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jeudi 1 octobre 2015

LES ROIS DU MONDE de Laurent Laffargue par Critique Chonchon

"Les Rois du Monde"
1984. Casteljaloux, village du sud-ouest de la France.
Quand Jeannot (Sergi Lopez) sort de prison où il a purgé une peine de 3 ans, il n'a qu'une seule idée en tête : reconquérir Chantal (Céline Sallette, rien à dire, c'est une immense comédienne), l'amour de sa vie, qui s'est installée en son absence avec Jacky (Éric Cantonna, impeccable en taiseux à la violence contenue) le boucher du village.
Jeannot est violent et alcoolique, traîne avec le brave Jean-François (Guillaume Gouix, excellent en petit pédé de province), et se fait réconforter par la bienveillante Marie-Jo (Romane Bohringer, qu'on est heureux de retrouver).
La tragédie grecque prend des allures de western, tandis que les jeunes du village, Romain qui rêve de faire du théâtre (Victorien Cacioppo), Pascaline (Roxane Arnal, qu'on jurerait être la fille d'Isabelle Carré) et Thibault (Jean-Baptiste Sagory) suivent les cours de théâtre que donne Chantal après son boulot de caissière, et vivent leurs premières amours.
Outre qu'il est le compagnon de Céline Sallette et un ami de Louis Garrel (il est au générique de "Petit Tailleur" et de "Les Deux Amis"), je ne connais rien du réalisateur/comédien Laurent Laffargue qui signe ici son premier film. C'est un metteur de théâtre et d'opéra dont je ne connais pas le travail.
Le hasard veut que "Les Rois du Monde" propose une film à l'ambiance assez similaire à celle de "Coup de Chaud" de Raphaël Jacoulot sorti mi-août 2015. Mais là où on peut proposer un rôle à Grégory Gadebois, on ne peut pas, selon moi, le proposer à Sergi Lopez. Je mefaisais la réflexion avec ma copine Cathy après le film, le rôle de Jacky serait en effet parfait pour un de ces acteurs dont le corps peut crever l'écran, à l'aune des Gérard Depardieu, Olivier Gourmet, Grégory Gadebois, et probablement quelques autres, mais pas à Sergi Lopez.
Je n'ai pas cru un instant à son personnage, même entouré par une distribution des autres rôles parfaite. Sergi Lopez se contraint à en faire des caisses, comme s'il était à la course au César. Ici, selon le réalisateur, Sergi Lopez est supposé être comme le Patrick Dewaere de "Série Noire" d'Alain Corneau : on croit cauchemarder en voyant le résultat. Et si la prouesse d'un acteur réside en la performance qui consiste à exhiber sa surcharge pondérale velue pour faire admettre qu'il est une sorte de Jean Valjean, c'est que je n'ai pas compris ce qu'est le cinéma, ce qu'est un comédien, ce que sont les 150-200 films que je vois chaque année depuis plus de 25 ans dans les salles obscures.
Voilà ce qui pour moi gâche le film : une grave erreur de casting. Pour autant, je ne jette pas le bébé avec l'eau du bain. Je comprends les références à "Mud" de Jeff Nichols et à "Beyond the Pines" de Derek Gianfrance, et je reconnais que cela se voit à l'écran, de façon réussie, car les images sont superbes, surtout les beaux paysages du Sud-Ouest de la France.
Ce village, un peu comme celui de la série "Le Prisonnier", est filmé comme une prison dont les personnages ne peuvent pas sortir (à l'exception du jeune Romain qui veut devenir comédien...), et l'ambiance étouffante qui en résulte est bien retranscrite.
Au final, si j'ai pris plaisir à regarder les images, notamment à admirer les paysages, à comprendre ce climat étouffant, à apprécier le jeu de Céline Salette, Éric Cantonna, Romane Bohringer et Guillaume Gouix (il faut le voir se promener avec son petit short en jean et son bandana rouge autour du cour !) je déplore vivement la présence de Sergi Lopez qui gâche tout ce qu'il pourrait y avoir de tragédie grecque matinée de western, qui proposerait un affrontement Hector/Achille puissant qui ne porterait pas à sourire, ni surtout, à rire.
Enfin, là c'est le féministe résolu qui parle, je n'ai pas aimé les rôles qui sont dévolus aux femmes (victimes impuissantes), alors que l'action est supposée se dérouler en 1984, que le réalisateur confine dans une France regrettablement rétrograde, voire rance.

Critique de Les Rois du Monde par Critique Chonchon

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