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mardi 16 décembre 2025

13.10 - MON AVIS SUR LE FILM LE ROYAUME DES CHATS DE HIROUKI MORITA (2002)


 Vu le Film des Studios Ghibli Le Royaume des Chats de Hiroyuki Morita (2002) 

Une lycéenne nommée Haru sauve un chat qui a été renversé par un camion. Le chat s'avère être le prince du royaume des chats, et Haru se voit offrir de nombreux cadeaux en échange de son heroïsme, y compris une demande en mariage. 

Le Royaume des Chats de Hiroyuki Morita est une véritable nouvelle découverte du cinéma d’animation japonais, un film qui rappelle que la poésie et l’imaginaire ne sont jamais hors d’âge, surtout quand ils sont servis par un talent graphique exceptionnel. Dès le départ, on rencontre Haru, une petite fille un peu solitaire, ce genre d’enfant qui pourrait passer inaperçu dans le tumulte du monde réel mais que le destin a décidé de sortir de l’ombre. Sa vie tranquille bascule le jour où elle sauve un chat… et pas n’importe quel chat. Loon, parce qu’il s’appelle ainsi, parle. Et ça, Haru ne s’y attendait pas. Elle découvre bientôt que ce chat n’est pas qu’un félin bavard : il est un prince dans un grand royaume, ce qui est déjà assez pour faire tourner la tête de n’importe quelle fillette. 

Ce qu’il y a de merveilleux dans ce film, c’est que tout est simultanément simple et prodigieux. L’intrigue, on pourrait presque la raconter en une phrase : Haru sauve un chat, se retrouve propulsée dans un royaume félin, doit naviguer entre mondes et personnages, et en ressort changée. Mais ce serait faire un très mauvais résumé, parce que le plaisir du film ne réside pas dans le récit mais dans l’expérience sensorielle et émotionnelle qu’il offre. La poésie surgit à chaque coin de décor, à chaque ruelle du royaume, à chaque expression des chats, qui sont tous animés avec un soin qui frôle le miracle. 

Haru est, comme toujours, l’ancre humaine du récit. Son regard émerveillé et parfois perplexe est celui du spectateur. Morita a cette intelligence rare de la mise en scène : il laisse le temps aux détails, aux pauses, aux silences, et chaque plan devient une invitation à explorer. La scène où Haru pénètre dans le royaume pour la première fois est un chef-d’œuvre de composition et de couleurs : on sent immédiatement que l’espace est vivant, que chaque ruelle, chaque balcon, chaque chat en mouvement a une vie propre. Et bien sûr, Loon est irrésistible : prince élégant, un peu snob, mais profondément attachant, il apporte humour et légèreté à l’aventure. 

La galerie de personnages secondaires est une leçon d’inventivité et de tendresse. Du matou comique qui ne cesse de ronronner au majordome félin pince-sans-rire, chaque rencontre est un petit bijou d’écriture et de design. Même dans les courts moments, Morita fait preuve d’une intelligence narrative incroyable : il ne surcharge jamais, mais chaque personnage apporte quelque chose au voyage de Haru, à sa découverte du courage et de l’amitié. On se surprend à retenir son souffle devant certaines situations, ou à éclater de rire devant les mimiques des chats, parce que l’animation est ici une langue vivante, expressive, qui parle directement à l’émotion. 

Le scénario, sans être compliqué, est d’une finesse rare. Il sait mêler humour, suspense et poésie sans jamais tomber dans le didactisme. La quête de Haru n’est pas seulement une aventure fantastique : c’est un apprentissage de la confiance, de la curiosité et de la joie simple de découvrir l’inattendu. Chaque obstacle, chaque rencontre est à la fois un jeu et un apprentissage, et la simplicité apparente de l’histoire est exactement ce qui permet à l’imaginaire de s’épanouir pleinement. C’est comme si Morita nous disait : « Oublie les problèmes du monde réel et promène-toi un instant dans l’émerveillement. » 

La mise en scène est fluide, élégante et malicieuse. Morita alterne plans larges et détails intimes, laissant Haru explorer le royaume avec nous. Il ne s’agit pas seulement de montrer un décor grandiose, mais de nous faire ressentir chaque texture, chaque espace, de nous donner l’impression que nous marchons réellement aux côtés de la fillette. Les transitions entre le monde réel et le royaume des chats sont parfaitement orchestrées, et l’on passe d’un univers à l’autre sans rupture, comme dans un rêve éveillé. L’humour est discret, toujours intégré dans la narration ou dans le comportement des chats, jamais forcé, ce qui rend chaque sourire d’autant plus savoureux. 

Ce qui rend le film encore plus attachant, c’est le ton léger et poétique, qui ne sacrifie jamais la cohérence à la fantaisie. Même lorsque les situations deviennent absurdes — et il y en a, avec des chats marchant sur deux pattes ou exigeant des politesses princières — tout est crédible dans l’univers qu’on nous propose, et on se laisse porter avec un plaisir immense. Les décors sont simplement grandioses graphiquement, chaque détail respire, chaque texture est pensée, et le tout est servi par une animation fluide qui donne vie à un monde où l’imagination règne en maître. 

Le film est également prophétique dans son rapport aux autres mondes : le royaume des chats est une métaphore subtile de la rencontre avec l’inconnu, de l’apprentissage de la différence et de l’émerveillement face à ce qui est hors de notre portée immédiate. Haru, par sa curiosité et sa bonté, devient le pont entre le réel et le fantastique, et c’est ce qui rend son aventure si profondément touchante. 

Le plaisir de ce film est totalement interactif, comme si l’on partageait avec Haru sa surprise, son émerveillement et sa joie. On rit, on s’émeut, on admire, et on quitte le cinéma avec cette sensation rare : celle d’avoir exploré un monde nouveau, simple et complexe à la fois, poétique et concret, avec des personnages qui nous resteront longtemps en tête. On pourrait presque dire qu’on est gâté comme Haru elle-même, tant le film est généreux, tendre, inventif et drôle. 

Le Royaume des Chats est une petite merveille : un hymne à l’imaginaire, à l’humour subtil, à la poésie visuelle, et à l’inventivité qui ne sacrifie jamais la cohérence ni l’émotion. Morita nous rappelle qu’un chat peut être un prince, une petite fille peut être courageuse, et que le cinéma d’animation japonais est capable de nous faire rêver avec simplicité et beauté. Bref, on sort du film avec un sourire, une boule d’émerveillement dans la gorge, et l’envie de revoir Haru et Loon encore et encore. 

 NOTE , 13.10

FICHE TECHNIQUE

 

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