Vu le film La Vache et le Prisonnier de Henri Verneuil (1959) avec Fernandel Bernard Musson René Havard Maurice Nasil Ellen Schwiers Albert Rémy Pierre Louis Ingeborg Schöner Benno Hoffmann
En 1943, Charles Bailly (Fernandel),
un Français prisonnier de guerre en Allemagne pendant
la Seconde Guerre mondiale, décide de s'évader
de la ferme où il est employé. Sa ruse, grossière et folle en apparence,
consiste à traverser le pays, la vache Marguerite tenue
au licol et un seau de lait dans l'autre main.
Ayant presque réussi, il se sépare de
l'animal, non sans lui avoir promis de ne plus jamais « manger de
veau ». Il se dissimule sous un train pour franchir la frontière germano-française.
Alors qu'il se retrouve à la gare
de Lunéville, il prend la fuite devant deux policiers français, et saute dans un
train qui, à son insu, est en partance pour l'Allemagne. Ce n'est que deux ans
plus tard que cet héroïque anti-héros reviendra
de captivité « comme tout le monde ».
La Vache et le Prisonnier
(1959), réalisé par Henri Verneuil, est un film qui traverse les générations,
offrant à la fois un grand récit d’aventure et une réflexion plus profonde sur
la guerre et la liberté. Ce chef-d'œuvre du cinéma français, à la fois comédie
et drame, a marqué plusieurs générations, que ce soit dans les salles obscures
ou lors des nombreuses diffusions télévisées.
Pour un enfant, c'est avant tout un
road movie bucolique et étonnant : un homme et sa vache, Marguerite, parcourant
des paysages allemands dans une fuite presque miraculeuse. Le personnage de
Charles Bailly, interprété par un Fernandel au sommet de son art, semble
bénéficier d’une chance insolente, échappant aux dangers grâce à son audace et
à un certain comique de situation. On rit de ses stratagèmes, on admire son
culot, et on s’attache à ce duo improbable, où la vache devient presque un
personnage à part entière.
Mais avec un regard adulte, le film
prend une tout autre dimension. Il rappelle une réalité plus sombre : celle des
prisonniers français envoyés en camp de travail en Allemagne pendant
l’Occupation. La légèreté du ton n’efface pas la dureté du contexte. Le courage
de Charles Bailly ne tient pas seulement à son évasion, mais aussi à son
humanité, à la manière dont il noue des liens au fil de son périple, y compris
avec des Allemands, certains se révélant bien plus compatissants que l’image
manichéenne que l’on pouvait attendre. Cela donne au film une profondeur
inattendue et une réflexion nuancée sur la nature humaine en temps de guerre.
Henri Jeanson, maître du dialogue,
apporte des répliques pleines de verve et d’émotion, sublimées par la mise en
scène fluide et sans esbroufe de Verneuil. La simplicité du récit n’est
qu’apparente : derrière l’odyssée burlesque se cache une vraie fresque humaine,
où l’amitié, la solitude, l’espoir et l’infortune se mêlent. La scène finale,
loin d’être triomphale, rappelle que même les plus beaux voyages peuvent
s’achever sur une note douce-amère.
Avec près de 9 millions d’entrées et un
succès indémodable à la télévision, La Vache et le Prisonnier s’est
imposé comme un classique du cinéma français. Fernandel y livre une de ses
performances les plus touchantes, promenant son spleen avec une douceur
infinie. Sa relation avec Marguerite é meuh autant qu’elle amuse, et c’est sans
doute cette tendresse qui, plus de 60 ans après, continue de faire battre le
cœur des spectateurs.
NOTE : 14.10
FICHE TECHNIQUE
- Réalisation : Henri Verneuil
- Scénario : d'après un récit de Jacques Antoine
- Adaptation : Henri Verneuil, Henri Jeanson, Jean Manse
- Dialogue : Henri Jeanson
- Assistant réalisateur : Ulrich Picard
- Images : Roger Hubert
- Opérateur : Adolphe Charlet
- Montage : Jacques Cuenet
- Décors : Franz Bi, Max Seefelder, Jacques Chalvet
- Musique : Paul Durand
- Son : Antoine Petitjean
- Photographe de plateau : Fred Rotzinger
- Script-girl : Lucile Costa
- Régisseur général : Harry Dettman
- Production : Da-Ma Cinematografica (Rome), Les films du Cyclope (Paris)
- Pays de production :
France -
Italie
- Chef de production : Roland Girard
- Directeur de production : Walter Rupp, René G. Vuattoux
- Distribution : Pathé Consortium
- Fernandel : Charles Bailly
- René Havard : Bussière
- Bernard Musson : Pommier
- Maurice Nasil : Bertoux
- Ellen Schwiers : Josépha dite Marlène, la fermière
- Ingeborg Schöner : Helga
- Albert Rémy : Collinet, le prisonnier du stalag
- Pierre-Louis : Hauptmann Müller, un évadé déguisé en militaire allemand
- Richard Winckler : Hauptmann Rupp, l'autre évadé
- Franziska Kinz : la mère d'Helga
- Benno Hoffmann : le garde du camp
- Heinrich Gretler : Bockmann, le fermier à la camionnette
- Til Kiwe : l'officier qui traduit
- Hugo Lindinger : le soldat qui compte les prisonniers
- Marcel Rouzé
- Franz Muxeneder (coupé au montage)
- Marguerite : la vache