Vu le film (redécouverte) La Tête contre les Murs de Georges Franju (1959) avec Jean Pierre Mocky Pierre Brasseur Anouk Aimée Charles Aznavour Jean Galland Paul Meurisse Roger Legris Edith Scob Henri Poirier Jacques Seiler
Fils désœuvré d'un ténor du barreau, François Gérane
tente, pour rembourser des dettes, de voler son père qui décide de le faire
interner dans un asile à la campagne, où prévalent des méthodes hors d’âge.
Seulement visité par Stéphanie, qu’il venait de rencontrer, François partage
ses projets d’évasion avec Heurtevent. Une crise d’épilepsie de celui-ci met
fin à leur tentative commune, mais son suicide donne à François l’occasion de
s’évader au cours de l’enterrement. Bien qu’ayant trouvé un travail et une possibilité
de logement à Paris, il se rend chez Stéphanie avec qui il passe la nuit, avant
d’y être retrouvé par les infirmiers qui le ramènent à l’asile.
La tête contre les murs
(1959), réalisé par Georges Franju, est une œuvre captivante qui plonge dans
l'univers sombre de la folie et des institutions psychiatriques. Le film se
distingue non seulement par sa mise en scène inquiétante, mais aussi par la
force de ses personnages, magistralement incarnés par un casting de choix, dont
Jean-Pierre Mocky, qui a également coécrit le scénario.
Mocky, dans le rôle de François, jeune homme révolté
contre l'autorité paternelle, est un anti-héros complexe. Il se retrouve
interné dans un asile psychiatrique après avoir défié son père, un homme rigide
et conformiste. Ce lieu d'enfermement devient alors le théâtre d'une
exploration fascinante de la folie, où la question de savoir qui est réellement
fou — les pensionnaires ou ceux qui dirigent l'institution — est constamment
posée. Franju joue subtilement avec cette ambiguïté, dépeignant les administrateurs
et les médecins comme des figures inquiétantes, parfois plus dérangées que les
patients qu'ils sont censés soigner.
Visuellement, La tête contre les murs est
marqué par l’esthétique singulière de Franju, mélange de réalisme brut et de
stylisation onirique. Les décors de l'asile, austères et oppressants,
renforcent l'atmosphère de tension constante. On retrouve cette veine poétique
et macabre qui traversait déjà ses œuvres précédentes comme Le Sang des
bêtes (1949), où il dépeignait l'inhumanité dans des lieux clos. Ici, la
folie est traitée avec une certaine distance, presque clinique, mais sans
jamais perdre de vue l'humanité des personnages.
Le casting est irréprochable. Mocky, à la fois
touchant et imprévisible, est soutenu par de grands noms du cinéma français.
Charles Aznavour, dans le rôle d'un camarade interné, apporte une sensibilité
délicate à son personnage, tandis que Anouk Aimée incarne une figure féminine
énigmatique, accentuant la dimension poétique du film. Leurs performances
apportent une intensité rare, brisant le confort habituel de ces acteurs et
dévoilant une part plus brute de leur talent.
Franju parvient à instaurer une tension palpable tout
au long du film, notamment grâce à sa mise en scène précise et ses cadrages
soignés. L’asile devient presque un personnage à part entière, enfermant les
protagonistes dans une prison mentale dont il semble impossible de s’échapper.
Le film soulève également des questions profondes sur
la normalité, le libre arbitre et l'exercice du pouvoir. Qui a le droit de
juger de la santé mentale d'un individu ? Cette interrogation résonne avec
force tout au long du film, où les pensionnaires semblent parfois plus lucides
que les médecins eux-mêmes.
La tête contre les murs
est une œuvre essentielle du cinéma français des années 50. C'est un film qui
interroge et bouscule, à travers une esthétique unique et des performances
d’acteurs inoubliables. Franju, en mettant en lumière l'absurdité des systèmes
institutionnels, signe ici un film à la fois profond, oppressant et
terriblement humain. Un chef-d’œuvre qui continue de marquer les esprits.
NOTE : 12.90
FICHE TECHNIQUE
- Réalisation : Georges Franju
- Scénario : d'après le roman éponyme d'Hervé Bazin
- Adaptation : Georges Franju, Jean-Pierre Mocky
- Dialogues : Jean-Charles Pichon1
- Assistant réalisateur : Jacques Rouffio
- Images : Eugen Schüfftan1, assisté de Claude Zidi
- Opérateur : Georges Miklachewsky
- Musique : Maurice Jarre
- Décors : Louis Le Barbenchon
- Montage : Suzanne Sandberg
- Son : René Sarazin
- Maquillage : Louis Dor, assisté de Marcelle Testard
- Photographe de plateau : Henri Caruel
- Script-girl : Marcelle Hochet
- Régisseur : Roger Descoffre
- Production : Sirius, Atica, Elpénor-Films
- Chef de production : Lucien Masson, Jérôme Goulven
- Directeur de production : Jean Velter
- Société de production et distribution : La Société des films Sirius
- Tournage du au
- Pierre Brasseur : Dr Varmont
- Paul Meurisse : Dr Emery
- Jean-Pierre Mocky : François Gérane
- Anouk Aimée : Stéphanie
- Charles Aznavour : Heurtevent
- Jean Galland : Maître Gérane
- Jean Ozenne : Comte Elzéar de Chambrelle
- Thomy Bourdelle : Colonel Donnadieu
- Rudy Lenoir : le planqué
- Roger Legris : Decauville, le chauffeur
- Henri San Juan : patron du billard
- Édith Scob : la folle qui chante
- Max Montavon : l'interne au réfectoire
- Luis Masson : l'interne
- Balpo
- Paul Demange
- René Alié
- Luc Andrieux : un infirmier
- Doudou Babet : Le noir
- Claude Badolle
- Claude Castaing
- Jean Henry
- Pierre Koplitchev
- Jean Labarrère
- Jacques Mancier : l'homme au fusil
- Claude Mansard
- Raoul Marco
- Diego Masson
- Pierre Mirat : un gardien
- Véronique Nordey
- Henri Poirier : le curé
- Alexandre Randall
- Jean Rougerie
- Jacques Seiler : un infirmier
- André Thorent
- Lucien Camiret
- Sophie Poncin
- Sophie Saint-Just
- Monique Ardoin
- Alice Guerpillon : la nageuse
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