Vu le film Sous le Vent des Marquises de Pierre Godeau (2024) avec François Damiens Roman Kolinka Anne Coesens Salomé Dewaels Frank Trillot André Pasquasy Jean Michel Baltazar Benoit Poelvoorde
Alain, un acteur célèbre, accepte
de jouer le personnage impossible de Jacques Brel. Conscient qu'il s'agit
peut-être du dernier rôle de sa vie, il décide de quitter le plateau en pleine
scène pour aller voir Lou, sa fille qu'il n'a pas vue grandir. Contre toute
attente, Lou entre peu à peu dans son univers fictionnel.
Sous le vent des Marquises de
Pierre Godeau est un film qui, derrière son apparente simplicité, se révèle
être une réflexion profonde sur l’identité, le jeu et la frontière floue entre
la vie et la fiction. Ce qui semblait d’abord être un simple biopic ou un récit
d’acteur en quête de vérité devient peu à peu une fable troublante sur la
manière dont un comédien se fond dans son rôle – jusqu’à en être possédé.
Au cœur du film, un acteur se
prépare à incarner Jacques Brel à l’écran, mais cette immersion va bien au-delà
de la simple composition d’un personnage. Il ne s’agit pas seulement de
ressembler à l’icône, mais de comprendre son âme, d’en saisir les silences et
les fêlures. François Damiens livre ici l’une de ses plus belles performances,
tout en retenue et en nuances. Loin de l’exubérance de ses caméras cachées, il
ne force jamais le trait, évitant le piège de l’imitation caricaturale. Il
habite son rôle avec une justesse bouleversante, donnant à voir un homme en
plein vertige, oscillant entre sa propre identité et celle de Brel.
Fait troublant, l’acteur finit par
abandonner ce rôle qui le consume. Mais au lieu de marquer une rupture nette,
son départ ouvre une nouvelle interrogation : son remplaçant apparaît à
l’écran, presque comme un double, un écho. Comme si, finalement, ces deux
comédiens étaient interchangeables, comme si l’incarnation d’un mythe dépassait
l’individu. Cette mise en abyme renforce l’étrangeté du film, brouillant encore
davantage les frontières entre la réalité et la fiction.
Pierre Godeau capte avec
délicatesse cette perte de repères, à travers une mise en scène épurée et
contemplative. Contrairement à Jacques Brel, son interprète ne partira pas aux
Marquises. Pas d’îles lointaines, pas d’horizons exotiques : le voyage est intérieur.
Il se joue dans le regard, dans le doute, dans le poids d’un héritage trop
grand à porter.
Le film n’est donc pas seulement
un hommage à Brel, mais une réflexion universelle sur la place de l’artiste et
le poids des légendes qu’il tente d’incarner. Entre fascination et vertige, Sous
le vent des Marquises laisse derrière lui une sensation étrange et
envoûtante, comme une chanson qui continue à nous hanter longtemps après sa
dernière note.
NOTE : 12.30
FICHE TECHNIQUE
- Réalisation : Pierre Godeau
- Scénario : Pierre Godeau et Agnès de Sacy
- Musique : Javier Navarrete et Valérie Lindon
- Décors : Samantha Gordowski
- Costumes : Nathalie du Roscoat
- Photographie : Denis Lenoir
- Son : Grégory Lannoy - Roland Voglaire
- Montage : Hervé de Luze
- Production : Philippe Godeau et Jacques-Henri Bronckart
- Coproduction : Nathalie Gastaldo Godeau et Gwennaëlle Libert
- Production exécutive : Jean-Yves Asselin
- Sociétés de production : France 2 Cinéma, Pan Européenne Production, Versus Production, RTBF, Proximus et Voo-BE TV
- Société de distribution : Pan Distribution et Playtime
- François Damiens : Alain
- Salomé Dewaels : Lou
- Roman Kolinka : Antoine
- Anne Coesens : Valérie
- Franck Trillot : Jean
- Louison Lelarge
- Jean-Michel Balthazar : Docteur Pons
- André Pasquasy : Jojo
- Mehdi Zekhnini : le graphiste
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