Vu le Film Aimons-nous Vivants de Jean Pierre Ameris (2025) avec Gérard Darmon Valérie Lemercier Patrick Timsit Alice de Lencquesaing Antoine Mathieu Jean Pierre Gos Nicole Dubois Sophie Mounicot François Berléand
À 70 ans, Antoine Toussaint, célèbre chanteur français, sait qu’il ne sera plus capable de remonter sur scène et décide d’avoir recours au suicide assisté en Suisse. Dans le TGV qui l’emmène à Genève, il rencontre Victoire, une quinquagénaire délurée, sortie de prison pour un week-end, le temps de marier sa fille.
Il y a des films qui, dès leur titre, trahissent une forme de naïveté. Aimons-nous vivants, en reprenant l’intitulé de la chanson de François Valéry, avait déjà de quoi inquiéter. Le résultat, hélas, ne dément pas cette crainte : on se retrouve devant une comédie française qui cumule clichés, paresse d’écriture et absence d’âme. Tout est plat, attendu, convenu. On devine la fin dès les premières minutes, en s’asseyant dans son fauteuil.
L’histoire, en apparence, pourrait toucher. Antoine (Gérard Darmon), chanteur de variétés usé par les années et brisé par un AVC, ne croit plus en rien. Il s’est fixé une issue claire : partir en Suisse pour mettre un terme à son existence. Sur son chemin, dans le TGV, débarque Victoire (Valérie Lemercier), une tornade un peu folle, libérée de prison le temps d’un week-end pour assister au mariage de sa fille. L’un est un homme fatigué qui n’attend plus que la mort, l’autre une femme éclatante de vie malgré son passé cabossé. Tout les oppose, tout est écrit pour que leur rencontre bouleverse leurs trajectoires.
Sur le papier, cela pouvait donner une comédie dramatique tendre, décalée, capable d’émouvoir. Mais Jean-Pierre Améris ne fait rien de ce matériau. Sa mise en scène se contente d’illustrer, sans jamais insuffler de souffle ou d’invention. Les dialogues alignent des répliques attendues, sans mordant ni profondeur. Les situations sont téléphonées : le choc des caractères, le moment où la fantaisie dérange l’homme désabusé, la scène d’émotion au détour d’une confession, puis l’inévitable rapprochement. Le spectateur coche mentalement les étapes d’un scénario sans surprise.
Ce qui frappe, c’est l’absence de direction d’acteurs. Gérard Darmon joue encore et toujours son registre d’ours bourru, ici déprimé, grognon, fatigué, mais sans nuances. Sa lassitude à l’écran finit par contaminer le spectateur. Quant à Valérie Lemercier, elle reprend son éternel personnage de fofolle attachante, gentiment excentrique, pleine de mimiques et de fantaisie. Elle sait faire, certes, mais on a l’impression d’avoir déjà vu ce numéro dix fois. Leurs personnages n’évoluent pas vraiment : ils sont définis dès le départ et ne font que rejouer des postures attendues.
Là où un vrai film aurait pu explorer les zones d’ombre — la solitude, la peur de mourir, la difficulté à reconstruire des liens après l’échec —, Aimons-nous vivants se contente de rester en surface. Tout est édulcoré, aseptisé, comme pour éviter de heurter. On ne rit pas vraiment, on n’est pas bouleversé non plus. On reste au milieu, dans une fadeur confortable mais désespérante.
En vérité, on dirait un de ces produits formatés à l’américaine, fabriqués par dizaines pour recycler les comiques ou les vieilles gloires et leur offrir un chèque. Sauf qu’ici, au lieu d’un rythme et d’un vernis efficace, on a un tempo poussif, une mise en scène sans personnalité et une écriture qui ne raconte rien. La comédie française, à force de livrer ce genre de films sans âme, finit par désespérer ses spectateurs les plus fidèles.
Ce qu’il reste ? Une Lemercier qui cabotine gentiment, un Darmon qui grogne avec gravité, et un récit cousu de fil blanc. Pas de vraie émotion, pas de vraie drôlerie, pas de cinéma. Simplement une suite de clichés emballés sous un titre faussement fédérateur. On sort de là en se disant que oui, décidément, aimons-nous vivants… mais surtout aimons le cinéma quand il ose encore être vivant, pas quand il se contente de tourner à vide.
NOTE : 5.30
FICHE TECHNIQUE
- Réalisation : Jean-Pierre Améris
- Scénario : Jean-Pierre Améris et Marion Michau
- Musique : Stéphane Moucha
- Décors : Audric Kaloustian
- Costumes : Judith de Luze
- Photographie : Pierre Milon
- Son : Laurent Lafran, Lucile Demarquet, Sébastien Noiré et Matthieu Tertois
- Montage : Christine Lucas Navarro
- Production : Sophie Révil et Denis Carot
- Société de production : Escazal Films et Auvergne-Rhône-Alpes Cinéma
- Société de distribution : ARP Sélection
- Budget : 6,1 millions d'euros
- Gérard Darmon : Antoine Toussaint
- Valérie Lemercier : Victoire
- Patrick Timsit : Claude, le manager d'Antoine
- Alice de Lencquesaing : Constance, la fille de Victoire
- Éric Viellard : l'ex-mari de Victoire
- Antoine Mathieu : Yves-Marie, de l'association pour l'aide à mourir
- Jean-Pierre Gos : le barman du Grand Hôtel, à Genève
- Nicole Dubois : Mariette, la secrétaire de Claude
- Sophie Mounicot : Catherine, la belle-mère de Constance
- François Berland : Laurent, le beau-père de Constance
- Tobias Nuytten : un serveur du Grand Hôtel
- Isabelle Menke : la réceptionniste du Motel Azur
- Aurélien Cavagna : Baptiste, le mari de Constance

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