Vu le film La Guerre des Boutons de Yves Robert (1962) avec Jean Richard Petit Gibus (Martin Lartigue) André Treton Michel Isella Michel Galabru Pierre Tchernia Pierre Trabaud Michele Meritz François Lartigue
Comme tous les ans, à chaque rentrée des classes, les
enfants de Longeverne se querellent avec ceux de Velrans. Cette année sera
différente puisque Lebrac (André
Treton) et ses camarades envisagent d'arracher les boutons et les
bretelles de leurs ennemis afin de les faire rosser par leurs parents.
Eux-mêmes vont combattre entièrement nus et garder les boutons arrachés à leurs
ennemis comme trésor de guerre, dans une cabane.
À la fin du film, le père de l'Aztec
des Gués (Jacques
Dufilho) retrouve son tracteur démoli après qu’il a servi à détruire
la cabane. Il envoie son fils en pensionnat. Le père de Lebrac (Jean Richard) prend lui aussi une
décision similaire à la suite de la fugue de son fils : les deux meneurs
sont envoyés dans la même pension.
Film-souvenir par excellence, La Guerre des Boutons
(1962) d’Yves Robert incarne une époque, un style et une simplicité qui
résonnent encore dans le cœur des spectateurs. Adapté du roman éponyme de Louis
Pergaud, ce chef-d’œuvre de la comédie française nous transporte dans une
ruralité intemporelle, où les odeurs de l’herbe fraîchement coupée et les rires
des enfants semblent palpables.
La caméra d’Yves Robert, agile et curieuse, se glisse
dans les chemins boueux et les sous-bois, capturant avec poésie les
espiègleries de deux bandes de gamins qui se disputent un bout de territoire
imaginaire. Tout respire ici la vérité de l’enfance : les défis absurdes, les
rivalités aussi féroces qu’éphémères, et ces moments où l’innocence se mêle à
une gravité quasi héroïque. Le réalisateur excelle dans l’art de magnifier les
choses simples, insufflant une vitalité quasi lyrique à des situations banales
: un champs devient un champ de bataille, un bouton perdu équivaut à une
défaite cuisante.
L’un des personnages emblématiques, Petit Gibus,
joue un rôle pivot dans cette galerie de portraits attachants. Avec son
inoubliable « Si j’avais su, j’aurais pas venu ! », il représente à lui
seul l’ingénuité et la fatalité enfantine. Derrière cette phrase drôle et
désabusée se cache une vérité universelle : les jeux de l’enfance, aussi
ludiques soient-ils, ont leurs douleurs et leurs désillusions. Le jeune acteur
Michel Isella campe un Gibus si authentique qu’il semble avoir été saisi sur le
vif, sans artifice.
Mais La Guerre des Boutons, c’est aussi une lettre
d’amour à une France rurale en pleine mutation. Le film capture une époque où
la campagne était un terrain de jeu, loin des écrans et des consoles, où l’on
bâtissait des cabanes, où les colonies de vacances et les sorties chez les
scouts structuraient un imaginaire collectif. Yves Robert filme ces paysages
avec tendresse, leur conférant une dimension presque mythologique.
Et pourtant, sous ses airs de comédie légère, le film
distille quelques réflexions profondes. Derrière les querelles puériles se
dessinent les prémices des conflits d’adultes : l’instinct de territorialité,
la solidarité de groupe et parfois même une violence sourde qui rappelle que
l’enfance n’est jamais exempte de cruauté. Yves Robert, avec son sens aigu du
détail, n’édulcore rien tout en conservant une bienveillance constante.
La bande originale de José Berghmans vient parachever
cette ode à l’enfance. Elle épouse les mouvements des enfants et les
fluctuations de leurs émotions, oscillant entre une insouciance pétillante et
des moments de mélancolie.
En définitive, La Guerre des Boutons n’est pas
qu’une comédie douce-amère : c’est un instantané d’un temps révolu, une fresque
à la fois universelle et profondément ancrée dans la France rurale. C’est un
film qui fait rire, qui émeut et qui rappelle à chaque génération que, malgré
les évolutions du monde, les chamailleries de l’enfance resteront toujours une
quête initiatique intemporelle. Nostalgique sans être passéiste, ce classique
continue de réchauffer le cœur comme une madeleine de Proust cinématographique.
NOTE : 13.80
FICHE TECHNIQUE
- Réalisation : Yves Robert
- Scénario : Yves Robert et François Boyer, d'après le roman éponyme de Louis Pergaud publié en 1912
- Musique : José Berghmans
- Décors : Pierre-Louis Thévenet
- Photographie : André Bac
- Son : Pierre-Louis Calvet
- Montage : Marie-Josèphe Yoyotte
- Production : Danièle Delorme, Yves Robert et Léon Carré
- Société de production : Les Productions de la Guéville
- Société de distribution : Warner Bros (distributeur d'origine, 1962), Gaumont (distributeur, 2011), Malavida (distributeur, 2021)
- André Treton : Lebrac, le chef des « Longevernes »
- Michel Isella : l’Aztec des Gués, le chef des « Velrans »
- Martin Lartigue : Petit Gibus, un gamin de Longeverne
- François Lartigue : Grand Gibus, un gamin de Longeverne et grand frère de Petit Gibus
- Marie-Catherine Michonska-Faburel : Marie Tintin, la protégée de Lebrac
- Jean-Paul Maîtrot (alias Jean-Paul Queret) : Bacaillé, le traître de la bande à Lebrac
- Daniel Janneau : la Crique, l'intellectuel de la bande à Lebrac
- Patrick Loiselet : le gamin de Longeverne qui prononce la réplique culte : « Tu fais honte aux pauvres, Lebrac. C'est pas républicain, ça. »
- Daniel Tuffier : le gamin de Longeverne qui cherche ses lunettes lors de la première bagarre avec les « Velrans »
- Christophe Bourseiller : Gaston, l'enfant qui reste l'insulte « Couilles molles » sur son père
- Jean-Denis Robert : le gamin de Longeverne qui transporte La Crique en vélo
- François Bazinsky : un gamin de Longeverne
- Gérard Aubry : un gamin de Longeverne
- Claude Bourseiller
- Jacky Delory
- Les adultes
- Jacques Dufilho : le père de l’Aztec des Gués
- Yvette Étiévant : la mère de Lebrac
- Michel Galabru : le père de Bacaillé
- Michèle Méritz : la mère de l'Aztec des Gués
- Jean Richard : le père de Lebrac
- Pierre Tchernia : Bédouin, le garde-champêtre
- Pierre Trabaud : l’instituteur de Longeverne
- Claude Confortès : Nestor, le facteur
- Paul Crauchet : le père Touegueule
- Henri Labussière : le paysan sur son tracteur
- Yves Peneau : le surveillant général
- Robert Rollis : le père de « Migue la Lune »
- Louisette Rousseau : la mère de Bacaillé
- François Boyer : le curé à vélo
- Bernard Lambert : le bûcheron
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