Vu le film Les Œufs de l’Autruche de Denys de la Patellière (1957) avec Pierre Fresnay Simone Renant Georges Poujouly Mady Berry Paul Mercey Yoko Tani Guy Bertil André Roussin Marguerite Pierry Jacqueline Doyen François Chaumette
Hippolyte
Barjus fait l'autruche en refusant de voir les réalités de sa famille :
ses fils (les œufs dont il est question dans le titre) ne se comportent pas
comme il faut selon son étroite morale bourgeoise. En effet, l'un est
homosexuel et l'autre se fait entretenir ! Forcé d'admettre la situation,
il se met en colère. Face à cette réaction, sa femme menace de le quitter. Il
finira par accepter ses enfants comme ils sont.
Les
Œufs de l’autruche
est un film français réalisé par Denys de La Patellière en 1957, basé sur la
pièce de théâtre de l’écrivain André Roussin. À première vue, il semble être
une comédie bourgeoise sur les déboires d'une famille de la haute société, mais
derrière ses airs légers se cache une métaphore sociale plus profonde, qui
aborde des thèmes de l'homosexualité, du conformisme, et de l'hypocrisie
familiale. Le titre même est évocateur : tout comme l’autruche qui enfouit sa
tête dans le sable, le personnage principal, interprété par Pierre Fresnay,
refuse de voir les réalités troublantes qui bouleversent l’équilibre de sa
famille.
Le
père, bourru et autoritaire, est un homme d'affaires bien établi, incarnant une
masculinité rigide et traditionnelle. Il est confronté à la découverte que l'un
de ses fils, Roger (Jean-Claude Poujouly), est homosexuel. Dans un contexte
social où l'homophobie est omniprésente, la réaction du père est plus
qu'excessive : il est outré et refuse catégoriquement d'accepter ce qu’il
perçoit comme une honte. Les dialogues regorgent de propos homophobes, marquant
clairement les préjugés de l’époque. Le personnage du père incarne ici une
société qui préfère ne pas voir ce qui la dérange, tout comme il fait
l’autruche face à la vérité sur ses enfants.
Le film
ne cache pas ses clichés, surtout en ce qui concerne la représentation des homosexuels
et du milieu de la couture, où les stéréotypes flamboyants abondent. L'un des
fils est gigolo, et la connotation des "milieux de la mode" est
largement exploitée pour suggérer l'homosexualité, ce qui est typique des
productions des années 1950. Cette vision caricaturale de la communauté LGBTQ+
peut aujourd'hui paraître datée, voire offensante, mais elle est révélatrice
des mentalités d’une époque où ces thèmes étaient rarement traités de manière
subtile ou nuancée.
Cependant,
derrière l’humour et les situations loufoques, on discerne un portrait social
acide. Le refus du père de voir la réalité (les "œufs" de l'autruche,
soit ses enfants) est une critique d'une société qui, en 1957, peine à accepter
la diversité des identités. Le film montre une dynamique familiale brisée par
le conformisme et l’intolérance. La souffrance des fils est palpable, bien que
voilée par le ton léger de la comédie.
Bien
que Les Œufs de l’autruche puisse sembler anachronique aux yeux des
spectateurs contemporains, il témoigne d’une époque où l’homosexualité n'était
pas simplement un tabou, mais un sujet de moquerie et de rejet. Le traitement
de cette question dans le film, bien que simpliste et stéréotypé, offre un
aperçu de la lutte pour la reconnaissance des identités sexuelles non conformes
dans le cinéma d’après-guerre.
Aujourd’hui,
le film aurait du mal à passer sans critiques : les dialogues homophobes et la
manière dont sont représentées les orientations sexuelles des personnages
seraient jugés intolérables dans notre société actuelle, où ces thèmes sont
abordés avec beaucoup plus de sensibilité. Néanmoins, Les Œufs de l’autruche
reste un témoignage des tensions sociales de son époque, et l’un des rares
films à évoquer, même maladroitement, l'homosexualité dans une comédie
populaire.
NOTE : 11.10
FICHE TECHNIQUE
- Réalisation : Denys de La Patellière
- Scénario : Denys de La Patellière, Frédéric Grendel et Shervan Sidery d'après la pièce éponyme d'André Roussin
- Photographie : Pierre Petit
- Montage : Robert et Monique Isnardon
- Son : Raymond Gauguier
- Musique : Henri Sauguet
- Producteur : Maurice Teyssier
- Société de production : Vauban Productions
- Pierre Fresnay : Hippolyte Barjus
- Simone Renant : Thérèse Barjus
- Georges Poujouly : Roger Barjus
- Mady Berry : Leonie
- Paul Mercey : le barman bavard
- Yoko Tani : Yoko
- Guy Bertil : le journaliste
- André Roussin : Henri
- Marguerite Pierry : Mme Grombert
- François Chaumette : M. Marlatier, un invité de la nuit de la couture (non crédité)
- Jacqueline Doyen (non crédité)
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