Vu le film Borgo de Stéphane Demoustier (2023) avec Hafsia Herzi Moussa Mansaly Louis Memmi Michel Fau Pablo Pauly Florence Loiret Caille Cedric Apietto Anthony Morganti Henri-Noël Tabary Thomas Muzziotti
Mélissa vient
d'être mutée à la prison de Borgo, en Corse. Elle est
surveillante à l'unité 2, où les prisonniers, tous corses, bénéficient d'une
grande autonomie. Elle sympathise avec certains d'entre eux, avec les risques
que cela comporte.
Le film Borgo se distingue par sa plongée
immersive dans le monde carcéral, avec un accent particulier sur les
spécificités de la prison en Corse. S'inspirant d'un fait divers survenu en
2017 à Bastia, le film capte immédiatement l'attention par sa tension palpable
et son atmosphère chargée de non-dits. La loi du silence, caractéristique du
milieu corse, est omniprésente et donne au film une dimension particulièrement
étouffante, où chaque parole ou geste semble être contrôlé, chaque mouvement
étudié.
L’intrigue du film tourne autour de Mélissa,
une surveillante de prison interprétée avec une finesse remarquable par Hafsia
Herzi. Son personnage, fragile, ambivalent, et profondément humain, se
retrouve au cœur d'une affaire criminelle mystérieuse. Tout au long du film, la
question de son implication dans ce crime hante le spectateur, créant une
tension psychologique presque insoutenable. Mélissa incarne un personnage
complexe, tiraillé entre son devoir de surveillante et les pressions d’un
environnement carcéral où la loi du silence règne en maître. Son apparente
fragilité cache une force intérieure insoupçonnée, mais aussi des zones d'ombre
qui alimentent les soupçons tout au long du récit.
La mise en scène est un des points forts du
film. Le réalisateur réussit à capturer la brutalité et la tension inhérente à
la vie en prison, mais sans jamais tomber dans le sensationnalisme. Chaque plan
semble pesé, réfléchi, pour renforcer l’impression d’un univers clos,
oppressant, où la violence peut éclater à tout moment. La prison de Borgo, avec
son architecture froide et ses couloirs interminables, devient presque un
personnage à part entière, reflétant l'état d'esprit des détenus et des
surveillants. Les décors accentuent l’aspect inéluctable de cette prison où
chaque personnage semble enfermé, non seulement physiquement, mais aussi
moralement, pris dans un engrenage qui les dépasse.
L'un des aspects les plus marquants du film est sa réalisation
authentique des rôles secondaires. Les détenus, interprétés par des acteurs
à la présence forte et naturelle, apportent une crédibilité rare à ce milieu
carcéral. Chacun d’eux est marqué par son passé, son histoire, et sa propre
manière de survivre en prison. Ces personnages, tout en nuances, échappent aux
stéréotypes classiques souvent présents dans les films sur l'univers carcéral.
Leur langage, leurs gestes, leurs silences même, renforcent l’idée que la
prison de Borgo est un monde en soi, où les règles de la société extérieure ne
s’appliquent plus vraiment.
La question centrale du film est celle de la
culpabilité de Mélissa. Tout au long de l’intrigue, le spectateur est amené à
se poser la question : est-elle complice du crime qui a eu lieu ? Ou bien
est-elle une victime des circonstances, manipulée par des forces qu’elle ne
comprend pas totalement ? Cette ambiguïté donne au film une dimension
psychologique fascinante, qui dépasse le simple cadre du thriller carcéral pour
interroger les mécanismes de la culpabilité, de la manipulation, et de la
survie dans un univers aussi impitoyable que celui de la prison. Cette
exploration des limites morales des personnages est parfaitement orchestrée, et
elle laisse une impression durable bien après la fin du film.
Hafsia Herzi est sans doute le pivot central de la réussite du film. Sa performance est tout en subtilité, jamais excessive, mais toujours juste. J’Aime beaucoup aussi les deux enquêteurs joués par Michel Fau et Pablo Pauly, comme Louis Memmi qui joue le petit caid de la prison qui va perdre Mélissa
Prix du Jurt Reims Polar 2024
NOTE : 14.80
FICHE TECHNIQUE
- Réalisation : Stéphane Demoustier
- Scénario : Stéphane Demoustier, avec la collaboration de Pascal-Pierre Garbarini
- Costumes : Céline Brelaud
- Décors : Catherine Cosme
- Photographie : David Chambille
- Son : Mathieu Descamps et Francis Bernard
- Montage : Damien Maestraggi
- Musique : Philippe Sarde
- Société de production : Petit Film
- Société de distribution : Le Pacte (France)
- Hafsia Herzi : Melissa
- Moussa Mansaly : Djibril
- Louis Memmi : Saveriu
- Michel Fau : le commissaire
- Pablo Pauly : le brigadier
- Florence Loiret Caille : la directrice
- Cédric Appietto : Joseph Marchetti
- Henri-Noël Tabary : Anto
- Anthony Morganti : Pascal Rossi
- Thomas Muziotti : Scaniglia
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