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dimanche 22 décembre 2024

13.10 - MON AVIS SUR LE FILM ANORA DE SEAN BAKER (2024)

 


Vu le film Anora de Sean Baker (2024) avec Mikey Madison Youri Borrisov Mark Eydelshteyn Karren Karagulian Ivy Wolk Vache Tovmasyan Luna Sofia Miranda Alena Gurevich Alexeï Serebriakov Paul Weissman

Anora « Ani » Mikheeva est une jeune strip-teaseuse vivant à Brighton Beach, un quartier russophone de Brooklyn. Bien qu'elle soit douée dans son travail, Ani est insatisfaite de sa vie et cherche une issue.

Ani est la seule stripteaseuse du club chic de Manhattan dans lequel elle travaille à parler russe. Son patron lui présente Ivan « Vanya » Zakharov, le fils dissolu et immature d'un riche oligarque russe. Vanya est apparemment en Amérique pour étudier, mais il préfère faire la fête et jouer à des jeux vidéo dans le manoir familial de Brooklyn. Ses parents paient son parrain Toros et ses hommes de main Garnick et Igor pour le surveiller et nettoyer ses dégâts.

Anora, réalisé par Sean Baker, s’inscrit malheureusement dans la catégorie des films où l’ambition semble surpasser la cohérence et la maîtrise narrative. Bien que Baker soit connu pour son cinéma immersif et audacieux (Tangerine, The Florida Project), ici, il s’égare dans une œuvre brouillonne et maladroite qui peine à captiver ou à justifier son existence. Si certains y verront une tentative de critique sociale ou de satire, le résultat final ressemble davantage à un fouillis indigeste, rappelant les excès de certains projets cinématographiques plus préoccupés par leur style que par leur substance.

Le film débute sur une longue scène de sexe entre Ani (Anora), une prostituée vénale interprétée sans grande nuance, et Ivan, le fils d’un oligarque russe désabusé. Ce choix d’ouverture, censé poser les bases de leur relation et de la vacuité de leur existence, s’éternise au point d’épuiser le spectateur dès les premières minutes. Si le cinéma peut explorer l’intimité et la complexité des relations humaines, ici, tout semble gratuit et voyeuriste, sans apporter de réelle profondeur au récit.

La suite du film s’embourbe dans des intrigues chaotiques impliquant la mafia russe, un garde du corps prénommé Igor, et des échanges interminables qui diluent toute tension dramatique. Plutôt que de construire une narration solide, Baker semble multiplier les sous-intrigues et les digressions, comme s’il hésitait entre plusieurs genres – satire sociale, thriller mafieux, ou comédie noire – sans jamais en maîtriser aucun.

La mise en scène, habituellement un point fort chez Sean Baker, déçoit ici profondément. La caméra, constamment en mouvement, finit par donner le vertige, ajoutant une dimension chaotique à un récit déjà confus. Si cette approche hyperréaliste fonctionne parfois pour capter l’énergie brute d’un moment, ici, elle semble simplement mal calibrée, rendant les scènes non seulement difficiles à suivre, mais aussi désagréables à regarder.

Quant à la bande originale, elle est une véritable agression sonore. Les choix musicaux, apparemment destinés à renforcer l’atmosphère oppressante du film, ne font qu’ajouter à l’inconfort général. Plutôt que de compléter l’expérience narrative, la musique amplifie le sentiment d’un travail bâclé et maladroit.

Les personnages, bien que dotés d’un certain potentiel dramatique, sont mal exploités. Ani, censée être au centre de l’histoire, n’est jamais véritablement développée au-delà de son rôle de prostituée vénale. Son parcours manque de nuances et d’émotion, ce qui rend difficile toute connexion avec elle. Ivan, interprété par Mark Eydelshteyn, est le seul personnage qui parvient à se démarquer, grâce à des scènes où il frôle la folie, notamment au tribunal. Sa performance excentrique est une bouffée d’air frais dans un film autrement terne, mais elle ne suffit pas à sauver l’ensemble.

Quelques fulgurances, ici ou là, rappellent que Baker est capable d’instants de grâce et de vérité. Une scène dans une ruelle sombre, par exemple, où Igor et Ani échangent des regards chargés d’ambiguïté, aurait pu devenir un moment clé du film si elle avait été mieux exploitée. Mais ces éclats sont noyés dans un océan de longueurs inutiles et de clichés, rendant l’expérience globale frustrante.

Au final, Anora donne l’impression d’un film qui se veut audacieux et subversif, mais qui tombe dans ses propres pièges. C’est long, répétitif, et souvent vulgaire, sans jamais offrir de réflexion profonde ou d’émotion authentique. Seule la performance de Mark Eydelshteyn apporte un peu de relief à ce naufrage, avec des moments où son personnage dépasse la caricature pour devenir un être humain fascinant dans sa folie.

  Anora est une déception majeure, un exemple de cinéma qui confond provocation et narration, chaos et créativité. Si vous cherchez une critique sociale percutante ou un portrait émouvant de personnages marginaux, passez votre chemin : ici, ce sont les aspirines qui sont de rigueur.

NOTE : 13.10

FICHE TECHNIQUE

  • Réalisation et scénario : Sean Baker
  • Musique : Matthew Hearon-Smith
  • Direction artistique : Ryan Scott Fitzgerald
  • Décors : Stephen Phelps
  • Costumes : Jocelyn Pierce
  • Photographie : Drew Daniels
  • Montage : Sean Baker
  • Casting : Sean Baker
  • Production : Sean Baker, Alex Coco et Samantha Quan
  • Production déléguée : Ken Meyer
  • Sociétés de production : Cre Film et FilmNation Entertainment
  • Sociétés de distribution : Neon (États-Unis) ; Le Pacte (France)
  • Pays de production : Drapeau des États-Unis États-Unis

DISTRIBUTION

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