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samedi 8 février 2025

16.90 - MON AVIS SUR LE FILM AVIATIOR DE MARTIN SCORSESE (2004)

 


Vu le film Aviator de Martin Scorsese (2004) avec Léonardo Di Caprio Cate Blanchett Kate Beckinsale Adam Scott Alec Baldwin Kelli Garner Ian Holm Jude Law

Aviator malgré ses 5 Oscars n’a pas eu celui du Meilleur Film comme Di Caprio comme Meilleur Acteur on se demande pourquoi ? C’est Million Dollar Baby de Clint Eastwood qui avait gagné

Howard Hughes est un richissime homme d'affaires, passionné par les avions et le cinéma. À la fin des années 1920, il produit et réalise le film Les Anges de l'enfer, dans lequel il investit des sommes colossales, qui sort en 1930. Il devient rapidement une célébrité et entretient des relations tumultueuses avec les stars de cinéma de l'époque comme Katharine Hepburn et Ava Gardner. Il engage également un bras de fer avec la compagnie aérienne Pan Am, pour permettre à sa compagnie, la TWA, de couvrir les lignes à l'international. Mais dans l'intimité, Howard Hughes souffre de multiples troubles obsessionnels compulsifs qui évoluent rapidement et le rongeront jusqu'à la fin de ses jours.

Aviator est une odyssée aérienne et mentale, le portrait d’un homme qui a voulu conquérir le ciel mais s’est écrasé dans l’enfer de ses propres démons. Scorsese s’empare d’Howard Hughes avec une énergie fiévreuse, traduisant à l’écran le génie démesuré et la folie grandissante de ce pionnier de l’aviation et du cinéma. La mise en scène épouse sa trajectoire : rapide, immersive, parfois hallucinée, à l’image d’un homme qui ne vivait que pour repousser les limites – celles du vol, de la technologie, du spectacle. Loin d’un simple biopic académique, Aviator est un film de sensations, une expérience où l’ambition et la névrose s’entrechoquent dans un crescendo vertigineux.

Hughes, avant d’être cet homme reclus dans l’ombre de sa propre paranoïa, est d’abord un visionnaire, un touche-à-tout qui, dès Les Anges de l’Enfer, impose sa folie des grandeurs. Il veut révolutionner le cinéma comme il révolutionne l’aviation : en refusant les limites. Il tourne avec de vrais avions, attend des mois pour obtenir le ciel parfait et réinvente les techniques de prise de vue aérienne. Cette soif d’innovation ne le quittera jamais : il achète la TWA, conçoit des avions toujours plus audacieux, dont le mythique Spruce Goose, gigantesque hydravion en bois que l’on croyait incapable de voler. Mais derrière ces succès, un gouffre se creuse. L’obsession du contrôle, l’isolement, la peur des microbes, autant de fissures qui le rongent et finissent par l’engloutir.

DiCaprio est magistral. Son incarnation dépasse la simple performance : il habite Hughes, il en épouse chaque nuance, du charme irrésistible du golden boy au regard vide de l’homme terrassé par ses phobies. Une scène, parmi les plus marquantes, cristallise cette descente aux enfers : enfermé dans son bunker doré, nu, barbu, il sombre dans une boucle de paranoïa, entouré de ses bouteilles d’urine, incapable d’affronter le monde extérieur. Il répète mécaniquement des phrases incohérentes, enfermé dans son propre esprit comme dans une prison sans issue. La mise en scène de Scorsese traduit ce délire avec une précision terrifiante : lumière blafarde, montage syncopé, une tension suffocante qui nous plonge dans la psyché fracturée du personnage.

Autour de lui, une galerie de seconds rôles brillamment incarnés donne de l’épaisseur à cette fresque. Cate Blanchett ressuscite Katharine Hepburn avec une énergie flamboyante, entre éclats de rire et indépendance farouche. Sa relation avec Hughes, d’abord fusionnelle, se heurte à ses névroses grandissantes, jusqu’à un adieu empreint de tristesse. Kate Beckinsale en Ava Gardner, plus distante mais non moins marquante, est la seule à voir clair dans le jeu d’Hughes, refusant de se laisser happer par son tourbillon autodestructeur. Alec Baldwin, en Patrician Juan Trippe, et Alan Alda, en sénateur Brewster, incarnent les forces qui s’opposent à lui, cherchant à écraser cet électron libre devenu trop puissant. Mais c’est face à eux que Hughes livrera son dernier combat, notamment dans cette scène magistrale de l’audition au Sénat, où, malgré son esprit vacillant, il retrouve une lueur de grandeur et terrasse ses adversaires avec un discours cinglant.

L’ombre de Citizen Kane plane sur Aviator. Comme Welles avec Charles Foster Kane, Scorsese dissèque l’ascension et la chute d’un homme consumé par ses propres excès. Hughes et Welles auraient dû se rencontrer – deux géants façonnés par leur propre mythe, incompris, enfermés dans des palaces qui deviennent leurs prisons. À travers ce film, Scorsese et DiCaprio signent un chef-d’œuvre, une tragédie moderne où le rêve américain se fracasse sur les murs de la solitude et de la folie. Que DiCaprio n’ait pas eu l’Oscar pour cette performance est une aberration. Il ne joue pas Hughes, il est Hughes. Et Aviator, bien plus qu’un biopic, est un voyage à travers les cieux et l’âme humaine, où le vertige du succès se transforme en chute libre.

NOTE : 16.90

FICHE TECHNIQUE


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