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mercredi 5 février 2025

4.10 - MON AVIS SUR LE FILM IN A VIOLENY NATURE DE CHRIS NASH (2025)


Vu le film (sur le site Insomnia via My Canal) In A Violent Nature de Chris Nash (2025) avec RY Barrett Andrea Pavlovic Cameron Love Reece Presley Liam Leone Charlotte Creagham Sam Roulston Alexandre Olivier Lea Rose Sebastianis

Un groupe d'amis - Kris, Colt, Troy, Evan, Ehren, Brodie et Aurora - découvrent un médaillon accroché aux restes d'une tour à incendie . L'un d'eux, Troy, l'empoche. Quelques instants plus tard, le cadavre de Johnny surgit du sol. Enragé, il commence sa recherche du médaillon et marche dans les bois. Il s'arrête à la vue d'un cadavre de renard en décomposition et entend une dispute à proximité entre deux hommes, dont l'un a posé les pièges qui ont tué le renard. Johnny entre dans la maison de l'homme, où il voit un collier qu'il confond avec son médaillon, déclenchant un bref souvenir de son père. Le propriétaire revient bientôt, mais est horrifié par Johnny et s'enfuit. Dans les bois, il se coince la jambe dans son propre piège à ours et est tué par Johnny. Plus tard, Johnny entend une voiture au loin et la poursuit.

Le Grand Prix du Festival de Gérardmer 2024 a couronné In A Violent Nature de Chris Nash, un film d’horreur qui divise fortement. Un choix surprenant tant cette œuvre semble s’apparenter à une coquille vide, où la radicalité de la mise en scène ne parvient jamais à justifier l’absence totale de fond.

Le pitch ? Un tueur masqué marche dans la forêt et massacre méthodiquement les personnes qu’il croise. Voilà. Pas de véritable intrigue, pas de construction dramatique, pas d’enjeu. Simplement un slasher ultra-minimaliste, où la caméra adopte le point de vue quasi contemplatif du meurtrier. Ce concept, qui pourrait être une idée de mise en scène intéressante, devient rapidement un exercice de style aussi creux que prétentieux.

Sur le plan visuel, le film privilégie de longs plans fixes et des mouvements lents, accentuant une atmosphère pesante. Mais cette approche finit par tourner à vide, car elle ne construit ni tension, ni véritable angoisse. L’absence de musique renforce ce sentiment de réalisme froid, mais au lieu de plonger le spectateur dans une terreur immersive, elle provoque surtout l’ennui. Le gore, omniprésent, est son seul véritable argument, avec des meurtres filmés de manière clinique et explicite, rivalisant d’inventivité dans la brutalité. Pourtant, cette violence extrême ne repose sur rien. Contrairement à des films comme Halloween de Carpenter ou Terrifier 2, qui exploitent le gore au service d’un malaise grandissant, ici, il ne sert qu’à alimenter un spectacle de massacre sans âme.

Et les dialogues ? Il n’y en a quasiment pas, et ceux qui existent sont d’une pauvreté affligeante, rappelant parfois le niveau d’un mauvais film porno (en tous cas sur la VF sur le site) . On pourrait voir dans ce mutisme une volonté d’épurer le genre, de revenir à l’essence du slasher primitif, mais il ne reste au final qu’une expérience désincarnée et vide. L’absence totale d’explication ou de développement du tueur pourrait fonctionner dans un film plus construit, mais ici, elle ne fait que souligner l’indigence du scénario.

Alors pourquoi un Grand Prix ? Mystère. Le jury a-t-il voulu saluer une audace formelle ? Peut-être, mais à force d’expérimentation creuse, le film rate son effet. En voulant s’affranchir des codes classiques du slasher, In A Violent Nature finit par ne rien raconter du tout.

Un film qui pourra séduire une niche de fans extrêmes du genre, mais dont le vide narratif et l’obsession pour la violence gratuite le rendent indigeste. Un prix immérité, à moins que l’état d’ébriété du jury n’explique cette anomalie.

NOTE : 4.10

FICHE TECHNIQUE

  • Réalisation et scénario : Chris Nash
  • Costumes : Melissa Bessey
  • Photographie : Pierce Derks
  • Montage : Alex Jacobs
  • Production : Shannon Hanmer, Peter Kuplowsky,
Producteur délégué : Casey Walker
Producteur associé : Austin Birtch
  • Société de production : Shudder Films
  • Société de distribution : Shudder Films (États-Unis, vidéo à la demande), IFC Films (États-Unis, cinéma)

DISTRIBUTION

  • Ry Barrett : Johnny
  • Andrea Pavlovic : Kris
  • Cameron Love : Colt
  • Liam Leone : Troy
  • Lauren-Marie Taylor :
  • Reece Presley : le Ranger

14.10 - MON AVIS SUR LE FILM JOKER DE TODD PHILIPPS (2019)


Vu le film Joker de Todd Philipps (2019 ) avec Joaquin Phoenix Robert de Niro Zazie Beetz France Conroy Hannah Gross Shea Whigam Bill Camp Brett Cullen Frank Wood Douglas Hodge Brian Tyree Henry Justin Theroux

Arthur Fleck souffre de troubles mentaux le poussant, notamment, à rire involontairement et souvent à des moments inopportuns. Il rêve de devenir humoriste, sa mère Penny lui ayant assigné depuis toujours pour mission de « donner le sourire et de faire rire les gens dans ce monde sombre et froid ». En fait, il ne ressent que tristesse, même lorsqu'il travaille en tant que clown pour subvenir à ses besoins et à ceux de sa mère. Gotham City est au bord du chaos, en proie au chômage, à la criminalité et à la crise financière, laissant une bonne partie de la population dans la misère.

Todd Phillips livre avec Joker (2019) une œuvre à la fois fascinante et dérangeante, qui déconstruit le mythe du clown criminel en plongeant dans la psyché d’Arthur Fleck, un homme broyé par la société. Si la folie est présente tout au long du film, elle n’est pas une explosion soudaine, mais une lente dérive, une érosion progressive de la raison qui nous enferme dans le point de vue de son protagoniste.

Le film est sublimé par une mise en scène froide et méticuleuse, qui contraste avec la performance explosive de Joaquin Phoenix. La photographie de Lawrence Sher baigne Gotham dans des teintes jaunâtres et verdâtres, évoquant un monde malade, en décomposition. Chaque plan est pensé pour accentuer l’isolement du personnage : les cadres souvent étouffants, les espaces vides qui l’écrasent, et ces longs couloirs sombres où Arthur semble toujours en décalage. La caméra, souvent à l’épaule, épouse ses mouvements erratiques, renforçant l’impression d’instabilité. Le travail sonore est tout aussi essentiel : la musique de Hildur Guðnadóttir, avec ses violoncelles lancinants, pèse comme un fardeau sur l’ensemble du film, amplifiant la tension et le désespoir du personnage.

Mais si Joaquin Phoenix livre une performance hallucinée, captant à la perfection la fragilité et la rage d’Arthur, il ne faut pas pour autant éclipser Robert De Niro. Son interprétation de Murray Franklin, un animateur cynique et condescendant, est d’une justesse remarquable. Contrairement à certaines de ses comédies où il tend à tomber dans la caricature, il offre ici une prestation sobre, jouant sur la retenue et l’ambiguïté. En incarnant une figure de la télévision qui humilie Arthur avant de se retrouver face à lui, il boucle une boucle symbolique avec The King of Comedy de Scorsese, où il tenait le rôle d’un comique raté cherchant la reconnaissance.

Toute cette maîtrise technique, du cadre à la musique en passant par le jeu d’acteurs, fait de Joker un film puissant, mais profondément troublant dans son message. En peignant Gotham comme une poudrière où la violence naît de l’injustice sociale, Todd Phillips efface les repères moraux habituels de l’univers de Batman. Là où Christopher Nolan faisait du Joker un agent du chaos absolu, Phillips en fait une victime qui devient bourreau, troublant ainsi la frontière entre tragédie et apologie de la violence.

Le film est-il un chef-d’œuvre ? Probablement. Mais il laisse une sensation amère, comme si, au lieu de nous offrir une réflexion, il nous forçait à accepter l’inévitable basculement d’Arthur Fleck, sans jamais nous donner d’alternative.

NOTE : 14.10

FICHE TECHNIQUE


DISTRIBUTION


mardi 4 février 2025

7.20 - MON AVIS SUR LE FILM ICI ET LA-BAS DE LUDOVIC BERNARD (2024)


 Vu le film Ici et Là-bas de Ludovic Bernard (2024) avec Ahmed Sylla Hakim Jemili Hugo Becker Eric Ebouaney Annelise Hesme Florence Muller Luiza Benassia Assia Said Assani Ibrahima Ba

Installé depuis 15 ans au Sénégal, Adrien mène une vie paisible au côté de sa compagne Aminata. Lorsqu'il est renvoyé en France pour un problème de visa, il débarque chez Sékou, un cousin éloigné de sa femme, qui travaille comme commercial à Paris. Contraint par sa patronne d'aller en région à la rencontre de clients, Sékou n'a d'autre choix que d'embarquer ce drôle de cousin dans un tour de France qui leur réserve bien des surprises.

Ici et là-bas de Ludovic Bernard s’inscrit dans la lignée des comédies françaises qui misent sur un duo contrasté pour générer des situations amusantes.  

Le principal atout du film réside dans la dynamique de son duo central. Hakim Jemili, avec sa gouaille et son humour spontané, insuffle une vraie fraîcheur au film, tout en rappelant un peu le style de Jonathan Cohen avec ses répliques vives et son ton décalé. Face à lui, Ahmed Sylla incarne un personnage plus posé, parfois maladroit, mais avec une sincérité qui rend leur interaction particulièrement attachante. Ensemble, ils forment un duo efficace, qui équilibre bien les moments de comédie et les instants plus touchants.

Sur le fond, Ici et là-bas ne révolutionne pas le genre de la comédie, mais son histoire simple et son rythme fluide permettent de passer un moment agréable. Le film joue sur les différences culturelles, les quiproquos et les situations improbables qui naissent de cette rencontre inattendue. Certaines scènes restent prévisibles, mais l’humour et l'énergie des deux comédiens emportent le spectateur.

Ludovic Bernard, après L’Ascension, livre ici un film plus léger, sans grande ambition mais qui réussit à divertir. Bien que le scénario manque parfois de profondeur, l’alchimie entre les deux acteurs, l'humour et quelques bons moments d'émotion permettent à Ici et là-bas de remplir son rôle de comédie estivale, distrayante sans être mémorable.

NOTE : 7.20

FICHE TECHNIQUE

  • Réalisation : Ludovic Bernard
  • Scénario : Sarah Kaminsky et Kamel Guemra
  • Musique : Guillaume Roussel
  • Décors : Mélissa Ponturo
  • Costumes : Stéphanie Watrigant
  • Photographie : Vincent Richard Marquis
  • Son : Amaury de Nexon, Gaël Nicolas et Jerôme Wiciak
  • Montage : Vincent Zuffranieri
  • Production : Philippe Rousselet, Jonathan Blumental et Patrice Arrat
  • Sociétés de production : NewenStudioc

DISTRIBUTION

  • Ahmed Sylla : Sékou
  • Hakim Jemili : Adrien
  • Hugo Becker : Julien Bergeron
  • Luiza Benaïssa : Nora
  • Annelise Hesme : Caroline Berthier
  • Eriq Ebouaney : Professeur Ibrahima
  • Assia Said Hassani : Camille-Khadija
  • Aaron Zach : Louis-Djibril
  • Seynabou Gueye : Aminata
  • Boubacar Kabo : Aliou
  • Étienne Guillou-Kervern : Erwan Le Plouadec
  • Ibrahima Ba : le patron du Barbershop
  • Florence Muller : Médecin (gare routière)
 

13.80 - VU LE FILM VICE DE ADAM MCKAY (2018)

 


Vu le film Vice de Adam McKay (2018) avec Christian Bale Amy Adams Steve Carell Sam Rockwell Alison Pill Colyse Harger Lily Rabe Jesse Plemons Tyler Perry Justin Kirk

Dans les années 1960, le jeune Dick Cheney préfère se battre et traîner dans les bars plutôt que de suivre ses études. Alors qu'il vit de petits boulots, son épouse Lynne, qui veut atteindre par son intermédiaire les sommets que sa condition de femme lui interdit, le somme de se ressaisir et de mettre fin à sa débauche après être allée le chercher une deuxième fois au poste de police pour ivresse sur la voie publique. Après un stage, Dick décroche, au service de Donald Rumsfeld, un poste d'assistant à la Maison-Blanche dès 1969 durant la présidence de Richard Nixon. Il y découvre sa vocation : agir au plus près du pouvoir tout en restant dans l'ombre. Profitant de l'affaire du Watergate qui écarte plusieurs Républicains du pouvoir, il devient ensuite chef de cabinet de Gerald Ford.

Adam McKay, connu pour ses comédies satiriques, s’attaque à un sujet bien plus sombre avec Vice (2018), un film qui dissèque la carrière de Dick Cheney, l’un des personnages les plus influents – et opaques – de la politique américaine contemporaine. Entre biopic et satire grinçante, McKay nous entraîne dans les coulisses du pouvoir avec un regard acéré et un style déstructuré, qui déconcerte autant qu’il fascine.

Le film retrace l’ascension de Cheney, de son poste de stagiaire à la Maison-Blanche jusqu’à celui de vice-président sous George W. Bush. McKay opte pour une mise en scène éclatée, alternant scènes décalées, montages frénétiques et ruptures du quatrième mur. Cette approche, déjà employée dans The Big Short, pousse Vice à la lisière du documentaire-fiction et de la farce politique. On ne sait jamais vraiment si l’on assiste à un portrait sérieux ou à une caricature acerbe, tant le ton oscille entre le drame feutré et la parodie mordante.

Christian Bale, méconnaissable sous une transformation physique impressionnante, livre une performance nuancée et fascinante. Il incarne un Cheney impénétrable, calculateur et froid, un homme dont les silences en disent souvent plus que ses rares éclats de voix. Son interprétation est le pivot du film, lui conférant une gravité qui contraste avec l’approche plus caricaturale de certains de ses partenaires.

Steve Carell en Donald Rumsfeld et Sam Rockwell en George W. Bush semblent en revanche jouer sur un registre plus outrancier, frôlant parfois la caricature. Si leur prestation amuse et dynamise le récit, elle peut aussi donner l’impression d’une distorsion excessive de la réalité, rendant le film inégal dans son ton. Ce choix de direction d’acteurs accentue l’impression d’une œuvre qui hésite entre rigueur historique et satire acerbe.

La mise en scène de McKay, bien que brillante dans sa construction et son audace narrative, peut parfois brouiller le propos. À trop vouloir jouer sur l’ironie et la stylisation, le film risque de diluer la portée de son sujet. Pourtant, l’accumulation des faits et des décisions politiques marquantes de Cheney dessine un portrait implacable de la manière dont le pouvoir s’exerce dans l’ombre, loin des projecteurs et des discours officiels.

Vice n’est pas un film agréable à regarder, et c’est peut-être sa plus grande réussite. Il met en lumière une réalité inconfortable, celle d’un homme qui a su manipuler les rouages du pouvoir sans jamais chercher la lumière. Entre fascination et répulsion, le spectateur est pris au piège d’un récit où la frontière entre vérité et exagération se brouille constamment. Un film imparfait, mais audacieux et nécessaire.

 NOTE : 13.80

FICHE TECHNIQUE

Producteurs délégués : Megan Ellison et Jeff G. Waxman
Coproducteur : Jason George

DISTRIBUTION

16.10 - MON AVIS SUR LE FILM LE CUIRASSE POTEMKINE DE SERGEI EISENSTEIN (1925)


 Vu le film Le Cuirassé Potemkine de Sergei Eisenstein (1925) avec Grigori Alexandrov Andrei Fait Aleksandr Antonov Ivan Bobrov Vladimir Barsky Julia Eisenstein Sergei Eisenstein Constantin Isodorovitch Feldman Protopopov A. Glaouberman (Aba, le garçon tué sur l'escalier)

 

Le Cuirassé Potemkine (en russe : Броненосец «Потёмкин»Bronenossets « Potiomkine ») est un film soviétique muet réalisé par Sergueï Eisenstein, sorti en 1925.

Il traite de la mutinerie du cuirassé Potemkine au mouillage devant le port d’Odessa en 1905, de l’insurrection et de la répression qui s’ensuivirent dans la ville. Le film fut très longtemps interdit dans de nombreux pays occidentaux pour cause de « propagande bolchevique » et « incitation à la violence de classe ». Il est considéré comme l'un des plus grands films de propagande de tous les temps. Il est choisi, en 1958, comme le meilleur film de tous les temps par 117 critiques internationaux lors de l’Exposition universelle de Bruxelles1,2. Le film est entré dans le domaine public dans la plupart des pays du monde.

La révolte de l'équipage du cuirassé Potemkine, le 14 juin 1905 (27 juin dans le calendrier grégorien), pendant la révolution russe de 1905, est présentée comme précurseur de la révolution d'Octobre (1917) et du point de vue des insurgés.

Le cuirassé reproduit, dans le microcosme de son équipage, les clivages de la société russe et ses inégalités. L’une des causes de la mutinerie est la question de la nourriture. Les officiers présentés comme cyniques et cruels contraignent l’équipage à consommer de la viande avariée, alors qu’eux-mêmes maintiennent un train de vie privilégié parmi l’équipage (scène de la vaisselle, « Dieu, donne-moi mon pain quotidien »).

 

Sergei Eisenstein signe avec Le Cuirassé Potemkine (1925) une œuvre majeure du cinéma muet, un film qui transcende son époque et s’impose comme une révolution cinématographique à part entière. À travers cette fresque, il ne se contente pas de raconter une révolte militaire : il orchestre une symphonie visuelle où chaque plan devient un cri, chaque montage un choc, chaque regard un appel à l’insurrection.

L’histoire, inspirée d’un fait réel survenu en 1905, met en scène la mutinerie d’un équipage contre l’oppression et l’injustice. Lorsque les marins du Potemkine refusent de manger une viande avariée infestée de vers, la tension monte, et la révolte éclate. Ce soulèvement, d’abord un simple refus de l’inhumanité, devient un symbole de lutte contre l’oppression tsariste. Mais au-delà du récit, Eisenstein insuffle à son film une force nouvelle : le montage. Chaque séquence est montée avec une précision chirurgicale pour maximiser l’impact émotionnel et politique, créant une dynamique qui emporte le spectateur dans une spirale de tension et de tragédie.

La scène mythique des escaliers d’Odessa est sans doute l’un des moments les plus marquants de l’histoire du cinéma. Ce massacre, orchestré avec une brutalité implacable, donne à voir l’horreur d’un régime qui n’hésite pas à écraser ses propres citoyens. Le mouvement des soldats descendant implacablement, la terreur gravée sur les visages des victimes, le ralentissement tragique du landau dévalant les marches : tout concourt à une représentation implacable de la répression et de l’aveuglement du pouvoir. Ce moment, bien plus qu’une scène de guerre, devient une allégorie de la brutalité du régime tsariste.

Eisenstein excelle à magnifier la masse anonyme, transformant le peuple en véritable protagoniste du film. Contrairement aux récits classiques qui s’articulent autour d’individus, Le Cuirassé Potemkine donne la parole à une collectivité en lutte, incarnée dans des visages marqués par la douleur, la colère, l’espérance. La mer, omniprésente, est à la fois le témoin silencieux et la promesse d’un avenir nouveau.

Le film frappe aussi par son rythme effréné. En à peine plus d’une heure, il nous plonge dans un tourbillon d’émotions, nous faisant ressentir la peur, l’indignation et l’élan révolutionnaire. La musique, ajoutée après coup, n’a fait que renforcer cette puissance dramatique, rendant l’expérience encore plus immersive.

Le Cuirassé Potemkine n’est pas seulement un chef-d’œuvre du cinéma soviétique, c’est une pierre angulaire de l’histoire du cinéma mondial. Il démontre avec éclat que l’image, lorsqu’elle est portée par une vision et un langage cinématographique novateur, peut changer la perception du monde. Plus qu’un simple film de propagande, il reste une œuvre intemporelle, un manifeste de la puissance du cinéma en tant qu’art et arme politique.

NOTE : 16.10

FICHE TECHNIQUE


DISTRIBUTION

  • Acteurs anonymes :
    • un chauffeur : le médecin-major
    • un jardinier : le pope