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vendredi 22 novembre 2024

11.10 - MON AVIS SUR LE FILM LA CHATTE A DEUX TETES DE JACQUES NOLOT (2002)

 


Vu le film La Chatte à Deux Têtes de Jacques Nolot (2002) avec Jacques Nolot Vittoria Scognamiglio Sébastien Viala Olivier Torres Lionel Goldstein Frédéric Longbois Jean Louis Coquery Fouad Zeraoui et quelques anonymes courageux (Interdit au moins de 18 ans)

Dans un cinéma pornographique de Pigalle, une histoire d'amour alambiquée commence entre la caissière, le jeune projectionniste et un homme d'une cinquantaine d'années

Le tournage a duré trois semaines, il s'est déroulé dans l'ancien cinéma porno Le Méry, situé place de Clichy1. Plusieurs scènes diffusées sur l'écran de cinéma dans le film sont des extraits de films pornographiques préexistants

La Chatte à deux têtes (2002) de Jacques Nolot est une œuvre singulière et audacieuse qui explore des zones rarement abordées au cinéma. Situé presque exclusivement dans un cinéma porno gay de la place Clichy, le film brouille les frontières entre fiction, autobiographie et documentaire. Nolot, à travers sa caméra crue et souvent impitoyable, nous plonge dans un microcosme marginal et clandestin où les spectateurs viennent chercher bien plus que des images érotiques : une échappatoire temporaire à la solitude et à la vacuité de leur existence.

Ce lieu, presque un personnage à part entière, devient le théâtre d’interactions brèves mais intenses, souvent dénuées de véritable humanité. Les dialogues, minimalistes et parfois brutaux, révèlent des personnages abîmés par la vie. Chacun vient ici pour des raisons propres, mais un sentiment commun d'isolement et de désespoir les unit. Les relations se limitent souvent à des échanges charnels sans lendemain, et les rares conversations sont empreintes d’une mélancolie palpable.

Le choix de Nolot de montrer les corps sans fard, dans leur vérité et parfois leur disgrâce, s’inscrit dans une démarche artistique qui refuse l’embellissement ou l’artifice. Ce cinéma est un espace de mise à nu, au propre comme au figuré, où l’on entrevoit des fragments de vies souvent invisibles ou taboues. La mise en scène, quasi naturaliste, et l’éclairage sombre participent à l’atmosphère oppressante et claustrophobique du film.

En arrière-plan, le film questionne subtilement le rapport des hommes à leur sexualité, à leur corps, et à la vieillesse, un sujet particulièrement rare dans le cinéma contemporain. À travers des détails épars, Nolot convoque ses souvenirs et ses propres expériences en tant qu'habitué de ces lieux. Le spectateur est invité à devenir témoin de ces instants de vérité brute, sans jugement ni filtre.

Cependant, La Chatte à deux têtes n’est pas un film facile d’accès. Certains pourraient être rebutés par sa frontalité ou par l’absence de véritable intrigue narrative. Nolot ne cherche pas à séduire, mais à montrer. Le rythme, volontairement lent, amplifie le sentiment de répétition et de vide, ce qui peut parfois créer une certaine lassitude. Pourtant, c’est précisément dans cette monotonie et cette authenticité que réside la force du film : il offre une fenêtre sur des existences en marge, souvent ignorées ou méprisées.

L’une des particularités du film réside dans l’absence quasi totale de femmes biologiques, bien qu’une présence féminine transgenre soit suggérée à travers des personnages incarnant une autre forme de féminité. Cela accentue l’idée d’un monde à part, un univers presque exclusivement masculin, où les émotions sont cachées sous une façade de virilité ou de détachement.

La Chatte à deux têtes est une œuvre rare, à la fois crue et mélancolique, qui transcende le cadre du cinéma porno pour devenir une méditation sur la solitude, le désir, et l’humanité des marginaux. Nolot ne cherche pas à faire plaisir ni à adoucir son propos, mais il réussit à capturer une vérité qui, pour certains, peut résonner profondément. Un film exigeant, mais d’une sincérité désarmante.

NOTE : 11.10

FICHE TECHNIQUE


DISTRIBUTION

 

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