Vu le film Toutes pour Une de Houda Benyamina (2024) avec Oulaya Amamra Sabrina Ouazani Deborah Lukumuena Daphné Patakia Georgina Amoros Nemo Schiffman Kacey Klein
Sara, une jeune fille en quête de liberté, découvre avec stupeur que les légendaires Trois Mousquetaires, protecteurs de la Reine de France, sont en réalité des femmes dissimulées sous des apparences masculines. Fascinée par leur courage et leur détermination, elle décide de rejoindre leur aventure et de suivre leur chemin : se transformer pour être libre et enfin devenir elle-même.
Toutes pour Une : ou comment prendre un roman mythique d’Alexandre Dumas, le secouer comme une bouteille de soda éventée, et n’en garder que la mousse. Ce film, annoncé comme une relecture féminine et engagée des Trois Mousquetaires, s’impose surtout comme un cas d’école de contre-exemple en matière d’adaptation. Un naufrage total, artistique, narratif et même symbolique, qui n’a pas seulement raté sa cible : il a tiré dans l’autre direction, les yeux bandés, à cheval sur un cheval de bois.
Le projet partait peut-être d’une bonne intention – revisiter un classique sous un angle féminin – mais l'exécution tient de la caricature. Le problème n’est pas qu’on féminise les héros : c’est qu’on le fait sans finesse, sans audace, et surtout sans assumer. Les trois héroïnes ne sont que des copies pâles, grimées, costumées à la truelle, et affublées de voix viriles forcées dignes d’un sketch raté. C’est un festival de surjeu, de postures pseudo-guerrières et de punchlines qui tombent à plat comme des crêpes froides. À force de vouloir "réparer" un roman jugé trop masculin, le film en oublie d’en préserver la richesse, l’humour, l’esprit d'aventure. Dumas a dû faire un triple salto dans sa tombe.
Le scénario, déjà, semble écrit lors d’un week-end entre copines branchées wokisme en mal de visibilité. On s’y perd entre intrigues de cour, sororité à gros sabots, et affrontements en mode chorégraphies de clip RnB du début des années 2000. Et la mise en scène n’arrange rien : ralentis à outrance, filtres sépia criards, gros plans intensément vides. Un style clinquant pour masquer le vide, ou comment faire passer un épisode de Plus belle la vie pour Game of Thrones.
Les dialogues ? Affligeants. On a droit à des répliques comme : « L’honneur est un fardeau que seules les reines savent porter. » Sérieusement ? Même dans une rédac de 5e, ça ne passerait pas. On sent le film écrit pour Twitter plutôt que pour le cinéma. Les héroïnes, censées incarner la puissance féminine, finissent par devenir des marionnettes d’un discours sans vie, déconnecté, qui sonne faux de la première à la dernière scène.
Le public ne s’y est pas trompé. Le film est un four monumental : salles désertes, critiques assassines, et rumeurs d’un boycott déguisé. L’une des actrices, visiblement en manque de médiatisation, a ajouté sa touche au désastre avec des sorties médiatiques maladroites, accusant les spectateurs de misogynie parce qu’ils ne venaient pas voir le film. Quand il faut supplier le public de vous aimer, c’est rarement bon signe.
Une anecdote raconte que, lors de la première projection presse, un silence gênant a suivi le générique. Puis, un critique aurait glissé à son voisin : « Une pour toutes, et surtout aucune pour moi. » C’est dire.
Toutes pour Une échoue sur tous les fronts : il trahit Dumas, échoue à créer un nouveau mythe, et dessert son propre message. Loin d’être un acte féministe fort, c’est une opération opportuniste, mal écrite, mal jouée, mal pensée. On ne sort pas de la salle révoltée. Juste fatigué, désabusé, et vaguement honteux pour les actrices qui y ont cru. Elles sont bien seules, en effet.
Un conseil ? Plutôt que de voir ce film, relisez Les Trois Mousquetaires. Même avec une couverture rose fluo et une préface inclusive, ce sera toujours plus palpitant que cette triste mascarade.
NOTE : 3.10
FICHE TECHNIQUE
- Réalisation : Houda Benyamina
- Scénario : Houda Benyamina, Fabien Suarez et Juliette Sales, d'après Les Trois Mousquetaires d'Alexandre Dumas
- Musique : Amine Bouhafa, Emilie Gassin et Ben Violet
- Décors : Philippe Chiffre
- Costumes : N/A
- Photographie : Christos Voudouris
- Montage : N/A
- Production : Marc-Benoît Créancier
- Coproducteurs : Jacques-Henri Bronckart, Tatjana Kozar et Gwennaëlle Libert
- Sociétés de production : Easy Tiger
- Coproduction : Studiocanal, Versus Production, France 2 Cinéma, RTBF, Voo, BeTV, Proximus et Spirit Bird
- Avec le soutien de : Canal+, Ciné+, OCS, Eurimages, CNC, des régions Île-de-France, Occitanie et Provence-Alpes-Côte d'Azur, SACEM, Cofinova Développement et Média, Centre du Cinéma et de l'Audiovisuel de la Fédération Wallonie-Bruxelles, Tax shelter du gouvernement fédéral belge, Inver Tax Shelter et Wallimage
- En association avec : Sofica La Banque Postale Image 17, Cofimage 34, Cinémage 18, Cofinova 20, SG Image 2022
- Société de distribution : UGC (France)
- Budget : 10 680 000 € (estimé)
- Oulaya Amamra : Sara / D'Artagnan
- Sabrina Ouazani : Athos
- Déborah Lukumuena : Portau
- Daphné Patakia : Aramitz
- Georgina Amorós : Anne d'Autriche
- Kacey Mottet-Klein : Richelieu
- Nemo Schiffman : Louis XIII
- Martin Karmann : Le Marquis
- Salomé Villiers : La Marquise
- Maryne Cayon : Claudia la charbonnière

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