Dans le cadre des Mille Films de ma Vie , je propose le film Cruising (La Chasse) de William Friedkin (1980) avec Al Pacino Paul Sorvino Karen Allen Richard Cox Don Scardino Jay Acovone Randy Jurgensen Gene Davis Joe Spinell Mike Starr James Remar Power Boothe Sonny Grosso
À New York,
deux homosexuels sont
sauvagement assassinés. Convaincu d'avoir affaire à un tueur en série,
le capitaine Edelson demande à Steve Burns — jeune policier au physique
proche des victimes — d'infiltrer le milieu SM gay de Meatpacking
District. Chargé de découvrir le coupable, Steve ne part pas
sans appréhension. Alors que Nancy, sa petite-amie, le questionne sur ses
derniers changements, il garde le mutisme qui est de règle. Installé dans un
appartement sous l'identité de John Forbes, le policier sympathise avec son
nouveau voisin, Ted Bailey, et traîne la nuit dans les boîtes homosexuelles à
la recherche de quelques indices
Cruising
(1980) de William Friedkin est un thriller psychologique qui a suscité une vive
controverse, notamment au sein de la communauté LGBT+ aux États-Unis, pour sa
représentation des milieux gay underground et pour la manière dont il aborde la
sexualité homosexuelle. Le film, qui plonge dans les clubs SM de New York des
années 70, a été accusé de véhiculer une image stéréotypée et dangereuse de
l’homosexualité, en liant la violence, la marginalité et la sexualité. Friedkin
ne prend aucune précaution pour éviter la provocation, ce qui a provoqué de
vives réactions à sa sortie.
Contrairement à Les Garçons de la bande
(1970), autre œuvre de Friedkin, qui propose une vision plus intimiste et
humaine des relations entre hommes gays, Cruising adopte un ton sombre,
dérangeant et parfois choquant. Le réalisateur semble volontairement appuyer
sur le côté trash et transgressif de ces milieux pour marquer et troubler le
spectateur. L’univers qu’il dépeint est oppressant, et son ambiance glauque participe
à l’effet de malaise ressenti tout au long du film. Ce n’est pas une critique
sociétale, mais plutôt un thriller tortueux qui cherche à déstabiliser.
Le personnage principal, Steve Burns, joué par Al
Pacino, est un policier infiltré dans la communauté gay pour enquêter sur une
série de meurtres. Pacino, hétérosexuel dans le film, est peu à peu troublé par
ce qu’il voit et vit au sein de cette culture underground. L’un des grands
mystères du film est de savoir jusqu’où Steve s’est laissé entraîner. A-t-il
pris goût à cette plongée dans le monde SM ? A-t-il franchi des limites
personnelles ? Friedkin laisse volontairement ces questions en suspens, nourrissant
l’ambiguïté du personnage principal.
La relation de Steve avec son voisin, interprétée de
manière subtile mais lourde de sous-entendus, ajoute une autre couche de
complexité. À la fin du film, on ne sait pas vraiment si Steve est devenu un
autre homme après cette mission ou s’il a simplement basculé dans quelque chose
d’inavoué. L’une des questions les plus dérangeantes reste : a-t-il tué l’amant
de son voisin ? Friedkin joue ici avec les limites de la morale et du désir, et
ne donne pas de réponses claires.
L’autre grande ambiguïté du film repose sur le tueur
en série lui-même. Avons-nous réellement attrapé le coupable ? Ou s’agit-il
d’un simple copycat ? La fin du film est volontairement floue et ouverte,
renforçant le sentiment de confusion. Friedkin manipule son public, jouant avec
les attentes et les certitudes pour laisser place au doute, une technique
typique de son cinéma, qui privilégie les questions ouvertes plutôt que les
conclusions fermées.
Cruising
est sans aucun doute un film brillant dans sa construction, mais aussi tortueux
et provocateur. Friedkin utilise des codes propres au thriller et au film noir
pour plonger son spectateur dans un univers oppressant, le forçant à remettre
en question ses propres perceptions de la moralité et de la sexualité. Si le
film a été critiqué pour son traitement controversé de la communauté gay, il
reste une œuvre marquante du cinéma des années 80, aussi fascinante que
dérangeante, signée d'un Friedkin au sommet de son art, qui n’hésite pas à
explorer les zones d’ombre de l’âme humaine.
NOTE : 16.30
FICHE TECHNIQUE
- Réalisation : William Friedkin
- Scénario : William Friedkin, d’après le roman de Gerald Walker
- Musique : Jack Nitzsche
- Direction artistique : Edward Pisoni
- Décors : Bruce Weintraub
- Costumes : Robert De Mora
- Photographie : James A. Contner
- Montage : Bud S. Smith
- Production : Jerry Weintraub ; Burtt Harris (coproducteur)
- Sociétés de production : Lorimar Film Entertainment ; CiP-Europaische Treuhand (coproduction)
- Sociétés de distribution : United Artists
- Budget : 11 millions de dollars
- Al Pacino (VF : Bernard Murat) : l'inspecteur Steve Burns
- Paul Sorvino (VF : Albert Augier) : le capitaine Edelson
- Karen Allen (VF : Annie Balestra) : Nancy
- Richard Cox (VF : Pierre Arditi) : Stuart Richards
- Don Scardino (VF : Éric Legrand) : Ted Bailey
- Jay Acovone : Skip Lee
- Randy Jurgensen (en) (VF : Daniel Gall) : l'inspecteur Lefransky
- Barton Heyman : Dr Rifkin
- Gene Davis (en) : DaVinci
- Arnaldo Santana (VF : Joel Martineau) : Loren Lukas
- Larry Atlas : Eric Rossman
- Allan Miller (en) (VF : Marc de Georgi) : M. Berman
- Sonny Grosso : l'inspecteur Blasio
- Joe Spinell (VF : Claude Joseph) : le patrouilleur DiSimone
- Mike Starr (VF : Roger Lumont) : le patrouilleur Desher
- Ed O'Neill (VF : Sady Rebbot) : l'inspecteur Schreiber
- William Russ : Paul Gaines
- James Remar (VF : François Leccia) : Gregory
- Powers Boothe : Hanky
- Steve Inwood (en) (VF : Daniel Russo) : Martino Perry
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