Vu le film June et John de Luc Besson (2025) (sur OCS Ciné Plus) avec Matilda Price Luke Stanton Eddy Ryan Shoos Dean Steterman Sherry Matson Honey Kauren Ayanna Flemming
John est un jeune homme un peu coincé. Il travaille comme comptable dans une banque où il est harcelé par son patron. Il a par ailleurs une relation complexe avec sa mère, très possessive. Un jour, John rencontre dans le métro une jeune femme dynamique et intrépide nommée June. Sa vie assez ordinaire va être bouleversée par cette romance intense qui va les entraîner dans un périple imprévisible vers Las Vegas
On savait Luc Besson en perte d’inspiration depuis un bon moment, et ce dernier film ne déroge pas à la règle. Tourné intégralement à l’iPhone – selon une mode qui se veut audacieuse mais qui, ici, frôle le gadget –, June et John ne bénéficiera même pas d’une sortie en salles. Et on comprend pourquoi. Ce n’est pas qu’une question de format : c’est un film pensé pour être vu sur un téléphone, tourné pour ressembler à une « story » Instagram haut de gamme. Le cadrage étroit, la focale courte et cette impression d’avoir l’œil collé à un judas rendent l’expérience particulièrement désagréable sur un grand écran. C’est un visionnage contraint, oppressant, sans respiration.
Côté histoire ? Pas grand-chose à se mettre sous la dent. June et John, deux jeunes adultes un peu paumés, embarquent pour un road movie censément romantique ou marginal, mais qui ne décolle jamais. Pas de cavale haletante, pas de passion dévorante, pas de tension dramatique. On est loin de Bonnie and Clyde, encore plus de Thelma et Louise. Ici, les personnages se contentent de traverser des paysages sans enjeu, de se regarder sans qu’aucune étincelle n’allume l’écran. Le vide émotionnel est total. On dirait un enchaînement de scènes d'école de cinéma, avec un vague fil rouge cousu de fil blanc.
Luc Besson se contente de recycler ses propres clichés : on retrouve un peu de Subway dans les errances nocturnes de métro, un soupçon de Nikita dans les poses pseudo-rebelles de June, une touche de Léon dans la relation ambivalente avec une figure paternelle évoquée, et un zeste du Cinquième Élément dans la tentative de créer un univers décalé... mais sans le souffle, ni l’originalité. Le résultat ? Un gloubi-boulga visuel et narratif qui ne convainc jamais. Même les clins d’œil à ses anciens films sonnent creux. Il ne reste que la coquille, plus rien de vivant à l’intérieur.
Les comédiens, Matilda Price et Luke Stanton Eddy, peinent à faire exister des personnages qui ne sont pas écrits. La direction d’acteurs semble absente. Leurs dialogues, creux et convenus, pourraient sortir d’un générateur automatique. On s’attend presque à ce qu’ils sortent leur téléphone pour se filmer eux-mêmes, tant l’ensemble ressemble à une parodie de cinéma indépendant 2.0.
Quelques anecdotes à noter : Besson aurait filmé le tout en une poignée de jours, entre Paris et l’arrière-pays italien, sans équipe technique lourde. Il voulait une esthétique "brute", "libre", "moderne". Ce qui en ressort est surtout bâclé, fainéant, désincarné. À ce stade, l’expérimentation vire au caprice de cinéaste en roue libre, qui confond dépouillement et négligence.
La musique tente bien de relever le niveau, mais même elle semble fatiguée de devoir porter un film qui ne sait pas ce qu’il veut raconter. Des nappes électroniques posées sur du vide ne peuvent pas faire de miracle.
June et John n’est ni une œuvre de cinéma, ni un vrai film expérimental : c’est une sorte de croquis vidéo de luxe, indigeste, qui n’atteint ni la puissance formelle d’un Tangerine (de Sean Baker, lui aussi tourné à l’iPhone), ni l’ambition narrative d’un vrai road movie. On sort de là plus agacé qu’ému.
Restons optimistes : le Dracula annoncé pour Besson pourrait, espérons-le, se montrer plus mordant que ce néant numérique. Mais après June et John, difficile de continuer à croire au sang neuf chez ce cinéaste jadis novateur, aujourd’hui vampirisé par ses propres tics.
NOTE : 7.30
FICHE TECHNIQUE
- Réalisation et scénario : Luc Besson
- Musique : Samir El Hammami et Julien Rey (38e Donne)
- Décors : Aurelie Taillefer
- Costumes : Caroline Fahrer
- Photographie : Tobias Deml
- Montage : Julien Rey
- Production : Luc Besson et Virginie Besson-Silla
- Sociétés de production : EuropaCorp
- Sociétés de distribution : Kinology (monde), OCS (France)
- Matilda Price : June
- Luke Stanton Eddy : John
- Ryan Shoos : Steven
- Dean Testerman : Francis
- Sherry Mattson : Odile
- Honey Lauren : la mère de John
- Ayanna S. Flemings : Myriam

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