Vu le film Copie Conforme de Jean Dréville (1947) avec Louis Jouvet Louis Jouvet Louis Jouvet Louis Jouvet Louis Jouvet Annette Poivre Suzy Delair Madeleine Suffel Jane Marken Danièle Franconville Jean Jacques Delbo
La ressemblance étonnante entre un
homme insignifiant, Gabriel Dupon, représentant en boutons, et un cambrioleur
de grande envergure, le photographe Manuel Ismora, permet à ce dernier de
réussir des vols sensationnels. Or Dupon s'éprend de Coraline, la maîtresse
d'Ismora qui est séduite par la tendresse du bonhomme.
Copie Conforme
(1947) est l’un de ces films où la présence d’un acteur suffit à élever
l’ensemble au rang de classique. Et quand cet acteur, c’est Louis Jouvet, en
double rôle qui plus est, on sait d’avance qu’on est face à une leçon de jeu.
Sous la caméra de Jean Dréville, il incarne deux personnages aux antipodes :
Gabriel Dupon, un modeste homme sans envergure, presque clochardisé, et Manuel
Ismora, un criminel élégant, manipulateur et charismatique, qui profite de sa
ressemblance avec Dupon pour se créer un alibi parfait.
Ce postulat du double – cher au cinéma
et à la littérature – fonctionne ici à merveille grâce au talent de Jouvet, qui
parvient à différencier ses deux personnages par un simple regard, une posture,
une intonation. Il ne se contente pas d’un simple jeu d’opposition, il donne à
chacun une humanité distincte : Dupon est pathétique mais attachant, Ismora
inquiétant mais fascinant.
L’écriture d’Henri Jeanson, comme
toujours, fait mouche. Ses dialogues incisifs et ciselés donnent au film une
saveur particulière. Chaque réplique est une pépite, et Jouvet s’en empare avec
un plaisir évident. Le spectateur, lui, savoure ces joutes verbales où
l’ironie, l’humour noir et la finesse d’esprit se mêlent avec élégance.
Si l’intrigue s’appuie sur des ressorts
classiques du film noir – usurpation d’identité, manipulation, piège fatal –,
elle ne manque pas de profondeur. Derrière l’histoire d’un homme ordinaire
piégé par son double maléfique, Copie Conforme explore des thèmes plus
vastes : l’identité, le déterminisme social, la fatalité. Dupon, en devenant
l’ombre d’Ismora, découvre une nouvelle facette de lui-même, mais à quel prix ?
La photographie d’André Thomas accentue
encore l’atmosphère sombre du film. Les jeux de lumière rappellent le film noir
américain, avec ses contrastes marqués, ses ombres inquiétantes et ses cadrages
soignés. Paris y apparaît tantôt comme un décor oppressant, tantôt comme un
théâtre d’illusions où la vérité se dérobe sans cesse.
Avec sa mise en scène fluide, son
scénario intelligent et surtout l’interprétation magistrale de Louis Jouvet, Copie
Conforme est un petit bijou du cinéma d’après-guerre, un film noir à la
française qui mêle élégance et noirceur avec un brio rare. Un plaisir à voir et
à revoir, ne serait-ce que pour le bonheur d’entendre Jouvet déclamer du
Jeanson avec ce phrasé inimitable.
NOTE : 13.90
FICHE TECHNIQUE
- Réalisation : Jean Dréville, assisté de Wladimir Roitfeld
- Scénario : Jacques Companeez
- Adaptation : Jacques Companeez, Christiane Imbert, Nino Frank, Paul Andréota, Jean Dréville
- Dialogues : Henri Jeanson
- Photographie : André Thomas
- Montage : Jean Feyte
- Musique : René Cloërec (Éditions musicales Robert Salvet)
- Paroles : Henri Jeanson
- Chanson : L'amour n'est qu'une comédie, interprétée par Suzy Delair
- Opérateur : Jacques Ripouroux, assisté de Bontemps et Kamensky
- Son : Pierre Bertrand
- Décors : Robert Gys, assisté de Foucher et Chalvet
- Script-girl : Simone Bourdarias
- Régisseur général : Tonio Sune, assisté de Muller
- Régisseur ensemblier : Charroit
- Maquillage : Georges Gauchat
- Photographe de plateau : Robert Joffres
- Administrateur : Canel
- Tournage dans les studios "Paris Studios Cinéma"
- Enregistrement sur Western Electric; Laboratoire Eclair
- Producteur : Jacques Roitfeld,
- Directeur de production : Constantin Geftman
- Producteur délégué : Raymond Borderie
- Société de production : Compagnie industrielle et commerciale cinématographique (CICC)
- Société de distribution : Les Films Constellation
- Louis Jouvet : Gabriel Dupon, représentant en boutons, et Manuel Ismora, l'escroc (en plus de ses déguisements en duc de Niolles, en déménageur et en Olaf Christiansen, le Norvégien)
- Suzy Delair : Coraline, la maîtresse d'Ismora
- Annette Poivre : Charlotte Bonheur, dactylo et collègue de Gabriel
- Madeleine Suffel : Mme Rodebois, la femme de l'acheteur du château
- Jane Marken : Mme Boissac, la concierge de l'immeuble
- Danièle Franconville : une cliente de Manuel Ismora
- Jean-Jacques Delbo : Oscar, un des complices d'Ismora
- Léo Lapara : André, un des complices d'Ismora
- Henry Charrett : M. Charles Rodebois, l'acheteur du château
- Georges Pally : l'inspecteur Laprune
- Fernand Rauzena : M. Péroni, l'acheteur de boutons
- Gaston Dupray : M. Touzat, le patron de Gabriel
- Jean Carmet : un des complices d'Ismora
- Robert Seller : le juge d'instruction
- Raoul Marco : l'inspecteur
- Jean Diener : le gardien du château
- Georges Cusin : Pauzat
- Philippe Olive : le réceptionniste de l'hôtel Malridge
- Jean Morel : M. Sorbier, le bijoutier
- Jean Poc : l'académicien
- Marina : la danseuse du Feu de Bengale
- Colette Georges : la fleuriste de l'hôtel
- Louis Vonelly
- Paule Launay
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire