Vu le film Rendez-vous avec Pol Pot de Rithy Panh (2024) avec Grégoire Colin Irène Jacob Cyril Guei Bun-Hok Lim Leng Thirith Sovann Nhoeb Paov Pitu Siden In Sophourn Has Rithy Panh (Pol Pot)
L'histoire vraie dont est tiré le film est celle de
la visite au Cambodge (cas
unique) en décembre 1978, peu avant la Guerre entre le Cambodge et le Viêt Nam de
deux journalistes américains, Elizabeth Becker (en) (1947-)
et Richard Dudman (en) (1918-2017)
et d'un Britannique marxiste, Malcolm Caldwell (en) (1931-1978),
proche du régime des Khmers rouges.
Ils ont un entretien avec Pol Pot le 22
décembre 1978, trois jours avant le déclenchement de l'offensive du Viêt Nam.
Au cours de la nuit suivante, dans leur hôtel, Malcolm Caldwell est exécuté par
des Khmers rouges. Elizabeth Becker est un moment menacé par un milicien, mais
s'échappe, ainsi que Richard Dudman.
Le film met en scène deux journalistes français, Lise
Delbo et Paul Thomas (photojournaliste) ainsi qu'un sympathisant du régime,
Alain Cariou, ami de Pol Pot. Ils subissent pourtant une très longue attente
dans un village, au cours de laquelle un certain nombre de bizarreries leur
apparaissent, que Paul Thomas voudrait élucider tandis qu'Alain Cariou
s'efforce de les minimiser. Le photographe s'enfuit, découvre des traces de
répression, est rattrapé, puis disparait mystérieusement. L'entretien avec Pol
Pot, but du voyage, a lieu (dans un bâtiment haut de gamme de Phnom Penh).
Alain Cariou est exécuté peu après. Lise Delbo se retrouve à la fin entourée de
miliciens sur le tarmac d'un aérodrome perdu dans la brousse, où on lui demande
d'identifier le corps d'Alain Cariou amené dans un cercueil.
"Rendez-vous avec Pol Pot"
est un film d’une grande froideur, qui contraste radicalement avec des œuvres
plus accessibles et spectaculaires comme Rambo. Ici, la violence n'est
pas spectaculaire mais insidieuse, silencieuse, dépeinte à travers l’attente de
trois personnages, chacun à sa manière piégée par l’engrenage d’un régime
impitoyable. Parmi eux, Colin, un sympathisant du régime, fait l'expérience
d'une prise de conscience terrifiante en découvrant peu à peu la réalité
effroyable des camps khmers rouges.
Le film se fonde sur des faits réels, ce qui renforce
la dimension didactique du récit, presque clinique, tant dans la façon de
présenter les personnages que dans la reconstitution des événements. La mise en
scène, froide et sans concession, nous plonge dans l'angoisse et l'absence
totale d'humanité qui caractérisent ce régime. On suit les protagonistes,
accablés par l'attente, entre la peur, l'ignorance et la résignation, jusqu’à
ce moment fatidique où Colin et les autres se confrontent à la véritable horreur
de la situation.
Loin de proposer un spectacle d'action ou d'héroïsme,
le film nous fait sentir l'oppression constante, la déshumanisation
systématique, sans pathos ni embellissement. Cette lente immersion, presque
détachée, est précisément ce qui finit par captiver. On ne s'attache pas aux
personnages au sens traditionnel du terme, mais l'ambiance suffocante finit par
envoûter le spectateur, qui se laisse petit à petit subjuguer par cette
histoire où l'horreur ne provient pas des scènes violentes mais du vide moral
absolu qui habite le régime et ses sbires.
Cette œuvre, glaçante
et implacable, ne laisse pas de place à l’espoir. Elle nous montre un monde où
la vie humaine est dénuée de valeur, où tout est fait pour anéantir l’individu.
En ce sens, elle rappelle que la véritable terreur n'est pas dans l'acte violent
en soi, mais dans le système qui le normalise.
NOTE : 12.50
FICHE TECHNIQUE
- Réalisation : Rithy Panh
- Scénario : Rithy Panh et Pierre Erwan Guillaume, d'après Les Larmes du Cambodge : l'histoire d'un autogénocide d'Elizabeth Becker
- Musique : Marc Marder
- Décors :
- Costumes : Ariane Viallet
- Photographie : Prum Mesa et Aymerick Pilarski
- Son : Éric Tisserand et Nicolas Volte
- Montage : Rithy Panh
- Production : Catherine Dussart, Roger Huang, Justine O., Rithy Panh, Fatma Hassan Alremaihi, Hanaa Issa, Mehmet Zahid Sobaci, Muhammed Ziyad Varol, Mirsad Purivatra, Jovan Marjanovic et Georges-Marc Benamou
- Sociétés de production : CDP et Anupheap Production
- Société de distribution : Dulac Distribution
- Irène Jacob : Lise Delbo, journaliste
- Grégoire Colin : Alain Cariou, intellectuel communiste
- Cyril Gueï : Paul Thomas, photojournaliste
- Bun-Hok Lim : Camarade Sung
- Leng Thirith : Somaline Mao
- Sovann Nhoeb : Chan
- Paov Pitu : Ta Mok
- Siden In : Chef d'atelier
- Sophourn Has : Ieng Sary
- Tithya Nouhem : L'interprète
- Sok Sothun : Le vieil homme
- Sokong Heng : Sikoeurn
- Rithy Panh : Pol Pot (silhouette, voix)
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