Pages

vendredi 9 août 2024

6.20 - MON AVIS SUR LE FILM LES CARABINIERS DE JEAN LUC GODARD (1963)

Vu le film Les Carabiniers de Jean Luc Godard (1963) avec Marino Masé Geneviève Galéa Patrice Moulet Gérard Poirot Catherine Ribeiro Barbet Schroeder Jean Brassat Jean Gruault Roger Coggio Pascale Audret Jean Louis Commolli

Dans un royaume imaginaire vivent deux paysans, Ulysse, son frère Michel-Ange et leurs épouses respectives, Vénus et Cléopâtre. Leur existence est bouleversée par l'arrivée des carabiniers, qui leur apportent une lettre de mobilisation et leur vantent les avantages de la guerre. Ils quittent alors leurs épouses et traversent champs de bataille et villages, en détruisant et pillant sur leur passage.

"Les Carabiniers" (1963) de Jean-Luc Godard qui suscite des réactions très contrastées, et ce, pour des raisons évidentes. Conçu comme une satire de la guerre, le film est à la fois provocateur, déroutant, et profondément ancré dans l'expérimentation cinématographique qui caractérise l'œuvre de Godard.

Le film raconte l'histoire de deux paysans naïfs, Ulysse et Michel-Ange, qui sont enrôlés pour combattre dans une guerre par des carabiniers venus les recruter avec des promesses de richesses et de gloire. Cependant, ce qu'ils découvrent est loin de leurs attentes, et la guerre est montrée dans toute sa brutalité, son absurdité et son vide moral.

Ce qui frappe d'emblée dans "Les Carabiniers", c'est son approche délibérément antinarrative et son style visuel austère. Godard adopte une esthétique qui renonce aux conventions du cinéma de guerre traditionnel. Les scènes de bataille sont réduites à des actes dénués de spectacle, filmées souvent en plans longs et statiques, presque comme des tableaux vivants, ce qui peut donner l'impression d'une mise en scène "mal jouée" ou "pas jouée". Les personnages, quant à eux, sont dépourvus de profondeur psychologique, ce qui les rend difficiles à identifier ou à comprendre pour le spectateur. Dans un style parodique on a l’impression par certains moments d’être dans un film de Jean Pierre Mocky. Ce choix est intentionnel : Godard veut montrer des marionnettes humaines, des êtres sans conscience, emportés par la folie de la guerre.

L'une des caractéristiques du film est son traitement du son. Le design sonore est souvent cacophonique, avec des dialogues parfois inaudibles ou noyés dans des bruits ambiants. Cet aspect technique peut être perçu comme un défaut ou une expérience frustrante pour le spectateur, mais dans le cadre de l'intention de Godard, il s'agit plutôt d'un choix esthétique. En rendant le son chaotique, il reflète le chaos de la guerre, où le bruit envahit tout, où les voix humaines sont perdues dans la violence et l'absurdité du conflit. Cela crée une expérience sensorielle qui, bien que dérangeante, renforce le message du film sur la déshumanisation engendrée par la guerre.

Les performances des acteurs sont souvent mal jouées parce qu'elles sont intentionnellement dépouillées de tout naturalisme. Les dialogues sont récités plutôt que joués, les personnages sont caricaturaux, et les réactions émotionnelles sont souvent absentes ou exagérées de manière grotesque. Godard ne cherche pas à créer une identification émotionnelle avec ses personnages ; au contraire, il veut que le spectateur reste détaché, presque aliéné, pour mieux réfléchir à la satire qu'il met en place. Les acteurs ne sont pas des personnages à aimer ou à détester, mais des symboles de la condition humaine face à la guerre.

L'un des points culminants du film est la scène où les soldats montrent à leurs femmes une collection de cartes postales représentant les merveilles qu'ils ont vues ou qu'ils croient avoir vues au cours de leurs pillages. Cette scène, absurde et pathétique, résume parfaitement la critique que Godard fait de la guerre : une promesse de gloire et de richesse qui se révèle n'être qu'un fantasme creux, une accumulation de souvenirs vides.

Ce n'est pas un film facile à regarder ni à apprécier, surtout si l'on s'attend à une narration traditionnelle ou à une esthétique plaisante

NOTE : 6.20

FICHE TECHNIQUE

Réalisation, adaptation, dialogues : Jean-Luc Godard
Scénario : Jean-Luc Godard, Jean Gruault et Roberto Rossellini d'après la pièce Les Carabiniers de Beniamino Joppolo
Musique : Philippe Arthuys
Image : Raoul Coutard
Montage : Agnès Guillemot
Assistant réalisateur : Charles Bitsch et Jean-Paul Savignac
Son : Jacques Maumont
Décors : Jean-Jacques Fabre

DISTRIBUTION

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire