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dimanche 16 novembre 2025

12.20 - MON AVIS SUR LE FILM HOTEL INTERNATIONAL DE ANTHONY ASQUITT (1963)


 Avis sur le Film Hôtel International de Anthony Asquitt (1963) avec Richard Burton Elizabeth Taylor Orson Welles Margaret Rutherford Maggie Smith Rod Taylor Louis Jourdan Elsa Martinelli Linda Christian Dennis Price 

A l'aéroport londonien de Croydon, les départs sont retardés à cause d'un épais brouillard qui empêche tout décollage. Les voyageurs attendent, massés dans le hall. Parmi eux se trouve Florence, qui s'apprête à quitter son mari, l'émouvant Paul Andros, pour se jeter dans les bras de l'insignifiant Marc Champselle. Max Buda, un producteur de cinéma, tente, lui, d'échapper au fisc britannique. Les Mangrum, industriel au bord de la faillite, doit rejoindre au plus vite les États-Unis. 

Hôtel International (ou The V.I.P.s pour faire plus chic que le hall d’un aéroport), c’est un peu comme se retrouver coincé à Roissy un jour de brouillard : on a du beau monde, du passage, des valises de luxe… mais au fond, pas grand-chose à faire à part regarder les gens vivre leurs petites tragédies. Anthony Asquitt, pourtant maître d’un certain classicisme britannique, orchestre une sorte de chorale d’âmes perdues dans un aéroport qui n’a rien d’un aérodrome de banlieue, mais plutôt d’un salon mondain à ciel fermé. Le décor devient une antichambre où chaque personnage attend son vol comme on attend sa vie, ou son divorce, ou son coup de théâtre. Et Dieu sait qu’il y en a, des coups de théâtre. 

L’histoire repose sur ce qui aurait dû être un tourbillon d’intrigues entremêlées : un magnat au bord de la ruine qui tente de sauver son empire, une femme décidée à quitter son mari pour un amant, un acteur alcoolisé qui oscille entre caprice de star et vraie détresse, une duchesse fauchée mais pleine de panache, une secrétaire en crise sentimentale… Le film veut brasser large, très large, trop large peut-être. Et c’est là le premier symptôme : ce brouillard qui cloue les avions au sol semble aussi figer la narration. Ça piétine, ça se bouscule mal, ça s’effleure sans vraiment se rencontrer. On rêverait que les destins s’entrecroisent davantage, que les personnages se percutent comme dans un bon drame choral. Mais non : les trajectoires restent parallèles, et quand Asquitt tente enfin de les faire se rejoindre, c’est un peu en mode “vite fait avant la dernière porte d’embarquement”. 

Et pourtant, quel casting ! Le couple mythique Richard Burton / Elizabeth Taylor, dont la simple présence pourrait réchauffer n’importe quel tarmac verglacé. Burton, massif, blessé, orgueilleux, est magnifique quand il laisse filtrer la fêlure derrière le costume. Taylor, en femme en pleine évasion conjugale, brille de ce mélange unique de glamour et de fragilité. Mais même eux, face à un scénario qui les traite presque comme des VIP en transit, ont du mal à trouver la profondeur que leur couple dramatique mériterait. On aurait aimé un peu plus de souffle, plus de passion, plus de ce parfum de scandale qu’ils savaient si bien incarner à deux. 

Autour d’eux, c’est la parade des talents : 
– Maggie Smith, impeccable, vraiment la plus vivante et la plus vibrante du lot. Elle donne à son personnage une vérité immédiate et souvent plus touchante que les “stars” du haut de l'affiche. 
– Orson Welles, formidable en illusionniste fatigué de lui-même, mais sous-exploité, comme gardé sous cloche. 
– Rod Taylor, solide, carré, un peu sacrifié par le script. 
– Elsa Martinelli, décorative mais pas seulement, même si on la laisse en orbite sans jamais lui donner une vraie trajectoire. 
– Et bien sûr Margaret Rutherford, irrésistible en duchesse fantasque, qui repartira avec un Oscar : la seule qui semble vraiment comprendre le film, s’en amuser et le transcender à elle seule. 

Le problème, c’est que tout cela ressemble parfois à un soap opéra de luxe, version cinéma : intrigues multiples mais inégales, personnages qui auraient pu être passionnants si on leur avait donné plus de place, et cette touche un peu “toc”, comme vous le dites si bien, qui surgit dès que la mise en scène peine à creuser ce qu’elle préfère ornementer. Asquitt filme proprement, avec élégance, mais reste à la surface : ça glisse au lieu de s’enfoncer, ça expose au lieu d’explorer. 

Le film n’est pas mauvais, loin de là : il est bien interprété, impeccablement tenu, parfois émouvant, parfois drôle, jamais ennuyeux. Mais il reste prisonnier de son décor, comme ses personnages sont prisonniers du brouillard. On voudrait un peu plus de profondeur, un peu plus d’audace, un peu moins de dispersion. On voudrait que tout ce beau monde se rencontre vraiment, au lieu de patienter dans leurs lounges respectifs. 

Un film prestigieux, élégant, brillant par instants, mais qui donne le sentiment d’un immense casting au service d’un scénario trop sage et trop dispersé. Un film qui a du style, oui, mais qui manque ce supplément d’âme qui l’aurait fait décoller au-delà du brouillard. 

Mitigé, donc — mais avec un certain charme, commµe un vol retardé où l’on regarde passer les célébrités en espérant que quelque chose de grand arrive enfin. 


Oscar de la meilleure actrice dans un second rôle : Margaret Rutherford

NOTE  : 12.20

FICHE TECHNIQUE


DISTRIBUTION

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