Vu le film Les Pirates du Métro de Joseph Sargent (1975) avec Walter Matthau Robert Shaw Martin Balsam Hector Helizondo Earl Hndman Jerry Stiller Tom Pedi Lee Wallace
Quatre hommes armés, Mr Blue, Mr Green, Mr Grey et Mr Brown, prennent d'assaut un train du métro de New York et demandent un million de dollars de rançon pour la vie des passagers, livré en une heure. Le lieutenant Garber, en charge de l'affaire, doit trouver un moyen de libérer les otages car chaque minute de retard sera sanctionnée par la mort de l'un des passagers du wagon.
Un métro lancé à pleine vitesse, des truands qui répondent aux noms de couleurs (eh oui, Tarantino n’a rien inventé), un inspecteur de la circulation ferroviaire ronchon mais malin, et un compte à rebours sanglant au cœur de la jungle urbaine : Les Pirates du Métro est un bijou de thriller tendu comme un câble à haute tension. Dans ce huis clos mouvant, Joseph Sargent signe un modèle du genre, où la maîtrise narrative n’est jamais sacrifiée au profit de l’action, et où chaque minute semble comptée — pour les otages, mais aussi pour le spectateur.
Le pitch, d’une efficacité redoutable, propulse immédiatement dans le cœur du danger : quatre hommes armés montent à bord d’une rame new-yorkaise en pleine heure de pointe. À peine quelques stations plus loin, ils coupent les wagons, prennent les passagers en otage, et réclament une rançon d’un million de dollars, à remettre dans un délai précis. S’ils ne l’obtiennent pas, ils exécuteront un otage par minute de retard. Pas de fioritures, pas de flashbacks inutiles : tout se joue en temps réel, entre la rame coincée sous terre et le centre de contrôle du métro, où Walter Matthau campe un lieutenant bourru, sarcastique, mais diablement intelligent.
Le génie du film tient autant à la sobriété de sa mise en scène qu’à son découpage rigoureux. Joseph Sargent transforme les couloirs du métro new-yorkais en véritable théâtre de tensions : tunnels aveugles, lumières blafardes, grondements mécaniques… L’espace souterrain devient un écho à la violence feutrée du monde au-dessus. Et pourtant, malgré le cadre très contraint, jamais la caméra ne tourne en rond. Chaque plan est pensé pour relancer l’enjeu, chaque contrechamp appuie une stratégie ou une menace.
La distribution est à la hauteur de l’intrigue. Walter Matthau excelle en flic grognon et terre-à-terre, balançant répliques cinglantes et sarcasmes face à ses supérieurs. En face, Robert Shaw impose une froideur clinique en chef de gang méthodique, implacable, presque robotique, tandis que Martin Balsam incarne un ex-motorman grisonnant, grippé, plus faillible mais tout aussi inquiétant. On retrouve même dans le quatuor un truand nerveux, surnommé « Mr Grey », prototype du futur Reservoir Dog à venir… Tarantino ne s’y est pas trompé.
Mais Les Pirates du Métro n’est pas seulement un exercice de style : c’est aussi une radiographie d’un New York des années 70, paranoïaque, rugueux, en crise. Les dialogues fusent, parfois crus, souvent drôles, mais aussi révélateurs de mentalités d’époque. Oui, certaines répliques misogynes ou racistes (notamment les propos sur les Japonais en visite dans la salle de contrôle) font grincer des dents aujourd’hui. Elles témoignent d’une époque, mais sans recul critique dans le film lui-même — c’est là que le bât blesse un peu. Cela n’entame pas la qualité du suspense, mais cela rappelle que certains classiques restent datés dans leur regard social.
Le film, lui, ne prend jamais le spectateur pour un idiot : les procédures sont détaillées sans être pesantes, les rapports de force changent sans cesse, et l’enjeu n’est pas tant l’action que la tension nerveuse, la résistance au stress. La scène de la remise de rançon, par exemple, fait naître un suspense formidable sur de simples détails logistiques. L’absence de musique pendant de longues séquences, le montage sec, les dialogues tranchants : tout concourt à maintenir l’attention sans effets faciles.
Et puis, il y a cette fin. Un dernier rebondissement, un petit twist, parfaitement à la hauteur de la tonalité du film : amer, ironique, presque désabusé. Pas de justice spectaculaire, pas de course-poursuite hollywoodienne, mais un dernier échange, un bruit de toux… atchoum !… et le rideau tombe, comme un point final discret mais inoubliable.
Les Pirates du Métro reste, un demi-siècle plus tard, un modèle de thriller urbain. Pas de fioritures, pas de ralenti clippé, pas de musique tonitruante comme dans le remake de Tony Scott — pourtant pas le moins doué — mais une efficacité brute, à la mécanique parfaitement huilée. Ce n’est pas seulement un film de genre réussi : c’est une leçon de mise en tension. Et un portrait sans illusion d’une ville au bord de la crise de nerfs, où même le métro peut devenir une arme.
NOTE : 15.20
FICHE TECHNIQUE
Réalisation : Joseph Sargent Scénario : Peter Stone, d'après le roman Les Pirates du métro de John Godey Musique : David Shire Costumes : Anna Hill Johnstone Sociétés de production : Palomar Pictures et Palladium Productions Société de distribution : United Artists Pays de production : Drapeau des États-Unis États-Unis
DISTRIBUTION
- Walter Matthau (VF : André Valmy) : le lieutenant Zachary Garber
- Robert Shaw (VF : Bernard Dhéran) : M. Bleu / Bernard Ryder
- Martin Balsam : M. Vert / Harold Longman
- Hector Elizondo (VF : Gérard Hernandez) : M. Gris / Giuseppe Benvenuto
- Earl Hindman : M. Brun / George Steever
- Dick O'Neill (VF : Philippe Dumat) : Frank Correll
- Jerry Stiller (VF : Alain Dorval) : le lieutenant Rico Patrone
- Lee Wallace : le maire Albert Schwarz
- Kenneth McMillan (VF : Albert Augier) : le commandant en chef de la police
- Julius Harris : le commissaire divisionnaire Daniels
- Tony Roberts (VF : Jean-Claude Balard) : Warren LaSalle
- Tom Pedi (VF : Jacques Dynam) : Caz Dolowicz
- Robert Weil : Marino
- Nathan George : l'officier James
- Rudy Bond (VF : Henri Poirier) : Phil, le préfet de police
- James Broderick (VF : Claude Joseph) : Denny Doyle
- Doris Roberts (VF : Paule Emanuele) : Jessie Schwarz
- Beatrice Winde (VF : Tamila Mesbah) : Mme Jenkins
- Walter Jones (VF : Med Hondo) : Mattson
- Joe Seneca : un sergent de police
- Hy Anzell : un préposé au guichet
- Ruth Attaway : l'infirmière du maire

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