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dimanche 16 février 2025

15.10 - MON AVIS SUR LE FILM LE TAMBOUR DE VOLKER SCHLONDORFF (1979)


Vu le film Le Tambour de  Volker Schlöndorff (1979) avec David Bennent Mario Adorf Angela Winkler Charles Aznavour Tina Engel Katharina Thalbach Berta Drews Daniel Olbrychski 

L'histoire du Tambour est racontée sous la forme d'un long monologue, dont le narrateur n'est autre que le héros lui-même, Oskar Matzerath, un bien étrange personnage qui a incroyablement survécu, avec sa grand-mère protectrice, à la Seconde guerre mondiale. Doté d'une intelligence hors du commun, il reçoit en cadeau, pour son troisième anniversaire, le 12 septembre 1927, un tambour de fer-blanc laqué rouge et blanc. Choqué par le monde des adultes, il décide de cesser de grandir. Pour cela, il fait exprès de tomber du haut des escaliers de la cave de sa maison et va ainsi conserver sur le monde un regard d'enfant implacable et inflexible. Il découvre qu'il a le talent particulier de pousser un cri strident de haute fréquence qui casse le verre alentour.

Volker Schlöndorff signe avec Le Tambour (Die Blechtrommel), adapté du roman éponyme de Günter Grass, une œuvre fascinante et dérangeante, où l’enfance se mue en résistance face à un monde en décomposition. Coécrit avec Jean-Claude Carrière, le scénario suit le parcours d’Oskar Matzerath, un enfant qui, par un acte de refus absolu, décide à trois ans de ne plus grandir après une chute sur la tête. Son instrument fétiche, un petit tambour rouge et blanc, devient son unique langage, une arme contre la médiocrité et la brutalité des adultes.

David Bennent, âgé de 11 ans au moment du tournage, livre une performance inoubliable, incarnant ce personnage à la fois enfantin et inquiétant. Son regard perçant, sa maturité troublante et son cri strident – capable de briser le verre – donnent à Oskar une dimension quasi mythologique. Il traverse l’histoire de l’Allemagne des années 1920 aux lendemains de la Seconde Guerre mondiale avec une lucidité qui le distingue de son entourage aveuglé par l’idéologie.

Le film ne recule devant rien pour illustrer la montée du nazisme et la compromission générale. La scène où Oskar interrompt un rassemblement hitlérien en détournant une marche militaire vers une valse grotesque est l’un des moments les plus marquants du film : son tambour devient une force subversive, un instrument de révolte contre l’ordre établi. Mais cette rébellion ne suffit pas à arrêter la marche inexorable du chaos.

Un des aspects les plus controversés du film reste la relation entre Oskar et Maria, une jeune femme plus âgée. Cette scène, jugée choquante par certains, interroge les frontières de l’enfance et de la sexualité dans un corps resté figé à trois ans. Oskar, malgré son apparence, est un être hybride, un esprit adolescent dans un corps d’enfant, ce qui rend ces moments profondément troublants.

Visuellement, Schlöndorff restitue avec brio l’atmosphère du Dantzig d’avant-guerre, ville cosmopolite où se croisent Allemands, Polonais et Cachoubes. L’omniprésence du tambour d’Oskar rythme le film comme une litanie funèbre, battant la mesure d’un monde qui court à sa perte.

La Palme d’Or obtenue en 1979, partagée avec Apocalypse Now, souligne la puissance du film : deux visions de la guerre, l’une hallucinée et infernale chez Coppola, l’autre cruelle et grotesque chez Schlöndorff. L’Oscar du Meilleur Film Étranger en 1980 viendra consacrer ce chef-d’œuvre du cinéma allemand.

David Bennent, après ce rôle emblématique, n’a jamais connu une carrière aussi marquante, bien qu’il ait continué à tourner au cinéma et au théâtre. Mais son visage, figé dans le temps, hante toujours ceux qui ont croisé son regard sur grand écran. Le Tambour reste une fable tragique sur l’impossible innocence et la déliquescence d’une époque, un film dont on ne sort pas indemne.

NOTE :15.10

FICHE TECHNIQUE


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