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jeudi 31 juillet 2025

17.80 - MON AVIS SUR LIFE OF CHUCK DE MIKE FLANNAGAN


 Vu le film Life of Chuck de Mike Flannagan (2025) avec Tom Hiddleston Mark Hamill Jacob Tremblay Benjamin Pavak Cody Flanagan Chiwetel Ejiofor Karen Gillan Mia Sara Carl Lumbly 

Une histoire qui célèbre la vie et transcende les genres, basée sur la nouvelle de Stephen King qui relate trois chapitres de la vie d'un homme ordinaire nommé Charles Krantz, dit Chuck. 

Il y a des films qu’on écoute, d’autres qu’on regarde. Il y a ceux qu’on absorbe, qui deviennent comme des souvenirs qu’on croyait avoir oubliés. Life of Chuck fait partie de ces œuvres rares, comme une page d’album-photo qu’on ouvre au hasard pour y retrouver une vie, un éclat, un battement. 

Mike Flanagan, librement inspiré de la nouvelle éponyme de Stephen King, signe ici son film le plus intime, le plus déroutant aussi. À contre-courant de ses incursions gothiques ou horrifiques (The Haunting of Hill House, Doctor Sleep), il choisit cette fois l’épure, l’humanité et une narration en fragments qui défie la linéarité. Un film que certains spectateurs « ne comprendront pas » — parce qu’ils chercheront une intrigue, une explication — mais qu’il faut plutôt ressentir comme une onde, une chanson douce sur l’éphémère. 

L’histoire commence… par une fin. La fin du monde. Littéralement. Le ciel se fissure, les routes se délitent, les oiseaux s’éteignent. Mais dans ce chaos, surgit un visage sur les panneaux d’affichage : « Thank You, Chuck ». Qui est Chuck ? Pourquoi le monde semble-t-il mourir avec lui ? 

C’est là que la structure du film devient miraculeuse : on remonte le temps, à rebours, pour explorer la vie de Chuck à travers trois âges marquants : son agonie (Tom Hiddleston), son adolescence (Jacob Tremblay), et son enfance (Benjamin Pajak et Cody Flanagan). Chacun de ces visages dessine une facette du même homme, et de l’homme en général : celui qui danse malgré les larmes, celui qui aime, celui qui doute, celui qui regarde West Side Story et comprend que parfois, la musique suffit à sauver le monde. 

Flanagan parvient à transformer une idée de science-fiction métaphysique — et si la vie d’un homme contenait le monde entier ? — en une fresque poétique bouleversante. Car Chuck, c’est peut-être nous tous : une suite de gestes, de regrets, d’éclats de bonheur dans un univers qui, sans nous, n’aurait peut-être jamais existé. Et si l’univers mourait avec notre dernier souffle, cela voudrait dire que nous avons été, ne serait-ce qu’un instant, essentiels. 

La performance de Tom Hiddleston est magistrale. Sans excès, sans démonstration, il incarne cet homme doux et abîmé, conscient que tout s’éteint autour de lui. Mais c’est bien Benjamin Pajak qui emporte le cœur : adolescent étrange, fragile, curieux, il donne à son segment une intensité rare, presque magique. Ce garçon-là, on le reverra — et pas seulement dans nos mémoires. 

La mise en scène est un miracle d’équilibre. Flanagan filme les moments minuscules — un regard, une lumière sur un visage, un pas de danse dans une salle de bain — avec la même ampleur qu’un effondrement cosmique. Il compose avec la photographie d’Eben Bolter, une palette presque tactile, lumineuse sans être clinquante, où chaque teinte semble répondre à une émotion enfouie. 

La musique des Newton Brothers accompagne cette trajectoire comme un murmure de souvenirs : elle flotte, elle s’élève, elle revient, comme ces refrains qu’on n’oublie jamais tout à fait. 

Mais ce qui fait la grandeur de Life of Chuck, c’est son optimisme paradoxal. Le monde meurt, oui. Mais Chuck a aimé. Il a dansé. Il a vu un lever de soleil. Il a eu peur, il a fait rire, il a été un enfant qui riait à Noël. Et ça suffit peut-être pour que tout cela ait eu un sens. 

Dans un monde de plus en plus cynique, Flanagan ose croire en la beauté d’une vie ordinaire. C’est un film sur la mémoire, la transmission, la finitude. Un film qui a l’audace de ne pas chercher à tout expliquer, mais à ressentir. Il n’y a pas de twist, pas de résolution spectaculaire. Seulement un regard, un dernier sourire, une dernière danse. 

En revisitant l’Histoire — non pas la grande, mais celle d’un homme parmi les hommesLife of Chuck interroge aussi notre époque. Car si le monde s’éteint avec Chuck, c’est peut-être aussi une métaphore de notre propre monde en crise : écologique, affective, spirituelle. Flanagan semble dire : Prenons soin les uns des autres. Dansons. Aimons. Parce que tout passe. Et qu’un jour, ce sera notre visage qui s’effacera du panneau lumineux. 

 

Un chef-d'œuvre discret, mélancolique et lumineux. Un de ces films qu’on garde en soi longtemps après que les lumières se sont rallumées. 

NOTE : 17.80

FICHE TECHNIQUE


Production déléguée : Elan Gale, D. Scott Lumpkin, Melinda Nishioka, Molly C. Quinn et Matthew M. Welty
  • Sociétés de production : Intrepid Pictures, QWGmire et Red Room Pictures
  • Sociétés de distribution : Neon (Etats-Unis), FilmNation Entertainment (international), Nour (France)

DISTRIBUTION

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