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mercredi 26 novembre 2025

11.80 - MON AVIS SUR LE FILM DEUS SOUS DE VIOLETTES DE JEAN ANOUILH (1951)


 Vu le Film Deux Sous de Violettes de Jean Anouilh (1951) avec Dany Robin Michel Bouquet Henri Crémieux Yves Robert Yvette Etiévant Héléna Manson Jane Marken Georges Chamarat Léonce Corne Max Dalban 


La vie est dure pour la petite Thérèse, 17 ans, vendeuse de fleurs. Chez elle aucune intimité possible entre sa mère malade, Maurice son frère paresseux, et sa sœur Lucienne. Aucune évasion possible vers l'extérieur. Il lui faut même repousser les avances du patron fleuriste et de Charlot, un jeune voyou. Envoyée chez des parents de province, égoïstes et bourgeois, elle s'éprend d'André qui lui conte fleurette, mais qui s'éclipsera dès qu'elle sera enceinte. Revenue dans son taudis parisien, peut-être qu'Yvon, son ancien camarade parviendra à la sortir de sa grisaille quotidienne. 


Jean Anouilh, immense dramaturge, passe derrière la caméra et c’est déjà en soi un pari étrange : transposer son univers acide en un film qui, aujourd’hui, aurait du mal à passer la censure tant la jeune Thérèse, mineure, se prend une collection de harceleurs comme d'autres collectionnent les timbres. Tout y passe : le patron fleuriste qui veut la violer, le petit voyou Charlot (Yves Robert, étonnamment sinistre) qui profite d’elle comme on siphonne une tirelire, puis l’exfiltration en province où l’air est plus pur mais les intentions masculines pas vraiment meilleures. 


Thérèse n’a même pas le soutien de son frère — Michel Bouquet à 25 ans, déjà l'air de juger tout le monde sans lever le petit doigt — oisif, coureur, pas regardant, bref absent moralement comme physiquement. Autour d’elle, c’est un défilé d’hommes concupiscents et lâches, et de femmes pingres, méchantes ou franchement indifférentes. Anouilh dresse un monde où la médiocrité semble le seul langage commun, mais sans réussir à en faire une fable ou une satire suffisamment acérée. 


Parce que Thérèse est écrite comme une héroïne sacrificielle, une petite sainte expiatoire sur laquelle tous se défoulent, mais sans style visuel pour lui donner l’aura tragique qu’elle mériterait. La comédie affleure parfois, mais c’est une comédie amère, un peu polie, trop sage, qui n’ose jamais aller au bout du massacre que promettait pourtant le sujet. Tout est adouci, arrondi, mis sous cloche, comme si Anouilh n’osait pas vraiment être Anouilh. 


Sur le plan de la mise en scène, on sent un dramaturge qui cadre comme il écrit : en observateur, mais pas forcément en cinéaste. C’est propre, trop propre peut-être, sans invention, sans audace, sans ce grain qu’un tel matériau demandait. Le scénario déroule les malheurs de Thérèse de façon presque mécanique, sans respiration ni crescendo émotionnel, rendant l’ensemble assez anecdotique là où cela aurait pu être violent, cruel, mémorable. 


Quant aux acteurs, même eux peinent à sauver les meubles : Dany Robin, pourtant lumineuse, ne trouve pas de vraie matière dramatique à habiter ; Yves Robert cabotine en petit voyou falot ; Bouquet flotte dans un rôle sans enjeu ; et le reste du casting peuple le décor comme des silhouettes de médiocrité incarnée. On aurait pu rêver d’une comédie satirique, d’un jeu de massacre jubilatoire ; on se retrouve avec un film gentiment amer, mais surtout timide. 


Au final, pas grand-chose à sauver, même pas la jeune Dany Robin, et c’est peut-être ça le plus triste : un film qui aurait pu déranger, grincer, choquer, et qui, en fin de compte, se contente de frôler le sujet sans jamais le mordre. Une œuvre trop sage pour être mordante, trop polie pour être méchante, trop correcte pour être mémorable. 

NOTE ; 11.80

FICHE TECHNIQUE


DISTRIBUTION

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