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mercredi 12 novembre 2025

14.80 - MON AVIS SUR LE FILM LAST STOP YUMA COUNTY DE FRANCIS GALLUPI (2023)


 Vu le Film Last Stop Yuma County de Francis Gallupi (2023) avec Jim Cummings Jocelin Donahue Sierra McCormick Nicholas Loggan Michael Abbot Jr Conor Paolo Alex Essoe Sam Hutington 

Dans les années 1970, dans le comté de Yuma en Arizona. En plein milieu du désert se trouve un motel-station-service. Alors que les réserves de carburant sont à sec, les clients attendent le camion-citerne dans le diner voisin. Alors que la chaleur est étouffante, leur journée se complique avec l'arrivée de deux braqueurs. 

« Last Stop Yuma County » de Francis Galluppi. Chaque année, un petit film, budget microscopique, idée géante, vient rappeler que le cinéma n’a pas besoin de milliards pour faire mouche. Ici, 1 million de dollars, c’est-à-dire rien, même pas le craft-service d’un blockbuster Marvel, et pourtant Galluppi vous colle à votre fauteuil comme une tache de soda séchée. Le film a ce parfum des bonnes surprises sorties de nulle part, celles qui transforment une station-service paumée en plein désert en bombe à retardement. 

L’histoire, c’est un vendeur de couteaux, poli comme un scout, qui tombe sur un diner perdu au milieu de nulle part. Il attend que la station d’essence refasse le plein de ses cuves. Jusque-là, routine. Sauf qu’un duo de braqueurs débarque, puis d’autres personnages aussi atypiques que suspects, et là, Galluppi allume la mèche. Une longue mèche. Très longue. Et pendant qu’elle se consume, le réalisateur joue avec nos nerfs, notre humour noir et notre patience délicieuse. Chaque minute est un clou enfoncé dans le cercueil de la tranquillité. On sent que ça va péter, mais on ne sait ni quand ni comment, et c’est exactement ce plaisir malsain que le film travaille. 

Galluppi revendique à demi-mot son héritage tarantinesque — dialogues qui sifflotent, tension qui grimpe, Amérique profonde en décor naturel, galerie de paumés et de dingues. L’ombre de « Reservoir Dogs » flotte, reconnue et assumée, mais sans imitation servile. Le huis clos fonctionne parce qu’il sait être simple. Décor unique, chaleur écrasante, personnages à cran, humour sec comme le désert. Rien de révolutionnaire, mais une efficacité de vieux routier. Pour un premier long, ça force le respect. 

Les acteurs entrent dans le jeu avec une aisance désarmante. Jim Cummings, parfait en type trop gentil pour être tranquille. Jocelin Donahue, mélange de douceur et de suspicion. Nicholas Logan, menace permanente sous un calme trompeur. Chaque entrée dans le diner ajoute une couche de tension, un grain de sable dans la machine, jusqu’à ce que tout déraille. On a l’impression d’avoir déjà vu cette mécanique vingt fois, mais c’est le secret : un plat simple mais cuisiné à la perfection peut devenir un festin. 

La mise en scène est précise, presque chirurgicale. Galluppi sait exactement où poser sa caméra pour faire monter la pression. Il utilise la chaleur comme une arme, le décor comme une prison, les silences comme des gifles. Les dialogues virent parfois au théâtre de l’absurde, les confrontations deviennent cérémonielles, et le montage déroule la tension comme un fil tendu prêt à casser. On sent un réalisateur qui ne cherche pas à se la raconter : il veut juste raconter son histoire, et il la raconte bien. 

La dernière partie, quand la mèche enfin atteinte explose, est un régal. Jouissive, excessive, contrôlée mais pas trop, elle récompense l’attente, comme un dessert qu’on ne mérite pas mais qu’on dévore quand même. La violence est sèche, l’humour grinçant, les retournements de situation parfaitement dosés. Rien de gratuit : tout sert le plaisir du spectateur. 

Le Prix du Public à Reims Polar ? Très mérité. On sort du film avec cette sensation rare d’avoir assisté à un petit miracle de série B, un film qui ne prétend pas être plus grand qu’il n’est mais qui réalise parfaitement ce qu’il vise. Un bon petit thriller à l’ancienne, tendu, drôle, sec, modeste et pourtant brillant. 

Galluppi ne manque pas de carburant, lui. Et contrairement aux personnages, il ne risque pas la panne avant longtemps. 

NOTE : 14.80

FICHE TECHNIQUE

  • Réalisation et scénario : Francis Galluppi
  • Musique : Matthew Compton
  • Direction artistique : Adam Gascho
  • Décors : Charlie Textor
  • Costumes : Emma Fleming
  • Photographie : Mac Fisken
  • Montage : Francis Galluppi
  • Production : Matt O'Neill, Atif Malik et Francis Galluppi
  • Sociétés de production : Local Boogeyman, XYZ Films, Carte Blanche et Random Lane
  • Sociétés de distribution : Well Go USA Entertainment (États-Unis), The Jokers Films (France)
  • Budget : 1 million de dollars

DISTRIBUTION

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