Vu le film Victor et Victoria de Reinhold Schünzel (1933) avec Renate Muller Anton Walbrook Hermann Thimig Fritz Odemar Friedel Pisetta Aribert Washer
Jeune chanteuse vive et pleine d'allant, Susanne Lohr
est au chômage. Après une audition ratée, elle fait la connaissance de Viktor
Hempel, un artiste qui, comme elle, court après les cachets. Victor se
désespère de trouver un rôle à la mesure de son talent et vivote grâce au tour
de chant qu'il donne, habillé en femme, dans un cabaret. Le jour où Viktor,
malade, perd sa voix, il propose à Susanne de le remplacer sur scène.
Le Victor und Victoria de Reinhold Schünzel
(1933) est un joyau oublié qui brille encore par sa finesse et son audace,
malgré les contraintes de son époque. En effet, ce film est l'ancêtre direct du
chef-d'œuvre de Blake Edwards, et bien que les deux œuvres partagent un ADN thématique,
elles possèdent chacune leur propre tonalité.
Le contexte de 1933 impose une certaine discrétion
dans le traitement de l’homosexualité et des jeux de genre, mais Schünzel
parvient à aborder ces sujets avec une légèreté et une malice qui désarment. Là
où Edwards, dans les années 80, exploite pleinement l'exubérance et le glamour,
Schünzel opte pour une approche plus proche de la comédie burlesque, rappelant
les grandes heures du cinéma muet. Cette proximité avec l’esthétique du
slapstick donne au film une énergie vive et presque anarchique, qui contraste
délicieusement avec son sujet transgressif.
Renate Müller, dans le rôle de Victoria, est une
véritable révélation : elle incarne avec grâce et espièglerie cette femme qui
se déguise en homme pour percer dans le milieu du cabaret, jouant avec les
frontières de genre d’une manière charmante et souvent hilarante. Hermann
Thimig, en partenaire masculin maladroit mais attachant, complète parfaitement
cette dynamique.
Ce qui rend le film particulièrement intéressant,
c’est sa capacité à naviguer entre la comédie légère et des sous-entendus
sociaux plus profonds. On sent les prémices d’une réflexion sur la fluidité des
identités et des désirs, même si le contexte de l’Allemagne de l’époque impose
de ne jamais pousser la subversion trop loin. En ce sens, le film est un
produit de son temps, mais il possède une modernité inattendue qui le rend
encore captivant aujourd’hui.
L’aspect "loufoque" est au cœur de son
charme. Les dialogues pétillants, les quiproquos rocambolesques, et
l’atmosphère effervescente rappellent les meilleures comédies de
l’entre-deux-guerres, où l’on privilégiait le plaisir immédiat et la légèreté.
Ce film est un éclat de champagne cinématographique : pétillant, audacieux, et
plus profond qu’il n’y paraît à première vue.
Victor und Victoria est un
classique méconnu qui mérite d’être redécouvert, ne serait-ce que pour son
audace douce et son charme rétro. On peut le savourer comme un miroir des
sensibilités de son époque tout en admirant sa modernité sous-jacente. Un film
à ranger parmi les plaisirs cinématographiques intemporels, même s’il se pare
de 50 pagnes plutôt que de smokings !
NOTE : 11.90
FICHE TECHNIQUE
- Réalisation : Reinhold Schünzel
- Scénario : Reinhold Schünzel
- Photographie : Konstantin Irmen-Tschet
- Musique : Franz Doelle
- Montage : Arnfried Heyne
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