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lundi 4 août 2025

5.20 - MON AVIS SUR LE FILM 100 MILLIONS DE NATH DUMONT (2025)

 


Vu le film 100 Millions de Nath Dumont (2025) avec Kad Merad Michèla Laroque Soren Prevost Augustin Galiana Guy Lecluyse Martin Karmann Jade Rose Parker Fatsah Bouyahmed Lionel Abelanski Didier Flamand


Patrick et Suzanne peinent à honorer les échéances de leur crédit immobilier, d'autant plus que le salaire de Patrick est amputé des heures de la grève partielle dont il est le leader. Lorsqu’un notaire leur apprend qu'une lointaine cousine de Patrick leur a laissé un héritage de cent millions, leur vie change.

100 Millions, réalisé par Nath Dumont, est une comédie sociale qui avait tout, sur le papier, pour interroger avec malice notre rapport à l’argent, aux principes et à la loyauté de classe. Le pitch est simple et prometteur : Patrick, un syndicaliste chevronné, grande gueule intègre et fidèle à son usine, se retrouve du jour au lendemain à la tête d’un héritage colossal — cent millions d’euros, tombés du ciel par un oncle qu’il n’avait jamais rencontré (peut-être les 100 Patates des 3 Frères)  Là où la plupart se précipiteraient pour changer de vie, lui campe sur ses positions : pas question de bouger d’un centimètre, ni de vendre son pavillon, ni de quitter son syndicat. Et c’est là que les ennuis commencent.

Le film tente alors de construire un récit burlesque autour de ce paradoxe : comment rester fidèle à ses convictions quand l’argent menace de tout corrompre ? Patrick (incarné par un acteur pourtant solide, Kad Merad  devient malgré lui l’objet de toutes les convoitises. Sa femme voit en cette manne inespérée l’occasion de refaire sa vie , ses enfants rêvent de lofts, d'écoles privées et de SUV électriques, ses collègues se mettent soudain à l’écouter comme un oracle, tandis que le patron de l’usine commence à le courtiser.

Mais très vite, cette comédie de principe tourne à vide. L’écriture se repose sur des clichés éculés : la femme vénale qui découvre l’attrait des sacs Hermès, les enfants devenus tout à coup aussi faux que des influenceurs de télé-réalité, les camarades de lutte qui renient leurs convictions à la première occasion. La satire sur les dérives du capitalisme et les trahisons idéologiques aurait pu être mordante, drôle, vacharde même — elle reste ici paresseuse, prévisible, cousue de fil blanc. On comprend dès le premier quart d’heure où le film veut aller… et il n’ira jamais plus loin.

Les dialogues, censés incarner une gouaille populaire pleine de bon sens, tombent à plat. On enchaîne les vannes sans rythme, les confrontations sans tension, les séquences sans invention. L’argent, sujet passionnant s’il en est, devient ici un prétexte lourdement exploité, sans finesse ni regard. Tout est grossi, et rien n’est travaillé : les costumes sont caricaturaux, les décors franchouillards dignes d’un téléfilm de TF1, et la mise en scène… inexistante. Aucun plan ne respire, aucun silence n’est utilisé, tout est filmé au premier degré avec une platitude consternante.

Le plus décevant reste cette absence totale de point de vue. Le film semble vouloir faire rire des paradoxes humains — ce serait noble — mais ne fait que dérouler un chapelet de poncifs : les riches sont méprisables, les pauvres sont candides, et les classes moyennes sont manipulables. Pas un seul personnage ne sort de sa fonction narrative. Personne n’échappe à la caricature : l’avocat fourbe, la banquière carnassière, le voisin jaloux, le maire démagogue…

Seul moment vaguement amusant : une réunion syndicale où Francis, désormais millionnaire, tente de convaincre ses camarades qu’il ne changera pas. Mais même cette scène tourne court, étouffée par une mise en scène molle et des répliques rabâchées.

100 Millions, ce n’est pas une comédie sociale piquante à la manière d’un Pierre Jolivet ou d’un Robert Guédiguian, ni même une farce bienveillante comme La Très Très Grande Entreprise. C’est une sorte de Bienvenue chez les Marxistes sans flamme, une fable sur la tentation qui n’ose jamais aller au bout de son cynisme, ni de son humanisme. On espérait un film qui nous secoue ou au moins qui nous fasse rire — on se retrouve avec une soupe tiède, sans sel, sans poivre, servie avec la politesse d’un serveur fatigué.

Un film qui veut parler de millions, mais qui ne vaut même pas un kopeck.

NOTE : 5.20
FICHE TECHNIQUE

  • Réalisation : Nath Dumont
  • Scénario : Thibault Castan, Vivien Loiseau, Didier Messalati, Nicola Cuvelier
  • Musique : Adrien Bekerman
  • Décors : Sébastien Danos
  • Costumes : Julie Guehria
  • Photographie : Vincent Richard Marquis
  • Son : François de Morant
  • Montage : Quentin Boulay
  • Sociétés de production : Les Films Manuel Munz ; Coup de Foudre Production, TF1 Films Production (coproduction) ; Oriane (production associée)
  • Société de distribution : Paradis Films
  • Budget : 5 millions d'euros[

DISTRIBUTION



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