Il est soudain comblé jusqu'à l'étourdissement : Alicia (Virginie Efira épatante), une actrice célèbre qu'il admire au plus haut pont, devient sa compagne. Tout se complique quand il rencontre Caprice (Anais DEmoustier brillamment agaçante), une jeune femme excessive et débordante qui s'éprend de lui. Entretemps son meilleur ami, Thomas de rapproche d'Alicia.
Si dans sa globalité le cinéma hexagonal pèche par médiocrité, parce qu'il produit des comédies ringardes pipi-caca à la chaîne, ou des films qui lorgnent du côté de Jean Pierre Melville sans lui arriver à la cheville, il sait nous proposer quelques films très honorables portés par des réalisateurs intéressants.
Dans des styles très variés, Alain Guiraudie, Xavier Beauvois, Laurent Canter, Benoit Jacquot, Bertrand Bonello, Sébastien Lifshitz, Cyril Mennegun etc .... et aujourd'hui Emmanuel Mouret.
Nous lui devons notamment "Changement d'adresse'" en 2006, Un baiser s'il vous plaît en 2007, Fais-moi plaisir en 2008, L'art d'aimer en 2011, des joyaux marivaudage qui savent rendre hommage, en vrac, au théâtre, à Rohmer, à Truffaut, à Woody Allen, à Buster Keaton (Emmanuel Mouret encombré de sa jambe dans le plâtre, un savoureux moment de cinéma) à Pierre Richard, à Jerry Lewis ...
Comme dans la plupart de ses films, Emmanuel Mouret inscrit "Caprice" dans un ton légèrement décalé par rapport au réel. C'est un postulat très rare aujourd'hui, où tout semble devoir être tiré de "faits réels", comme si le cinéma n'était que le relais de faits divers coupant court à toute création , à toute imagination.
Alors, certes, il faut réellement aimer le cinéma pour apprécier le ton décalé qui n'a pas la vulgarité d'un journal de 20h00. C'est pourtant un bien petit effort au regard de la récompense que l'on reçoit. Car sous se airs un peu bonhomme et joyeux, c'est aussi un cinéma qui narre les illusions perdues.
Le rythme laisse le spectateur respirer (la désormais fameuse scansion lente et détachée d'Emmanuel Mouret...) et participe à la description intelligente de chaque protagoniste. Si chacun à sa place, des rôles les plus importants aux rôles plus secondaires, nul n'est bâclé : Virginie Efira, Anais Desmoutier, Laurent Stocker, mais aussi Thomas Blanchard, Mathilde Warnier et Olivier Cruveiller ont le loisir de laisser leur rôle "s'exprimer". La direction d'acteurs est impeccable.
Mouret, célèbre le sous-texte, incite ses personnages à conférer d'avantage d'importance à l'introspection qu'à l'expression, bannit le cynisme de ses caractères qui émeuvent tant ils échappent aux stéréotypes. Et parvenir à faire fi des stéréotypes est en soit déjà une prouesse.
Un humour à la Sacha Guitry, tout à fait revendiqué, qui fait vivre des dialogues pleins de fraîcheur et de charme. Non, on ne rit pas aux éclats, on ne pleure pas aux larmes, et c'est très bien, car jamais le spectateur ne se sent manipulé, et peut se laisser aller à cette légèreté.
Beau marivaudage plus mature mais toujours aussi fantaisiste , pétillant et décalé. Oui,c'est ça, du cinéma "Bulle de champagne", intelligent et pétillant.
Et je me dis, tristement peut-être, que nous sommes de plus en plus rares à concevoir que le cinéma ne se fait pas qu'à boulets rouges agressifs à coups de convictions de pacotilles, et qu'il peut être, parfois, léger comme une bulle de savon.
La fausse gravité des gens dans convictions m'assomme de plus en plus, et j'entends déjà les piteux donneurs de leçon, soit refuser ce cinéma-là, soit maugréer ..;
"Caprice " ou la beauté modeste d'un pétale.
Critique Chonchon
Caprice de Emmanuel Mouret avec Anais Desmoustiers, Laurent Stocker, Virginie Efira et Emmanuel Mouret.
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