Vu le film (sur Canal Plus) Berlin Nobody de Jordan Scott (2024) avec Eric Bana Sadie SInk Sylvia Hoeks Jonas Dassler Sophie Rois Lara Feith Stephan Kampwirth Alexander Shubert
Installé à Berlin, le psychologue
américain Ben Monroe approfondit ses recherches sur les sectes. En parallèle,
sa fille Mazzy se rapproche d'un mystérieux jeune homme et va se retrouver en
danger. Ben va devoir tout faire pour la sauver.
Jordan Scott, en adaptant le roman
Tokyo de Nicholas Hogg, avait une opportunité intéressante de plonger dans un
thème fascinant et souvent glaçant : celui des sectes et de leur emprise
insidieuse. Malheureusement, le résultat final ne convainc que partiellement,
en grande partie à cause d’une exécution trop superficielle et d’un manque
cruel de subtilité dans le traitement de son intrigue.
Eric Bana, qui incarne ici un
psychologue venu à Berlin pour enquêter sur un cas lié à une secte, campe un
personnage d’une sobriété presque exagérée. Ce psy, censé être un professionnel
rationnel et perspicace, adopte des comportements dignes d’un agent secret
improvisé, ce qui détonne avec l’atmosphère qu’on aurait pu attendre d’une
telle histoire. Ce glissement vers une intrigue presque policière affaiblit la
crédibilité du récit. On peine à croire à ses motivations ou à ses actions,
tant elles semblent forcées et peu réfléchies.
Quant à la secte, elle constitue
l’élément central du film, mais elle reste désespérément en retrait. On ne
comprend jamais vraiment ses croyances, ses motivations ou ses méthodes
d’endoctrinement. Les sectes sont un sujet complexe, capable de susciter une
tension presque palpable, mais ici, elles ne semblent être qu'un prétexte pour
alimenter une intrigue linéaire et convenue. Ce manque de développement
approfondi nuit gravement à l’immersion, et le spectateur n’est jamais vraiment
invité à comprendre les dangers que représentent ces groupes.
Le personnage de la fille du
psychologue, qui finit par se retrouver sous l’emprise de la secte, suit une
trajectoire prévisible et simpliste. On ne ressent ni la lente progression de
son isolement ni l’emprise psychologique progressive que la secte aurait pu
exercer sur elle. Tout semble se passer trop facilement et rapidement, sans que
le film prenne le temps de construire une atmosphère oppressante ou de créer un
véritable enjeu dramatique.
Visuellement, Berlin Nobody ne manque
pas de qualités : la photographie froide et clinique de Berlin contribue à
instaurer une ambiance distanciée, presque déshumanisée, qui aurait pu
renforcer l’aspect angoissant du sujet. Mais là encore, cet atout est sous-exploité.
La réalisation manque d’audace, se contentant d’une mise en scène trop sage qui
ne parvient jamais à susciter une vraie tension.
Eric Bana, habitué des rôles disparates
et souvent improbables, désormais sorte de mercenaire du cinéma passant d’un
projet à un autre sans cohérence particulière, livre ici une prestation honnête
mais sans éclat. Son personnage manque de profondeur, et l’on peine à
s’attacher à lui ou à comprendre ses motivations. Quant aux seconds rôles, ils
peinent à sortir de leur fonction de simples faire-valoir, ce qui renforce
l’impression d’un scénario écrit sans grande conviction.
Berlin Nobody est un film qui avait un
vrai potentiel thématique mais qui passe à côté de son sujet. En n’offrant ni
une plongée psychologique réaliste dans le monde des sectes ni un thriller
haletant, il reste trop tiède pour captiver pleinement. Tout semble trop
simple, trop rapide, trop convenu pour qu’on puisse vraiment s’intéresser aux
personnages ou à leur sort. Un rendez-vous manqué, donc, qui laisse le
spectateur sur sa faim et donne envie de se replonger dans le roman original
pour retrouver la complexité que le film n’a su retranscrire.
NOTE : 7.10
FICHE TECHNIQUE
- Réalisation : Jordan Scott
- Scénario : Jordan Scott, d'après le roman Tokyo de Nicholas Hogg (en)
- Musique : Volker Bertelmann
- Décors : Sebastian Soukup
- Costumes : Brie Harris
- Photographie : Julie Kirkwood
- Montage : Rachel Durance
- Production : Jonas Katzenstein, Maximilian Leo, Georgina Pope, Michael A. Pruss et Ridley Scott
- Producteurs délégués : Justin Alvarado-Brown, Eric Bana, Céline Dornier, Frédéric Fiore Kenji Isomura
- Coproducteurs : Carlotta Löffelholz, Rusta Mizani et Simon B. Stein
- Sociétés de production : Scott Free Productions, Logical Pictures et Augenschein FilmProduktion
- Société de distribution : Vertical (États-Unis)
- Eric Bana (VFB : Karim Barras) : Ben Monroe
- Sylvia Hoeks (VFB : Delphine Moriau) : Nina
- Sadie Sink (VFB : Sofia Abouatmane) : Mazzy
- Jonas Dassler (VFB : Maxime van Santfoort) : Martin
- Sophie Rois (VFB : Fabienne Loriaux) : Hilma
- Stephan Kampwirth (de) (VFB : Simon Duprez) : Max
- Lara Feith (de) (VFB : Marie Du Bled) : Lotte
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