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mercredi 17 décembre 2025

14.90 - MON AVIS SUR LE FILM LA MAISON DU DIABLE DE ROBERT WISE (1963)

 


Vu le Film La Maison du Diable de Robert Wise (1963) avec Julie Harris Claire Bloom Russ Tamblyn Richard Johnson Fay Compton Valentine Dyal Diane Clare Ronald Adam Lois Maxwell Howard Lang 

Afin de poursuivre ses expériences de parapsychologie, le professeur Markway réunit un groupe de personnes dans un vieux manoir réputé hanté. Dès la première nuit, les hôtes du professeur sont terrorisés par des bruits insolites. Eleanor est au bord de la dépression et le professeur lui conseille de partir mais elle refuse en prétendant que la maison la retient. 

La Maison du Diable (The Haunting, 1963) est la preuve éclatante que les grands cinéastes n’ont pas de genre, seulement une vision. Deux ans après l’explosion chorégraphique et colorée de West Side Story, Robert Wise change radicalement de registre et plonge dans l’horreur pure, celle qui s’insinue sous la peau plutôt que de jaillir en geysers de sang. Et il retrouve au passage son Riff : Russ Tamblyn, comme un clin d’œil discret entre deux mondes. 

Adapté du roman magistral de Shirley Jackson, le film s’inscrit dans une lignée prestigieuse souvent copiée, rarement égalée. Ni Jan de Bont ni même Mike Flanagan, pourtant brillant ailleurs, n’ont retrouvé cette alchimie unique : ici, le diable n’apparaît jamais, et pourtant il est partout. Dans les murs. Dans l’air. Dans les têtes. 

Hill House est une maison malade. Une maison qui a mal tourné. Wise la filme comme un organisme vivant, respirant, oppressant. Un labyrinthe en spirale, sans angles droits, conçu pour désorienter les corps autant que les esprits. On s’y perd comme dans un cauchemar architectural. Même immobile, la maison bouge. 

Le scénario est d’une simplicité redoutable : des individus fragiles, invités à expérimenter des phénomènes paranormaux. Mais derrière l’étude scientifique se cache une expérience humaine, presque cruelle. Eleanor, incarnée par la bouleversante Julie Harris, est le cœur battant du film. Seule, fêlée, avide d’amour, elle devient la proie idéale. Harris joue la peur non pas comme une réaction, mais comme un état permanent, une fatigue de vivre qui rend chaque bruit insupportable. 

Face à elle, Claire Bloom apporte une élégance distante, presque aristocratique, tandis que Russ Tamblyn, plus léger en apparence, introduit un trouble inattendu. Aucun personnage n’est là par hasard. Tous portent une fissure que la maison exploite avec une perversité clinique. 

Et ces bruits… Pas du Shakespeare pour rien, non : ici chaque grincement compte. Chaque coup sourd dans la nuit est une agression. Wise orchestre une symphonie de sons invisibles. Pas de musique assourdissante pour forcer l’émotion, pas d’hémoglobine pour masquer le vide. Juste le bruit, l’attente, la sueur froide. On tremble même en plein hiver. La température monte, la respiration se bloque. 

La mise en scène est d’une intelligence rare. Jeux d’ombres, déformations de l’image, cadrages obliques : le réel se dérègle doucement. Le surnaturel n’a pas besoin d’effets spéciaux, ni même d’effets visuels. Il est suggéré, insinué, imaginé — et donc mille fois plus terrifiant. Wise sait que le plus effrayant, c’est ce que le spectateur fabrique lui-même. 

Le film dresse aussi un parallèle subtil entre passé et présent : les crimes anciens, les douleurs enfouies, les traumatismes non résolus continuent de contaminer le présent. Hill House n’est pas hantée par des fantômes, mais par la mémoire. 

Soixante ans plus tard, La Maison du Diable reste un sommet du cinéma d’horreur. Un film qui prouve qu’avec du talent, du silence et une caméra bien placée, on peut terroriser une salle entière sans montrer quoi que ce soit. Wise ne fait pas sursauter : il installe. Il serre lentement la gorge. Et quand le film s’achève, la maison, elle, n’a pas fini de vous observer. 

NOTE  : 14.90

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