Vu le Film Brésilien Baby de Marcelo Caetano (2024) avec Joao Pedro Mariano Ana Flavia Cavalcanti Bruna LinzMeyer Luiz Bertazzo Marcelo Marzea Patrick Coehlo Kyra Reis
Après sa sortie d'un centre pour mineurs, Wellington se retrouve sans abri et erre dans São Paulo. Dans un cinéma porno, il rencontre Ronaldo. Ils vont entamer une relation et celui-ci va lui apprendre à survivre dans la rue.
Baby de Marcelo Caetano (2024) s’ouvre sur les marges brûlantes de São Paulo, là où la jeunesse survit plus qu’elle ne vit, coincée entre les mirages de la drogue, la prostitution et la violence urbaine. Le film suit Baby, un jeune homme fragile mais obstiné, perdu dans un quotidien sans issue apparente. Errant d’un squat à un trottoir, il cherche désespérément un sens à son existence, une main à laquelle se raccrocher dans un monde qui n’en tend aucune. C’est dans un vieux cinéma porno, à la fois lieu de refuge et de perdition, qu’il rencontre Ronaldo, un homme plus âgé, à la fois protecteur et ambigu, qui voit en lui une forme d’innocence brisée. De cette rencontre naît une relation trouble, faite de tendresse, de désir et de domination, où la recherche d’amour se confond avec celle d’un abri.
Marcelo Caetano, déjà auteur de Corpo Elétrico, signe ici un deuxième long-métrage plus âpre, plus cru, mais d’une humanité bouleversante. Il évite soigneusement le piège du voyeurisme, préférant filmer les corps et les blessures comme des paysages intérieurs. Son regard n’est jamais moral, encore moins complaisant : il accompagne Baby dans son errance, sans l’excuser ni le condamner. La caméra, souvent à hauteur d’homme, s’attarde sur les silences, les gestes, les respirations — tout ce qui fait la vérité des êtres. Ce réalisme social, parfois proche du documentaire, n’exclut pas une réelle poésie : dans les néons d’une rue sale, un regard ou une caresse suffisent à fissurer la nuit.
Baby incarne cette jeunesse brésilienne abandonnée à elle-même, ni victime ni héros, juste un garçon trop jeune pour se défendre et trop lucide pour encore croire aux miracles. Sa relation avec Ronaldo prend des allures d’apprentissage — à la fois moral et charnel — où s’esquisse la quête d’une figure paternelle perdue. L’homme devient miroir, mentor, parfois menace, mais surtout révélateur : c’est à travers lui que Baby découvre son propre pouvoir, sa fragilité et, peut-être, son désir d’échapper à l’engrenage.
Le film n’offre pas de rédemption spectaculaire. Ici, les échappatoires sont rares, souvent illusoires. Pourtant, Caetano laisse filtrer quelques trouées d’espérance : un geste tendre, un plan de lumière, une promesse murmurée. On sent dans sa mise en scène une pudeur, une empathie presque tactile, qui refuse le désespoir total. Le Brésil qu’il filme n’est pas seulement celui de la misère : c’est un pays fracturé où la jeunesse cherche à s’inventer une place, même au prix du danger.
Baby est une œuvre inconfortable, exigeante, qui se regarde moins comme un drame social que comme une traversée intérieure. La rue devient le décor d’un apprentissage à la dure, et la survie, une forme de résistance. Baby espère encore — c’est peut-être cela, la porte de sortie : ne pas renoncer à l’idée d’un ailleurs, d’un amour, d’une vie un peu moins sombre. Un film âpre, pudique, profondément humain, où la tendresse affleure malgré tout, comme une étincelle fragile dans la nuit brésilienne.
NOTE : 11.80
FICHE TECHNIQUE
- Réalisation : Marcelo Caetano
- Scénario : Gabriel Domingues et Marcelo Caetano
- Musique : Bruno Prado et Caê Rolfsen
- Photographie : Joana Luz et Pedro Sotero
- Montage : Fabian Remy
- Production : Stienette Bosklopper, Marcelo Caetano, Juliette Lepoutre, Ivan Melo, Pierre Menahem, Maarten Swart et Beto Tibiriça
- Société de production : Cup Filmes, Desbun Filmes, Plateau Produções, Still Moving, Circe Films, Kaap Holland Film, Telecine, Canal Brasil, Vitrine Filmes et Spcine
- Société de distribution : Epicentre Films (France)
- João Pedro Mariano : Baby
- Ricardo Teodoro : Ronaldo
- Ana Flavia Cavalcanti : Priscila
- Bruna Linzmeyer : Jana
- Luiz Bertazzo : Torres
- Marcelo Varzea : Alexandre
- Patrick Coelho : Zika
- Kyra Reis : Pink
- Baco Pereira : Dayvid
- Sylvia Prado : Tia Suely
- Ariane Aparecida : la cousine Sônia
- Victor Hugo Martins : Allan
- Maurício de Barros : Mozart, au sauna
- Cleo Coelho : Vini, le garçon Torres
- Cael Benício : Pulguinha
- Aquiles : Aquiles
- Kelly Campello : Rose, la mère
- Mauricio Sassi : Cleber
- Roberto Audio : Macedo, le voyeur
- Mawusi Tulani : Mari, à la Fondation Casa
- Alex Amaral : Alberto
- Paula Pretta : Lourdes, la voisine
- Abrãao Kimberley : Cauã, la trompettiste

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