosi — glacé pour l’éternité. Un film impérissable sur un immortel. Et cette fois, enfin, je peux dire : j’ai vu l’original, et il m’a mordu. 

NOTE : 15.20

FICHE TECHNIQUE

Production associée : E.M. Asher


DISTRIBUTION

Acteurs non crédités

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