Pages

jeudi 20 novembre 2025

8.10 - LE TIGRE SE PARFUME A LA DYNAMITE DE CLAUDE CHABROL (1965)

 


Vu le Film Le Tigre se Parfume à la Dynamite de Claude Chabrol (1965) avec Roger Hanin Michel Bouquet Margaret Lee Micaela Pignateli Claudio Ruffini Roger Dumas Georges Rigaud Maria Mauban 

 

La D.S.T. envoie le Tigre à Pointe-à-Pitre afin de surveiller le renflouement d'un trésor que des hommes-grenouilles parviennent à voler. Le Tigre retrouve leur trace et découvre qu'ils appartiennent à une organisation néo-nazie l'Orchidée voulant dominer le monde. Le Tigre va tenter d'anéantir ce réseau. 

 

Avec Le Tigre se parfume à la dynamite, on entre dans une zone de turbulences cinématographiques où même les plus fidèles défenseurs de Claude Chabrol préfèrent baisser les yeux. On va vite passer sur ce nanar — et pour la carrière de Chabrol, et pour celle de Michel Bouquet, qui aurait mérité une meilleure compagnie. Cette coproduction à très large spectre a manifestement été pensée pour placer ici et là quelques actrices italiennes et espagnoles, sans véritable nécessité dramaturgique. Il faut dire que la production est signée Christine Gouze-Rénal, épouse de Roger Hanin et sœur de Danielle Mitterrand : un environnement où les liens familiaux comptaient parfois plus que les idées. Mais même ce côté “people d’époque” ne suffit pas à nous éviter un voyage en plein vide. 

Le film s’inscrit dans la continuité directe du premier opus, Le Tigre aime la chair fraîche, déjà pas glorieux. Chabrol et Hanin, peut-être galvanisés par un succès commercial d’alors, décident de remettre le couvert pour offrir une nouvelle aventure à ce fameux agent secret. Sauf que l’agent en question — Roger Hanin, dans son rôle du “Tigre” — demeure l’espion le moins crédible de l’histoire du cinéma français. Le “beauf” Hanin ne donne pas envie de suivre ses aventures avec force, ni même avec curiosité. Dès les premières minutes, on comprend que le film ne fera aucun effort pour approcher la fantaisie d’un OSS 117 ou la rugosité d’un Coplan : ici, ni scénario, ni idée, juste une succession de scènes posées là, comme si le simple fait d’avoir un espion suffisait à faire un film. 

L’intrigue, si l’on peut employer le terme, semble sortir tout droit de l’imaginaire d’un préadolescent en vacances. Le Tigre doit empêcher un trafic d’armes, affronter des ennemis exotiques, sauver le monde — mais tout cela sur un ton si approximatif, si dénué d’énergie, qu’on décroche rapidement. Les situations absurdes s’enchaînent : des hommes-grenouilles armés de ventouses à chiotte, une voiture télécommandée sortie de nulle part, une femme en peau de bête qui semble avoir fui un péplum de série Z… À aucun moment ces trouvailles ne provoquent un sourire, même indulgent. C’est de l’absurde involontaire, de celui qui n’a pas conscience d’être drôle — et qui ne l’est jamais. 

Roger Hanin, plus à côté que jamais, joue un espion qui n’a rien de mystérieux, rien de charismatique. Michel Bouquet, d’ordinaire si impeccable, se retrouve englué dans cette entreprise sans âme, tentant de sauver ce qui peut l’être par son professionnalisme, mais sans réussir à masquer la pauvreté de tout ce qui l’entoure. Les seconds rôles féminins, principalement appelés pour la coproduction, ne disposent de rien à jouer : elles décorent le cadre, littéralement. 

Quant à la mise en scène de Chabrol, elle semble totalement absente. On peine à croire que le même homme signera, quelques années plus tard, ses œuvres majeures. Ici, il illustre sans conviction, sans rythme, presque sans regard. L’image est plate, l’action molle, le montage sans vie. La caméra semble elle aussi vouloir partir en vacances, chaque scène donnant l’impression d’être réglée au plus vite, sans intention particulière. 

Le résultat est un film qui s’oublie aussi vite qu’il se regarde — et encore, le regarder demande une certaine endurance. Une période de la filmographie de Chabrol à oublier, vraiment. On ressort de Le Tigre se parfume à la dynamite avec cette impression étrange que personne n’y croyait, ni les acteurs, ni le réalisateur, ni même le scénario, qui aurait bien voulu exister mais n’a jamais réussi à pousser. 

Un nanar, oui, mais un nanar triste, vidé de toute fantaisie. Un Tigre qui ne rugit jamais. Et une dynamite qui, malgré son titre, ne fera jamais la moindre étincelle. 

NOTE : 8.10

FICHE TECHNIQUE


DISTRIBUTION

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire