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vendredi 28 novembre 2025

12.80 - MION AVIS SUR LE FILM ANIMALE DE EMMA BERNESTON (2O24)


 Vu le Film Animale de Emma Bernestan (2024) avec Oulaya Amamra Damien Rebattel Vivien Rodriguez Claude Chaballier Elies Morgan Admi Bensellam Pierre Roux Marinette Rafai Renaujd Vinuesa 

En CamargueNejma s'entraîne dur pour réaliser son rêve : fouler le sable de l'arène afin de défier les taureaux et devenir la première femme à remporter une course camarguaise. Ses amis gardians la soutiennent, mais sa mère désapprouve. Après une soirée bien arrosée où Nejma et ses amis partent voir les taureaux, Nejma, très alcoolisée part seule dans l'enclos des taureaux et perd connaissance. On la retrouvera avec quelques blessures bénignes et elle ne se souvient de rien. Tandis que la saison bat son plein, des morts suspectes de gardians sont imputées aux taureaux, alors que ceux-ci n'attaquent pas sans raison et que les gardians savent très bien se comporter avec eux. Pendant ce temps Nejma ressent de plus en plus de choses bizarres dans son corps et son esprit, sans comprendre ce qu'il lui arrive. 

Animale d’Emma Benestan est de ces films qui surprennent par leur simplicité apparente et leur force souterraine. Une belle surprise, oui, car dès les premières images on sent les odeurs de ce beau pays qu’est la Camargue : les essences de fleurs brûlées par le soleil, la rudité des taureaux, la sueur des hommes, les victuailles qui débordent, les alcools généreux qui coulent comme une tradition immuable. Le film aurait pu facilement basculer dans la satire ou le pamphlet sur le sort réservé aux taureaux, et à juste titre ; mais Benestan ne joue jamais cette carte. Elle ne fait pas la morale, elle ne pointe pas du doigt : elle montre. Elle filme la réalité d’une tradition ancienne, brutale parfois, mais sincère et enracinée dans une culture bien vivante. 

Au centre, il y a Nejma, formidablement incarnée par Oulaya Amamra, explosive, intense, d’une présence rare. Nejma veut dompter ses taureaux camarguais, comme un défi jeté à la figure d’un monde d’hommes. Une femme rare à cette place, une femme qui se bat pour apprivoiser ce qui semble impossible à maîtriser. Et c’est toute la beauté du film : cette quête de l’impossible, menée avec une détermination féroce et une fêlure secrète qui affleure dans chaque regard. 

Le casting, composé en grande partie d’acteurs non professionnels « pur jus », apporte cette vérité brute qui donne au film son grain unique. Les accents chantent, les visages racontent des vies plus longues que les dialogues, et on croit immédiatement à cette communauté où les traditions ne sont pas décoratives : elles sont la vie elle-même. 

Benestan mélange un naturalisme assumé avec des codes empruntés au cinéma de genre. Ce léger glissement, cette présence « de la bête » — celle qui rôde, fantastique, sauvage, réelle ou fantasmée — donne au film une tension presque mythologique. On passe de la chronique du quotidien à l’épopée intime, de la poussière des arènes aux pulsations de la peur, du désir, du courage. Les courses camarguaises — sans mise à mort, rappelons-le — deviennent un théâtre où la violence n’est jamais là où on l’attend. 

La mise en scène est esthétique sans être décorative : Benestan ne trahit jamais son sujet. Elle cadre la Camargue comme un territoire de lutte, de beauté, d’inquiétude. La progression du film est radicale, tendue, presque électrique. Chaque scène resserre l’étau, chaque plan renforce ce mélange d’épique et de contemporain. Le tout baigne dans une émotion brute, un féminisme porté sans slogans mais avec les gestes. 

Animale est un choc visuel et émotionnel, un film tendu, fort, qui laisse une trace. On en ressort différent, un peu remué, comme si la poussière des arènes nous était restée collée à la peau. Et au milieu de tout cela, Nejma — femme, dresseuse, guerrière moderne — avance tête haute, comme une héroïne qui ne demande l’autorisation à personne. 

 NOTE ; 12.80

FICHE TECHNIQUE


DISTRIBUTION

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