Vu le film Les Perles de la Couronne de Sacha Guitry et Christian-Jaque (1937) avec Sacha Guitry Raimu Jacqueline Delubac Arletty Yvette Pienne Renée Saint Cyr Lynn Harding Lisette Lanvin Marguerite Moreno Claude Dauphin Jean Louis Barrault Marcel Dalio et Pauline Carton
Ecrivain
et historien, Jean Martin raconte à son épouse l'histoire des fameuses perles
offertes par le Pape Clément VII à la reine Marie Stuart. Dérobées ou
disparues, ces perles ont connu un drôle de parcours. Un parcours que Jean
Martin se met en tête de reconstituer.
Les
Perles de la Couronne
(1937) est une œuvre qui incarne à merveille l’esprit et le style inimitable de
Sacha Guitry, cet auteur, metteur en scène et acteur qui savait raconter
l’Histoire de France avec une légèreté exquise et une verve irrésistible. Ce
film, à la fois comédie historique et récit d’aventures, s’amuse à suivre le
périple de quatre perles mythiques, depuis leur origine jusqu’à leur
mystérieuse disparition. En racontant leur voyage à travers les siècles, les
mains des puissants ou des gredins, Guitry nous plonge dans une fresque où
l’humour et l’ironie le disputent à une certaine mélancolie.
Guitry,
fidèle à lui-même, adopte ici une forme narrative éclatée et ludique, mêlant
épisodes historiques et dialogues incisifs. Il joue plusieurs rôles, comme à
son habitude, démontrant une fois encore son talent pour incarner des figures
historiques ou fictives avec une aisance déconcertante. Aux côtés de ses
fidèles complices Jacqueline Delubac, Raimu, et Arletty, il construit un
univers où les mots fusent comme des flèches, où l’esprit prime sur la
vraisemblance. Ses partenaires sont impeccables, apportant chacun une touche
unique : la grâce espiègle de Delubac, le panache truculent de Raimu, et le
charme narquois d’Arletty enrichissent le tableau d’une fantaisie irrésistible.
L’un
des charmes du film réside dans la diversité des décors et des époques
traversées : de la Renaissance italienne aux salons de Versailles, en passant
par les intrigues de cour et les trahisons dignes des meilleurs romans
d’aventure. Guitry démontre un art consommé de l’ellipse et du détail,
parvenant à donner vie à ces siècles passés tout en gardant un regard moqueur
sur les ambitions humaines. La perle devient un prétexte pour explorer les
failles des puissants, les jeux de pouvoir, et la frivolité des vanités
humaines.
Les
dialogues ciselés, empreints de cette théâtralité qui est la signature de
Guitry, regorgent de bons mots et de réflexions piquantes sur l’amour, le
pouvoir et le destin. Loin d’être une simple leçon d’histoire, Les Perles de
la Couronne est une méditation joyeuse sur le passage du temps et la
fugacité des choses. La morale implicite du film, si tant est qu’il y en ait
une, semble nous rappeler que derrière les trésors et les légendes, il n’y a
que des hommes, avec leurs faiblesses et leurs rêves.
Sacha Guitry construit Les Perles de la Couronne
comme un récit picaresque où l’on suit quatre perles d’une rare beauté,
réputées pour avoir appartenu aux couronnes des plus grands monarques. La
légende raconte que ces perles auraient été extraites d’une coquille
exceptionnelle et, dès leur découverte, elles deviennent les protagonistes
d’une série d’aventures à travers différentes époques et lieux emblématiques.
Le film débute par une évocation de François Ier, amateur
d’art et de merveilles, qui reçoit l’une des perles. Elle passe ensuite de main
en main, chacune incarnant une figure emblématique ou un destin historique
particulier : Henri VIII d’Angleterre, qui ne rechignait pas à accumuler les
joyaux, et Catherine de Médicis, grande protectrice des arts et collectionneuse
de trésors, en sont quelques-uns. La richesse du scénario réside dans cette
capacité à mêler des personnages historiques authentiques et des figures
fictives pour donner vie à ces épisodes avec une ironie savoureuse. Chaque
époque est l’occasion pour Guitry de tourner en dérision les puissants, de
souligner leurs ambitions futiles et leur quête obsessionnelle de richesse.
Un des moments forts du film est la scène où la perle
arrive à la cour de Versailles, sous Louis XV. Guitry ne manque pas
d’égratigner le faste inutile et les intrigues frivoles de la cour royale. Le
voyage se poursuit à travers la Révolution française, où les trésors de la
couronne sont dispersés, certains volés par des escrocs, d’autres perdus à
jamais. Finalement, une des perles finit dans les mains d’un obscur bijoutier
londonien, tandis que la dernière, dans un clin d’œil malicieux, semble
destinée à disparaître au fond de l’océan, peut-être sur le collier d’une
passagère du Titanic.
Un des traits distinctifs de Sacha Guitry est son
attachement à une troupe de comédiens fidèles, avec qui il forme une véritable
famille artistique. Dans Les Perles de la Couronne, il réunit plusieurs
de ses collaborateurs réguliers, qui apportent chacun une touche particulière à
l’œuvre.
Épouse et muse de Guitry, Delubac incarne plusieurs rôles
féminins avec une élégance et une légèreté remarquables. Elle brille notamment
dans les scènes se déroulant à la cour de Versailles, où elle campe une dame de
la noblesse avec une grâce espiègle. Sa présence apporte une touche de féminité
lumineuse, contrastant avec le cynisme des dialogues de Guitry.
Moreno, une des actrices fétiches de Guitry, interprète
plusieurs rôles avec son talent habituel pour incarner des figures autoritaires
et capricieuses. Saturnin Fabre, quant à lui, joue un ecclésiastique
opportuniste, donnant lieu à quelques scènes mémorables où il rivalise de
malice avec les puissants.
NOTE : 12.80
FICHE TECHNIQUE
Réalisation : Sacha Guitry et Christian-Jaque (collaboration technique)
Scénario et dialogues : Sacha Guitry
Assistant réalisateur : Guy Lacourt et Marc Fossard
Direction artistique : Jean Barthelemy Perrier
Costumes : Georges K. Benda
Photographie : Jules Kruger, assisté de Marc Fossard
Montage : William Barrache, Myriam
Son : Marcel Courmes
Musique : Jean Françaix
Production : Serge Sandberg
Société de production : Cinéas, Imperial Films Production
Société de distribution : Films sonores Tobis, Télédis
DISTRIBUTION
- Sacha Guitry : Jean Martin, François Ier, Barras et Napoléon III
- Raimu : l'industriel du Midi
- Aimé Simon-Girard : Henri IV
- Jean-Louis Barrault : Bonaparte
- Romuald Joubé : Jean Clouet
- Claude Dauphin : le prisonnier italien
- Lyn Harding : John Russell, Henry VIII et l'aide de camp de la reine Victoria
- Ermete Zacconi : Clément VII
- Enrico Glori : Giovanni Riboldi, le camérier du pape
- Humberto Catalano : Giovanni Spanelli
- Marcel Dalio : le ministre éthiopien
- Émile Drain : Napoléon Ier
- Gaston Dubosc : le grand-duc
- Andrews Engelmann : James, le voleur
- Robert Pizani : Talleyrand
- Jean Coquelin : le vieux bourgeois
- Pierre Magnier : le vieux lord
- Pierre Juvenet : l'expert-joaillier
- Henri Crémieux : le commissaire-priseur
- Georges Prieur : Tallien
- Enrico di Mazzei : le révolutionnaire qui chante
- Ponzio : le maçon qui chante
- Robert Seller : le prisonnier français
- Léon Walther : le duc Anne de Montmorency
- Georges Grey : le Hongrois jeune
- Derrick De Marney : Darnley
- James Craven : Hans Holbein
- Jacques Berlioz : le cardinal italien
- Anthony Gildès : le Hongrois âgé
- Julien Clément : le gigolo
- Percy Marmont : le cardinal Wolsey
- Lautner : Titien
- Arletty : la reine d'Abyssinie
- Cécile Sorel : la Française du Grand Siècle
- Jacqueline Delubac : Françoise Martin, Marie Stuart et Joséphine de Beauharnais
- Yvette Pienne : Marie Tudor, Élisabeth Ire et la reine Victoria
- Simone Renant : la comtesse du Barry
- Théo Légitimus : Zamor, page de la Du Barry
- Barbara Shaw : Anne Boleyn
- Colette Borelli : Catherine de Médicis enfant
- Paulette Élambert : Catherine de Médicis adolescente
- Marguerite Moreno : Catherine de Médicis âgée et l'impératrice Eugénie (en 1914)
- Raymonde Allain : l'impératrice Eugénie (en 1865)
- Huguette Duflos : la reine Hortense
- Lisette Lanvin : la petite amie de l'industriel
- Germaine Aussey : Gabrielle d'Estrées
- Jacqueline Pacaud : Jane Seymour
- Renée Saint-Cyr : Madeleine de La Tour d'Auvergne
- Pauline Carton : la femme de chambre du Normandie
- Damia : la femme du peuple
- Marie Leconte : la femme dans la misère
- Violet Farebrother : la vieille lady
- Rosine Deréan : la jeune Anglaise
- Laurence Atkins : la duchesse d'Étampes et Madame Tallien
- Oléo : la cocotte
- Marfa Dhervilly : la vieille courtisane
- Eugénie Fougère : la vieille coquette
- Lillie Grandval : la soprano-léger
- Paulette Dynalix : le petit rat
- Anaclara : la Négresse
- Gary Garland : une passagère sur le Normandie
- Marthe Mussine : une passagère sur le Normandie
- Annie Rozane : la madone espagnole
- Gilberte Lauvray : la petite Française
- Marie-Claire Pissarro : la servante de Madame du Barry
- Géo Forster : un muscadin
- Darling Légitimus : la femme noire
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