Vu le film Jouer avec le Feu de Muriel et Delphine Coulin (2025) avec Vincent Lindon Benjamin Voisin Stefan Crepon Maelle Poesy Sophie Guillemin Edouard Sulpice Arnaud Rebotini
Pierre élève
seul ses deux fils. Louis, le cadet, réussit ses études et avance facilement
dans la vie. Fus, l'aîné, part à la dérive. Fasciné par la violence et les
rapports de force, il se rapproche de groupes d'extrême-droite, à l'opposé des
valeurs de son père. Pierre assiste impuissant à l'emprise de ces
fréquentations sur son fils. Peu à peu, l'amour cède place à l'incompréhension.
Muriel et Delphine Coulin livrent avec Jouer avec
le feu un film brûlant d’actualité, une plongée brutale dans le chaos
familial et idéologique qui gangrène une jeunesse en perte de repères. À
travers le portrait de Fus (Benjamin Voisin), jeune homme s’égarant dans des
milieux extrêmes, et son rapport conflictuel avec son père Pierre (Vincent
Lindon), le film explore avec une intensité rare la difficulté du dialogue
intergénérationnel face à des trajectoires radicalisées.
Pierre, ce père aimant mais impuissant, voit ses deux
fils emprunter des chemins opposés. D’un côté, Louis (Stefan Crepon),
introverti, silencieux, semble être un repère fragile mais rassurant. De
l’autre, Fus, extraverti, sportif et charismatique, se laisse happer par des
idéologies qui embrasent ses frustrations. Ce triangle familial dysfonctionnel
est mis en relief par une mise en scène qui laisse toute la place aux acteurs,
captant les tensions par des silences lourds, des échanges de regards plus puissants
que de longs dialogues.
Le choix des réalisatrices de ne jamais filmer
directement les violences de Fus mais d’en montrer seulement des fragments
subjectifs est d’une justesse glaçante. C’est un cinéma qui refuse le
sensationnalisme pour mieux disséquer l’impact de ces dérapages sur une cellule
familiale au bord de l’implosion. Loin d’un simple récit sur l’endoctrinement
politique, Jouer avec le feu est avant tout un drame humain où l’on
perçoit la dérive d’un jeune homme sans ancrage, trouvant refuge dans des
certitudes destructrices.
Le casting porte le film à son paroxysme émotionnel.
Vincent Lindon, monumental dans son rôle de père dépassé, livre une performance
où chaque souffle trahit une lutte intérieure déchirante. Mais ce sont bien
Benjamin Voisin et Stefan Crepon qui fascinent par leur alchimie contrastée
(les deux garçons sont amis dans la vie), Leur jeu tout en nuances – entre tensions
sous-jacentes et gestes fraternellement ambigus – donne une dimension organique
à cette relation qui oscille entre amour et rivalité. Voisin, en particulier,
est saisissant : dérangeant, magnétique, il insuffle à Fus une intensité qui
glace autant qu’elle hypnotise.
Derrière le portrait d’une famille en crise, les Coulin signent un film sur une jeunesse à la dérive, proie facile de mouvements radicaux, et sur l’incapacité d’un système familial et social à endiguer cette dérive. Un grand film d’acteurs, mais surtout une œuvre coup-de-poing qui invite au débat et laisse une empreinte durable.
NOTE : 16.30
FICHE TECHNIQUE
- Réalisation et scénario : Delphine Coulin et Muriel Coulin d'après le roman Ce qu'il faut de nuit de Laurent Petitmangin
- Musique : Paweł Mykietyn
- Décors : Yves Fournier
- Costumes : Julia Dunoyer
- Photographie : Frédéric Noirhomme
- Son : Emmanuelle Villard, Titouan Dumesnil, Olivier Goinard, Lucien Richardson
- Montage : Béatrice Herminie, Pierre Deschamps
- Production déléguée : Olivier Delbosc, Marie Guillaumond
- Production associée : Émilien Bignon
- Production exécutive : Aude Cathelin
- Société de distribution : Ad Vitam Distribution (France), Pathé Films AG (Suisse), Cinéart (Belgique)
- Vincent Lindon : Pierre Hohenberg
- Benjamin Voisin : Félix dit « Fus » Hohenberg
- Stefan Crepon : Louis Hohenberg
- Maëlle Poésy : l'avocate de Fus
- Arnaud Rebotini : Bernard
- Béatrice Pérez : la doyenne de la Sorbonne
- Édouard Sulpice : Jérémy
- Sophie Guillemin : Cathy
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire