Vu le Film Les Arênes de Camille Perton (2024) avec Ilies Kadri Edgar Ramirez Sofian Khammes Lorenzo Surzulo Grégoire Colin Côme Levin Karimouche Miglen Mirtchev Gilles Gaston Deryfus et Polska
À tout juste 18 ans, Brahim, jeune footballeur prometteur, est représenté par son agent et cousin Mehdi. Il s'apprête à réaliser son rêve : signer son premier contrat professionnel à Lyon. Mais l'arrivée d'un puissant agent étranger rebat les cartes. Dans cet univers où tous les coups sont permis, même la loyauté a un prix.
Les Arènes, premier long-métrage de Camille Perton, a tout d’une métaphore appuyée : on ne tue pas des taureaux dans une corrida espagnole, mais on envoie bel et bien des jeunes footballeurs de banlieue au casse-pipe dans les coulisses du football moderne. Le terrain n’est pas vert, il est jonché de contrats, de magouilles et d’agents aux dents longues.
L’histoire suit Brahim (Iliès Khadri), 18 ans, qui rêve de percer dans le foot. Pas question de marquer des buts sous nos yeux : Perton choisit au contraire de montrer les coulisses, là où les matchs se jouent à coup de signatures, de pots-de-vin et de promesses intenables. Autour de lui, son cousin Mehdi (Sofian Khammes), agent bienveillant mais dépassé, essaie de le protéger dans ce monde de requins. Et face à eux, Francis (Édgar Ramírez), agent étranger brillant et cynique, qui incarne à lui seul le grand cirque du business : sourire charmeur, méthodes troubles, argent roi.
On découvre ainsi les « arènes » du film : pas un stade, mais des bureaux aseptisés, des salons privés, des restaurants où la destinée d’un joueur se décide entre deux verres de vin. Les jeunes talents ne sont plus des footballeurs, mais des produits financiers, des biens échangeables, négociés au seul profit d’agents et de clubs. Camille Perton décrit avec un œil précis ce mécanisme, sans chercher l’esbroufe : on sent qu’elle a voulu montrer le système dans sa banalité la plus glaçante.
Pour un premier film, la démarche est courageuse. La réalisation est sobre, presque clinique. Les personnages existent à travers leurs dialogues secs et leurs silences pesants. L’idée est bonne : plonger dans l’arrière-cour d’un univers qu’on préfère souvent idéaliser. Mais… cela manque d’âme. Le rythme est plat, les situations s’étirent, et parfois, on a l’impression d’assister à une démonstration plus qu’à une véritable tragédie.
Côté interprétation, c’est un peu inégal. Iliès Khadri a quelque chose : il n’est pas encore totalement armé, mais sa présence calme attire. On croit à son personnage, jeune, fragile, pris dans une machine qui le dépasse. Sofian Khammes, lui, confirme une fois de plus qu’il est l’un des comédiens français les plus solides de sa génération. Chaque fois qu’il est à l’écran, on s’accroche. Il a ce mélange de douceur et de fermeté qui donne vie à son Mehdi, cousin-agent qui veut bien faire mais se heurte aux murs de l’argent. Edgar Ramírez, en revanche, cabotine un peu dans son rôle de super-agent. Il dégage du charisme, certes, mais on sent parfois le cliché du « requin latino » téléphoné.
Le problème majeur reste l’engagement émotionnel. Oui, c’est sans doute réaliste, mais le spectateur n’apprend rien qu’il n’imaginait déjà : que les agents sont souvent plus préoccupés par leur commission que par le destin du joueur, que les clubs traitent les jeunes comme de la marchandise. Pour les initiés, rien de neuf ; pour les novices, un constat assez répétitif.
Résultat : Les Arènes fonctionne comme une chronique austère, bien tenue, mais qui peine à captiver. Il manque des scènes qui prennent aux tripes, qui marquent durablement, un souffle dramatique capable de nous embarquer au-delà de l’exercice de style. On aimerait sentir la sueur, la peur, l’excitation ; on a surtout des conversations de contrats.
Cela dit, pour un premier film, c’est une base solide. Camille Perton pose un regard qui ne cherche pas à enjoliver ni à diaboliser. Et avec un casting un peu plus homogène, une narration plus nerveuse, elle pourrait aller loin.
Pas d’arènes sanglantes, mais une corrida silencieuse du football-business. On assiste à une mise à mort feutrée, qui manque parfois de nerf, mais qui a le mérite d’exister. On ressort frustré, mais intrigué par ce que Perton pourra faire à l’avenir. Et puis, entre nous, voir Sofian Khammes donner de la chair à un rôle d’agent, ça vaut toujours le détour.
NOTE : 8.70
FICHE TECHNIQUE
- Réalisation : Camille Perton
- Scénario : Camille Perton
- Musique :
- Décors : Laurent Baude
- Costumes : Léa Forest
- Photographie : Martin Roux
- Son : Margaux Peyre
- Montage : Cyrielle Thélot
- Production : Judith Lou Lévy et Eve Robin
- Société de production : Les Films du Bal et Auvergne-Rhône-Alpes
- Société de distribution : The Jokers Films
- Sofian Khammes : Mehdi
- Iliès Kadri : Brahim Chekir
- Édgar Ramírez : Francis
- Lorenzo Zurzolo : Carmine
- Fehdi Bendjima : Paul
- Côme Levin : Ariel Anski
- Grégoire Colin : Philippe Mattei
- Karimouche : Yasmine
- Miglen Mirtchev : Vadim Berezovsky
- Gilles Gaston-Dreyfus : le maire
- François Chattot : Lionel Simonian
- Eric Stéphane Mabiala : Ismaïla
- Polska : Irina

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