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dimanche 26 janvier 2025

16.80 - MON AVIS SUR LE FILM LE GAUCHER DE ARTHUR PENN (1958)

 


Vu le film Le Gaucher de Arthur Penn (1958) avec Paul Newman Lita Milan John Dehner Hurd Hatfield James Congdon Colin Keith-Johnston  James Best John Dierkes Robert Anderson

William Bonney dit Billy the Kid  errant épuisé dans le désert, est recueilli par un éleveur, J.H. Tunstall, homme juste et nourri de lectures bibliques qui le prend en affection. Un peu plus tard cet éleveur, qui refuse l'emploi des armes, est tué dans une embuscade par quatre notables, éleveurs rivaux qui ont réussi à soudoyer le veule shérif Brady. Billy, qui arrive aussitôt sur les lieux mais ne peut que constater la mort de son protecteur, décide de le venger.

 Le Gaucher (1958), premier film d’Arthur Penn, est une relecture fascinante du mythe de Billy the Kid. Ce western atypique s'éloigne des canons classiques du genre pour s’aventurer sur le terrain de l’introspection psychologique, sublimée par l’approche méthodique de l’Actors Studio. Dès les premières scènes, on perçoit une volonté de casser l’image du bandit romantique pour révéler un Billy (interprété par Paul Newman) profondément humain, tiraillé entre ses désirs de liberté et ses instincts destructeurs. La relation ambiguë entre Billy et Pat Garrett, campé avec justesse par John Dehner, n’est pas qu’un duel entre la loi et l’illégalité : elle évoque une amitié conflictuelle, empreinte d’admiration, de trahison et d’une tension presque palpable.

Paul Newman, dans un rôle qui aurait pu revenir à James Dean, est absolument magnétique. Sa jeunesse, sa beauté désarmante et son charisme animal captent chaque instant, rappelant l’intensité de Dean dans À l’Est d’Eden. Cependant, Newman injecte sa propre sensibilité au personnage, oscillant entre arrogance juvénile et une vulnérabilité troublante. Son Billy the Kid est à la fois poète maudit et bête traquée, un cocktail irrésistible qui rend sa chute tragique encore plus poignante.

Penn, bien que bridé par le studio et finalement écarté du montage final, imprime déjà sa marque. Il déconstruit le western traditionnel, l’entraînant vers un réalisme cru, presque hormonal. Les corps se heurtent, transpirent et saignent, dans une mise en scène nerveuse et souvent magnifiée par un noir et blanc somptueux. Ce choix esthétique, audacieux à une époque où la couleur dominait, confère au film une atmosphère mélancolique, presque fantomatique. Les paysages désertiques, les visages marqués et les ombres profondes prennent un relief quasi expressionniste, comme si le destin de Billy était déjà écrit dans la poussière qu’il foule.

Malheureusement, ce film maudit, massacré au montage par le studio, n’a pas connu le succès qu’il méritait à sa sortie. Trop avant-gardiste, peut-être trop intime pour un public habitué aux westerns héroïques, il est resté dans l’ombre. Pourtant, avec le recul, Le Gaucher apparaît comme une œuvre fondatrice, annonciatrice de la modernité du western des années 60 et 70. Penn, dès ses débuts, prouve son talent pour sonder l’âme de ses personnages, donnant à cette histoire archétypale une profondeur inédite. Un bijou mal-aimé, mais d’une beauté brute et indélébile.

NOTE ; 16.80

FICHE TECHNIQUE


DISTRIBUTION

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