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mardi 11 février 2025

15.40 - MON AVIS SUE LE FILM TRUMAN CAPOTE DE BENNETT MILLER (2005)

 


Vu le film Truman Capote de Bennett Miller (2005) avec Philip Seymour Hoffman Catherine Keener Clifton Collins Jr Allie Mickelson Chris Cooper Kelci Stephenson Bruce Greenwood Bob Balaban Mark Pellegrino Amy Ryan

Les cinq ans d'étude d'une affaire criminelle par l'auteur Truman Capote — investigations relatées dans son roman De sang-froid — à propos du meurtre par deux marginaux, Perry Smith et Richard Hickock, d'un riche fermier avec trois membres de sa famille dans le Kansas.

Bennett Miller ne signe pas un biopic conventionnel avec Truman Capote, mais une plongée fascinante dans la genèse d’un chef-d’œuvre littéraire, De sang-froid, et dans l’obsession d’un homme face à un crime qui le hante. Plus qu’un récit linéaire, le film nous immerge dans une enquête intime, où Capote, écrivain flamboyant et mondain, s’enfonce dans un face-à-face glaçant avec Perry Smith, l’un des deux meurtriers d’une famille du Kansas.

Le fait divers qui inspire Capote est d’une brutalité absolue : en 1959, les Clutter, un couple et leurs deux enfants, sont retrouvés massacrés dans leur ferme de Holcomb. Tuerie absurde, sans mobile apparent, sinon le faux espoir d’un butin qui n’existait pas. Capote, intrigué par la sauvagerie de l’acte et par le silence qui l’entoure, se rend sur place et, peu à peu, établit une relation ambiguë avec Perry Smith. Leur échange dépasse la simple interview : il y a chez Capote une fascination pour cet homme torturé, à l’enfance brisée, à la fois tueur et victime de sa propre histoire. Leur relation oscille entre empathie sincère, manipulation réciproque et peut-être même une part de séduction inavouée. Capote veut comprendre, capter l’essence du mal, mais il se heurte à une réalité plus complexe : celle d’un homme qui, sous certains aspects, lui ressemble.

Philip Seymour Hoffman livre une performance prodigieuse, disparaissant littéralement sous les traits de Capote. Sa voix haut perchée, ses gestes affectés, son regard à la fois tendre et calculateur en font une incarnation magistrale du personnage. Face à lui, Clifton Collins Jr. campe un Perry Smith troublant, entre vulnérabilité et menace latente. Loin d’un monstre caricatural, il devient une énigme tragique, renforçant l’ambiguïté du lien qui unit les deux hommes. Catherine Keener, en Harper Lee, incarne avec sobriété le contrepoint moral de Capote, témoin de sa lente descente dans l’obsession.

Miller, déjà habitué aux récits tirés de faits divers sanglants (Foxcatcher en sera une autre démonstration), adopte une mise en scène froide et clinique, presque documentaire. Il n’y a aucun effet grandiloquent, aucune complaisance dans l’horreur, seulement un lent étouffement psychologique. La photographie hivernale, aux teintes pâles, enferme Capote dans un monde où la frontière entre l’écrivain et le prédateur se brouille. Car à sa manière, Capote, dans sa quête de vérité, vampirise Perry Smith autant que ce dernier le hante.

Truman Capote ne raconte pas seulement la naissance d’un livre, mais la métamorphose douloureuse d’un homme face à l’horreur qu’il cherche à capturer. Un film en apnée, où le crime et la littérature se croisent dans un vertige moral, et où le génie de Capote se paie du prix de son âme.

 NOTE : 15.40

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