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lundi 10 mars 2025

16.10 - MON AVIS SUR LE FILM LUDWIG OU LE CREPUSCULE DES DIEUX DE LUCHINO VISCONTI (1972)

 


Vu le film Ludwig ou Le Crépuscule des Dieux de Luchino Visconti (1972) avec Helmut Berger Romy Schneider Trevor Howard Silvana Mangano Gert Froebe Helmut Griem Umbero Orsini   Izabella Teleżyńska Marc Porel John Moulder Brown 

Vu la version longue de 4 heures sans censure

Le film relate la vie de Louis II de Bavière, depuis son couronnement à l'âge de 18 ans jusqu'à son internement et sa mort à 40 ans. On y découvre la complicité presque amoureuse qui le lie à sa cousine Élisabeth de Wittelsbach, dite « Sissi » (la jeune impératrice d'Autriche-Hongrie), qui parvient presque à lui faire épouser sa sœur Sophie malgré le peu d'attirance qu'il a pour celle-ci, sa passion pour la musique de Richard Wagner, dont il devient le très généreux mécène au point de lui faire construire un opéra, les circonstances qui l'amènent à céder à ses penchants : son goût du rêve, du post-romantisme, des garçons (son palefrenier devenant son chambellan et homme de confiance très intime), des châteaux de contes de fées, pour l'édification desquels il dépense des fortunes et où il fuit les dures réalités de son temps (à savoir l'irrésistible unification allemande autour de la Prusse de Bismarck qui vassalise les autres royaumes ou principautés germaniques, Bavière comprise) en s'imaginant, entouré d'une garde rapprochée de serviteurs, qu'il est encore vrai roi en son royaume. Au terme de ces années d'excès, le gouvernement effectif de Munich l'extirpe de son rêve et l'interne au château de Berg… où il meurt peu après son arrivée en tentant, dans des circonstances mal élucidées, de s'évader.

Ludwig – Le Crépuscule des Dieux est une fresque majestueuse retraçant la grandeur et la chute de Louis II de Bavière. Devenu roi à 19 ans, il s’enfonce progressivement dans une folie qui finira par le consumer. Visconti orchestre ce drame avec un faste inouï, magnifiant les excès d’un souverain dont les rêves ont défié la raison et l’histoire.

Les décors et les costumes sont d’une richesse à couper le souffle. On pense notamment à la célèbre galerie des glaces, reflet du faste démesuré dans lequel Louis II évolue. Ses châteaux, véritables contes de fées de pierre et de dorures, deviennent le symbole de ses ambitions extravagantes et de son isolement croissant. Son train de vie exubérant, alimenté par des dépenses exponentielles, creuse le gouffre qui le sépare du monde réel.

Le film met en lumière les amours multiples du roi, entre passion platonique pour sa cousine, l’impératrice Élisabeth d’Autriche (Sissi), incarnée par une Romy Schneider envoûtante, et ses relations homosexuelles qu’il n’hésite plus à afficher malgré le poids des conventions. Visconti, lui-même aristocrate et homosexuel, traite ces aspects sans fard, avec une sensibilité rare.

Tout est grandiose, à commencer par l’interprétation d’Helmut Berger. Son Ludwig, halluciné, fragile et déchiré entre ses idéaux et la réalité, fascine par sa profondeur. C’est l’un de ses rôles les plus intenses, taillé sur mesure par Visconti, qui lui offre ici l’occasion de déployer toute l’étendue de son talent.

Mais au-delà du personnage historique, Ludwig semble aussi résonner avec la relation intime entre Visconti et Berger. Luchino Visconti, déjà vieillissant et malade, vouait à son acteur une admiration passionnée, quasi obsessionnelle, qui se traduit à l’écran par une mise en scène d’une ferveur troublante. Comme Louis II, le réalisateur projette ses propres contradictions dans ce roi sublime et tourmenté, à la fois admiré et isolé. On peut y voir une forme de folie amoureuse, où le regard du cinéaste se mêle à celui du spectateur, captivé par la beauté et la décadence de Berger. Ce n’est pas seulement un film historique, mais aussi une déclaration, un requiem baroque et amoureux qui unit, le temps d’un chef-d’œuvre, le cinéaste et sa muse.

Le destin tragique de Louis II, coincé entre rêve et déclin, ne cesse de nous captiver. Son règne oscille entre splendeur et décadence, entre l’amour des arts et l’abandon du pouvoir, jusqu’à son effacement dans un mystère digne d’un opéra wagnérien. Avec Ludwig, Visconti signe une œuvre magistrale, à la fois élégie funèbre et portrait d’un roi en quête d’absolu – et peut-être, d’un amour impossible.

NOTE : 16.10

FICHE TECHNIQUE

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