Vu le film Buffalo Bill et les Indiens de Robert Altman (1976) avec Paul Newman Géraldine Chaplin Burt Lancaster Harvey Keitel Joel Grey Kevin McCarthy John Considine Allan F. Nicholls Denver Pyle Will Sampson Shelley Duvall
L'histoire se déroule en 1885, Buffalo Bill monte
un spectacle, le Wild West Show,
sur l'Ouest
américain pour cela, il achète Sitting Bull,
un des prisonniers de l'armée. Lors d'un spectacle auquel le président des
États-Unis Grover Cleveland vient
assister, Sitting
Bull veut lui présenter des doléances
pour son peuple, il est éconduit.
En 1976, Robert Altman s’attaque à la
mythologie américaine avec Buffalo Bill et les Indiens, ou leçon d’histoire
de Sitting Bull. Après John McCabe (1971) et Nashville
(1975), il continue son entreprise de démystification des figures légendaires
des États-Unis. Cette fois, il s’attaque à Buffalo Bill, héros de l’Ouest
transformé en showman, incarné par Paul Newman. Le film se veut une critique
acerbe du spectacle et de la réécriture de l’Histoire par ceux qui la
racontent, mais il se noie dans une mise en scène erratique et un scénario
éclaté.
L’histoire suit Buffalo Bill, star
vieillissante de son propre Wild West Show, un spectacle itinérant où il
met en scène ses exploits et ceux de l’Ouest américain. Altman le présente
comme un homme imbu de lui-même, plus préoccupé par son image que par la vérité
historique. Son arrogance est mise en lumière lorsqu’il engage Sitting Bull
(Frank Kaquitts), le célèbre chef sioux, pour donner de l’authenticité à son
show. Mais Sitting Bull refuse de se prêter au jeu, réduisant Buffalo Bill à un
pantin grotesque face à l’Histoire réelle.
Le film joue sur l’opposition entre la
légende et la réalité : Buffalo Bill se voit comme un héros, mais il est un
simple comédien entouré d’admirateurs obséquieux et d’opportunistes. Sitting
Bull, lui, est réduit au silence pendant une bonne partie du film, incarnant un
symbole de dignité face au mensonge orchestré par les colons. Cette idée est
intéressante sur le papier, mais Altman peine à lui donner une véritable force
dramatique.
Altman, fidèle à son style, multiplie
les dialogues qui s’entrecroisent, les scènes où l’action se dilue dans le
brouhaha général, et une mise en scène qui semble parfois improvisée. Si cela
servait la folie du front dans M.A.S.H. ou la polyphonie sociale dans Nashville,
ici, cela donne un film brouillon, qui tourne en rond. Le ton oscille entre
satire, burlesque et tragédie, sans jamais trouver un véritable équilibre.
La reconstitution historique a un côté
volontairement factice, ce qui accentue l’idée du spectacle mensonger, mais
cela empêche aussi toute immersion. Le film donne parfois l’impression de
regarder une répétition plus qu’une œuvre aboutie. De plus, malgré son ambition
critique, il n’explore jamais vraiment la figure de Sitting Bull, qui reste un
personnage périphérique. Son mutisme est certes un choix symbolique, mais il
laisse un goût d’inachevé.
Paul Newman, pourtant immense acteur,
livre ici une prestation inégale. Il cabotine, peut-être volontairement, pour
souligner l’aspect ridicule de son personnage, mais cela le rend aussi agaçant.
On peine à trouver une once de complexité chez ce Buffalo Bill qui aurait pu
être plus tragique s’il avait été interprété avec plus de retenue.
Autour de lui, d’autres grands noms du
cinéma américain de l’époque, comme Burt Lancaster en visionnaire réaliste ou
Geraldine Chaplin en Annie Oakley, apportent quelques touches intéressantes,
mais sans réel impact. La plupart des personnages secondaires sont réduits à
des silhouettes criardes qui participent au chaos général. Frank Kaquitts, qui
joue Sitting Bull, est l’un des rares à dégager une véritable présence, mais
son rôle est trop limité pour qu’il puisse donner toute l’ampleur qu’il mérite.
Si l’intention de Robert Altman est
claire – démonter les mythes américains et dénoncer la falsification de
l’Histoire –, le résultat est un film trop dispersé, où la critique devient
redondante et où l’intérêt s’émousse rapidement. Là où M.A.S.H. trouvait
un équilibre entre satire et gravité, Buffalo Bill et les Indiens ne
semble jamais vraiment savoir s’il veut être une farce cruelle ou une tragédie
amère.
le film n’est pas tant une relecture du
western qu’un regard cynique sur la manière dont l’Amérique réécrit son propre
passé à travers le divertissement. Mais cette dénonciation manque de force, et
au lieu d’un portrait marquant d’un mythe déchu, Altman livre une fresque
confuse et frustrante. Une belle idée sur le papier, mais une exécution qui
laisse sur sa faim.
NOTE : 8.50
FICHE TECHNIQUE
- Réalisation : Robert Altman
- Producteur : Robert Altman
- Producteur associé : Scott Bushnell, Jac Cashin, Robert Eggenweiler
- Producteur exécutif : Dino De Laurentiis, David Susskind
- Production : Dino De Laurentiis Company, Lions Gate Film, Talent Associates-Norton Simon
- Société de distribution : United Artists
- Scénario : Robert Altman et Alan Rudolph, d'après la pièce Indians de Arthur Kopit
- Musique : Richard Baskin
- Directeur de production : Les Kimber
- Photographie : Paul Lohmann
- Montage : Peter Appleton, Dennis M. Hill
- Direction artistique : Jack Maxsted
- Décors : Anthony Masters
- Costumes : Anthony Powell
- Maquillage : Monty Westmore
- Paul Newman (VF : Marc Cassot) : William F. Cody alias Buffalo Bill, la vedette
- Geraldine Chaplin (VF : Béatrice Delfe3) : Annie Oakley, le « coup sur »
- Burt Lancaster (VF : Michel Gatineau) : Ned Buntline (en), le fabricant de légende
- Harvey Keitel (VF : François Leccia4) : Ed Goodman, le neveu de Buffalo Bill
- Joel Grey (VF : Jacques Ciron) : Nate Salisbury, le producteur
- Kevin McCarthy (VF : Raoul Delfosse) : major Arizona John Burke, l'agent
- Allan F. Nicholls (en) (VF : Raymond Loyer) : Prentiss Ingraham, le journaliste
- John Considine (VF : Pierre Fromont) : Frank E. Butler (en), le manager du « coup sur »
- Frank Kaquitts : Sitting Bull, l'indien
- Denver Pyle (VF : Claude Bertrand) : McLaughlin, l'agent des affaires indiennes
- Will Sampson (VF : Georges Atlas) : William Halsey, l'interprète
- Gary MacKenzie : un Mexicain au fouet
- Pat McCormick : Grover Cleveland, le président des États-Unis
- Shelley Duvall (VF : Jane Val) : Frances Cleveland, la « première dame »
- Pluto Calcedona : le cheval de Buffalo Bill
- Evelyn Lear : Nina Cavallini, la soprano
- Noelle Rogers (VF : Perrette Pradier) : Lucille DuCharme, la colorature
- Bonnie Leaders : Margaret, la mezzo-contralto
- Robert DoQui (VF : Serge Sauvion) : Oswald Dart, le cow-boy
- Bert Remsen : Crutch, le barman
- E. L. Doctorow : le conseiller du président Cleveland (non crédité)
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